Le coût environnemental de la mode éphémère

Une pile de vêtements et de déchets laissés au rebut.

La mode éphémère (fast fashion) est néfaste pour l’environnement. De nombreux articles, qui sont souvent fabriqués à partir de matériaux synthétiques non biodégradables, finissent dans les décharges.

Nous vivons dans une culture du « jetable », des vêtements aux tasses de café. Mais rien de ce que nous produisons ne disparaît vraiment. Soit cela retourne à la nature, soit cela pollue. L’industrie de la mode éphémère, fondée sur des coûts peu élevés et des tendances qui se succèdent à un rythme effréné, montre comment la planète finit par en payer le prix; qu’il s’agisse des décharges qui débordent, de l’utilisation de l’eau, des rejets de produits chimiques, des émissions de carbone qui modifient le climat ou des microplastiques.

Le New York Times a inventé le terme fast fashion (mode éphémère) dans les années 1990. Cette expression décrit la rapidité avec laquelle les détaillants font passer les produits du stade de la conception à celui de la vente en magasin. Aujourd’hui, ce terme est utilisé dans les conversations sur la durabilité dans l’industrie de la mode.

Identifiez l’écoblanchiment de l’industrie de la mode éphémère et rafraîchissez votre garde-robe avec des alternatives durables et abordables.

Du podium à la décharge : l’impact environnemental de la mode éphémère

De nombreux fabricants de vêtements ont optimisé leurs circuits depuis la production à la consommation pour produire des vêtements à bas prix qui profitent rapidement des tendances actuelles de la mode. Le problème? Les styles changent plus vite que jamais, ce qui accroît la pression de l’offre et de la demande. Dans le monde, on consomme 80 milliards de nouveaux vêtements chaque année, soit 400 % de plus qu’il y a 20 ans! Bien que les vêtements coûtent moins cher, c’est l’environnement qui en paie le prix.

Utilisation de l’eau et rejets de produits chimiques

Selon le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE), l’industrie de la mode est le deuxième plus grand consommateur d’eau de la planète (l’agriculture arrive en tête). Elle utilise 93 milliards de mètres cubes d’eau, qui pourrait répondre aux besoins de consommation en eau de cinq millions de personnes. Les eaux usées et les produits chimiques rejetés par les usines textiles polluent les sources d’eau et les sols environnants. Environ 20 % des eaux usées dans le monde résultent de la teinture des textiles. Ces eaux sont extrêmement toxiques. Souvent, aucun traitement ne peut les rendre à nouveau salubres.

Le monde a pu constater l’ampleur de cette crise de l’eau à Dhaka, la capitale du Bangladesh. Les inondations ont créé des rivières au débit rapide et les canaux sont devenus noirs à cause des eaux usées chargées de colorants chimiques toxiques. Dacca est le deuxième centre mondial de fabrication de vêtements. C’est l’une des villes du monde les plus vulnérables sur le plan climatique.

Émissions de carbone

L’industrie de la mode est responsable de 8 à 10 % des émissions mondiales. C’est plus que les secteurs de l’aviation et du transport maritime réunis! À ce rythme, les émissions augmenteront de plus de 50 % en 2030.

La production de fibres plastiques destinées à la fabrication de textiles (comme le polyester, le nylon, le polyamide, l’acrylique, etc.) est un processus à forte intensité énergétique qui fait appel à de grandes quantités de combustibles fossiles. La production émet d’énormes quantités de carbone et de particules volatiles, ainsi que des acides comme le chlorure d’hydrogène.

Le transport des vêtements de la mode éphémère consomme également beaucoup d’énergie et génère des émissions de carbone. La chaîne d’approvisionnement mondiale signifie que les produits sont expédiés sur de longues distances, souvent à bord de navires de charge et d’avions-cargos.

Microplastiques

De nombreuses marques de fast fashion utilisent des fibres synthétiques non biodégradables comme le nylon, le polyester et l’acrylique. Une étude réalisée en 2017 (en anglais) a révélé qu’environ 35 % de tous les microplastiques présents dans les océans proviennent du lavage des textiles synthétiques. Les microplastiques ont un impact néfaste sur les écosystèmes marins, la vie aquatique et la santé humaine.

Nous vivons dans un monde de plastique

Presque tous les produits et matériaux que nous appelons « plastiques » sont fabriqués à partir de combustibles fossiles. La plupart d’entre eux n’existent pas depuis longtemps; un peu plus de 70 ans pour les produits les plus courants.

Mise en décharge des déchets

L’évolution rapide des tendances et le caractère abordable de la mode ont créé un cycle destructeur lorsque des produits sont achetés puis jetés. Ce cycle est à l’origine d’un énorme gaspillage de textiles. De nombreux vêtements jetés finissent dans les décharges. Ils sont souvent fabriqués à partir de matériaux synthétiques non biodégradables. Près de 87 % du total des textiles utilisés pour la fabrication des vêtements sont brûlés ou finissent dans une décharge. L’absence de solutions de recyclage et la mise en décharge des vêtements avant même qu’ils ne soient vendus coûtent à l’industrie 500 milliards de dollars chaque année.

FAITS SUR LA MODE ÉPHÉMÈRE

01

25 pour cent

des vêtements neufs restent invendus. Et jusqu’à 12 % des fibres sont jetées à l’usine.

02

3 500

produits chimiques sont utilisés dans la production textile. Dix pour cent de ces produits chimiques sont dangereux pour la santé humaine. Cinq pour cent sont dangereux pour l’environnement.

03

35 pour cent

des microplastiques primaires présents dans les océans proviennent du lavage des textiles synthétiques. Chaque année, 0,5 milliard de kilogrammes de fibres microplastiques sont rejetés dans les océans.

Source : Greenpeace, Greenwash Danger Zone

Considérations éthiques sur la fast fashion

La mode éphémère soulève plusieurs questions concernant les pratiques de travail, les droits humains et l’impact social.

  • Exploitation de la main-d’œuvre. Les marques de mode éphémère sont souvent critiquées pour l’exploitation d’une main-d’œuvre bon marché dans les pays du Sud. Les travailleur.euse.s de ces régions sont souvent confronté.e.s à des salaires bas, de mauvaises conditions et de longues heures de travail non réglementées. Elles et ils ne bénéficient pas toujours d’une sécurité de l’emploi, de droits syndicaux et de droits du travail.
  • Travail infantile et exploitation des enfants. Ces entreprises s’appuient sur les personnes les plus pauvres et ciblent les enfants défavorisés pris dans le cycle de la pauvreté. Une enquête (en anglais) menée dans une usine textile en Inde a révélé que 60 % des employé.e.s avaient moins de 18 ans lorsqu’ils et elles ont commencé à travailler.
  • Conditions de travail dangereuses. De nombreuses usines privilégient de faibles coûts au détriment de la sécurité, au risque de mettre en danger la vie des travailleur.euse.s. L’effondrement du Rana Plaza au Bangladesh en 2013 a causé la mort de 1 100 personnes.
  • Exposition à des produits chimiques toxiques. Des milliers de produits chimiques synthétiques sont utilisés dans la production des vêtements de la mode éphémère. Les travailleur.euse.s des usines sont exposé.e.s à des produits chimiques connus pour leurs effets cancérigènes et les inhalent. L’exposition de travailleur.euse.s racialisé.e.s à des niveaux plus élevés de produits chimiques toxiques constitue une forme de racisme environnemental.

Quelles sont les pires marques de fast fashion?

Shein, le géant chinois de la vente au détail, est un géant mondial de la mode exclusivement en ligne. Son impact sur l’environnement et la santé humaine est considérable.

C’est l’une des entreprises les plus grandes et les plus populaires au monde. Avec une valeur de 66 milliards de dollars, elle représente plus d’un tiers du marché de la mode éphémère aux États-Unis. Elle est particulièrement populaire auprès de la génération Z parce qu’elle suit les tendances de la mode. En effet, elle ajoute 10 000 nouveaux articles à son inventaire chaque jour! Elle se rapproche des jeunes grâce à des campagnes stratégiques de marketing d’influence et en maintenant des prix bas. L’influence et le pouvoir de Shein sont immenses, tout comme son impact environnemental et les préoccupations éthiques la concernant.

L’entreprise émet environ 6,3 milliards de kilogrammes de dioxyde de carbone chaque année. Cela équivaut à 180 centrales électriques au charbon. La plupart des produits Shein sont fabriqués à partir de plastique, de fibres synthétiques et de teintures chimiques toxiques. Des scientifiques ont découvert qu’un vêtement pour enfant Shein contenait près de 20 fois la quantité de plomb que Santé Canada considère comme sûre pour les enfants (article en anglais).

Shein a également fait l’objet d’un examen minutieux en raison de ses conditions de travail déplorables, du vol de designs d’artistes indépendant.e.s (qui a donné lieu à un procès fédéral pour racket), de la vente d’articles choquants et de la mauvaise gestion des données relatives aux client.e.s.

Mais ce ne sont pas les seuls coupables. Des centaines de marques et d’entreprises contribuent au problème de la fast fashion. Six autres entreprises affichent les pires bilans environnementaux : Zara, H&M, Forever 21, Uniqlo, Mango et ASOS.

Décortiquer les impacts environnementaux de l’achat en ligne

Les achats en ligne peuvent présenter certains avantages pour l’environnement. Mais c’est compliqué… La surconsommation, l’emballage, le transport, les retours et le caractère jetable font tous partie des systèmes et de la culture de l’achat en ligne. Il faut trouver un meilleur équilibre entre la commodité moderne et la durabilité.

Comment minimiser l’impact environnemental des achats en ligne

Attention à l’écoblanchiment

À mesure que les consommateur.rice.s deviennent plus soucieux.euses de l’environnement, les marques de mode sont de plus en plus nombreuses à tirer parti de l’attrait pour la durabilité.

Si certains détaillants de vêtements tentent légitimement d’atténuer leur impact environnemental en utilisant des matériaux plus durables, en réduisant les déchets et en améliorant les pratiques de la chaîne d’approvisionnement, d’autres trompent leurs client.e.s avec des affirmations fausses ou inexactes. Il est important de faire des recherches et d’apprendre à repérer l’écoblanchiment.

L’écoblanchiment (ou greenwashing en anglais) est une technique de marketing qui consiste à revendiquer une responsabilité environnementale et/ou sociale pour masquer des pratiques nuisibles et/ou non éthiques. Ces tactiques visent à attirer ou à fidéliser des consommateur.rice.s soucieux.euses de l’environnement et/ou à améliorer de manière trompeuse l’image d’une entreprise.

Un examen des revendications en matière de développement durable dans l’industrie de la mode a révélé que 39 % des revendications écologiques formulées par les grandes marques de mode pourraient être fausses ou trompeuses. De grandes marques de mode éphémère comme H&M, Zara, Uniqlo, Nike et Allbirds ont été dénoncées pour leur écoblanchiment.

Ce qu’il faut regarder lorsque l’on soupçonne de l’écoblanchiment :

  • Des affirmations vagues ou non fondées. Les entreprises peuvent dire que leurs produits sont « respectueux de l’environnement », « verts » ou « durables » sans fournir de détails spécifiques. C’est sur cette base qu’a été intenté le recours collectif contre H&M en 2022.
  • Images trompeuses. Utilisation d’images de nature, de verdure ou de symboles écologiques dans la publicité et l’image de marque. Cela donne l’impression d’une responsabilité environnementale, même si les pratiques commerciales de base ne sont pas durables.
  • Produits durables symboliques. Les marques de mode éphémère peuvent lancer une petite ligne de produits écologiques tout en continuant à utiliser des méthodes de fabrication non durables. Cela crée l’illusion d’un engagement en faveur de la durabilité.
  • Manque de transparence. L’entreprise publie-t-elle des informations sur sa chaîne d’approvisionnement, ses conditions de travail ou son impact sur l’environnement? Sans ces informations, il est impossible d’évaluer les véritables efforts d’une entreprise en matière de développement durable.
  • Certifications non reconnues. Certaines certifications ne répondent pas à des normes rigoureuses, tandis que d’autres peuvent être carrément trompeuses.

Pour éviter de tomber dans le piège des tactiques d’écoblanchiment :

  • Faites des recherches. Étudiez les déclarations de l’entreprise, ses pratiques et sa réputation en matière de développement durable. Recherchez des informations transparentes et vérifiables.
  • Vérifiez les certifications. Vérifiez la légitimité des certifications environnementales utilisées par la marque. Des certifications telles que BCI (Better Cotton Initiative) et GOTS (Global Organic Textile Standard) sont des exemples de certifications reconnues.
  • Soutenez les marques véritablement durables. Choisissez de soutenir des marques qui ont démontré leur engagement sur le long terme en faveur de la durabilité et des pratiques éthiques. Faites savoir aux détaillants et aux fabricants ce que vous voulez.

Les consommateur.rice.s informé.e.s qui plaident pour une vraie transparence contribuent à responsabiliser les entreprises et les marques de la mode éphémère.

Comment et pourquoi acheter d’occasion

En tant que consommateur.rice.s, nous pouvons faire le choix conscient de réduire notre consommation en achetant de seconde main. Cela contribue à l’économie circulaire. De plus, qui n’aime pas les chasses au trésor? Tout ce dont vous avez besoin a probablement déjà été créé!

Découvrez des conseils acheter d’occasion

Comment savoir si une marque est de la mode éphémère

Apprenez à connaître les caractéristiques et les pratiques communément associées au modèle d’entreprise de la mode éphémère.

Vous avez des doutes? Posez-vous les questions suivantes :

  • Prix : La marque propose-t-elle des vêtements et des accessoires à des prix exceptionnellement bas, souvent avec des rabais fréquents?
  • Rotation rapide des stocks : La marque sort-elle fréquemment de nouvelles collections, souvent sur une base hebdomadaire ou même quotidienne, afin de suivre les dernières tendances de la mode?
  • Imitation des tendances : La marque reproduit-elle rapidement les tendances populaires des défilés, des créateur.rice.s ou des réseaux sociaux et les propose-t-elle à une fraction du prix?
  • Matériaux de mauvaise qualité : Les matériaux utilisés dans leurs produits sont-ils de qualité inférieure ou en fibres synthétiques?
  • Pratiques de travail : Existe-t-il des preuves ou des rapports faisant état de mauvaises pratiques en matière de travail, notamment de bas salaires, de conditions de travail dangereuses et d’exploitation des travailleur.euse.s.
  • Impact environnemental ou efforts en matière de développement durable : La marque est-elle transparente quant à ses pratiques environnementales? Se présente-t-elle comme « verte » ou « respectueuse de l’environnement » sans apporter de preuves concrètes?
  • Fabrication externalisée : La marque produit-elle principalement ses vêtements dans des pays connus pour leur faible niveau de réglementation en matière de travail et d’environnement?
  • Manque de transparence : La marque cache-t-elle des détails sur sa chaîne d’approvisionnement, ses pratiques en matière d’approvisionnement et de travail, ce qui rend difficile pour les consommateur.rice.s d’évaluer ses engagements éthiques et environnementaux?

Comment faire des achats abordables sans dépendre de la fast fashion

Les prix abordables de la mode éphémère sont attrayants. De nombreuses personnes subissent les conséquences de la crise du coût de la vie, de l’insécurité financière et de l’inflation sur les biens essentiels (y compris l’habillement). Cela peut signifier faire des sacrifices pour répondre aux besoins de base.

Voici quelques stratégies qui permettent de concilier accessibilité financière et durabilité :

  • Achetez moins et privilégiez la qualité. Investissez dans un plus petit nombre de vêtements polyvalents de haute qualité qui dureront plus longtemps. Bien que ces articles soient plus chers au départ, ils s’avèrent souvent plus rentables à long terme et ont un impact moindre sur l’environnement.
  • Privilégiez les achats d’occasion. Le troc, la consignation et l’achat de vêtements de seconde main sont des moyens abordables et respectueux de l’environnement. Ils permettent de prolonger la durée de vie des vêtements existants, de contribuer à une économie circulaire et de réduire la demande de nouveaux articles produits en masse.
  • Organisez un échange de vêtements. Prenez l’habitude de désencombrer à chaque changement de saison et organisez un échange de vêtements. C’est un excellent moyen de rafraîchir votre garde-robe et de donner les articles que vous ne portez plus à une personne qui les portera.
  • Réparez et revalorisez. Apprenez les rudiments de la couture pour réparer vos vêtements lorsqu’ils sont abîmés. Envisagez de revaloriser de vieux vêtements en les transformant en nouvelles pièces pour leur donner une seconde vie. Ou transformez des vêtements inutilisables en guenilles ou en projets artistiques!
  • Prenez soin de vos vêtements. Ils dureront plus longtemps et vous polluerez moins.
  • Constituez une garde-robe capsule. On estime que 40 % des vêtements achetés ne sont jamais portés! Une garde-robe capsule se compose de 10 à 20 vêtements polyvalents, de bonne qualité et durables, qui peuvent être assortis les uns avec les autres.
  • Louez ou empruntez. Pour les occasions spéciales ou les événements ponctuels, pensez à louer des vêtements ou à les emprunter à des ami.e.s ou à des membres de votre famille.
  • Adoptez la mode responsable. La mode responsable (slow fashion) est un mouvement qui prône la justice environnementale et sociale dans l’industrie de la mode. Soutenez les détaillants qui affichent fièrement leurs valeurs et s’y conforment.

Concilier accessibilité financière et durabilité peut s’avérer difficile au début. Mais de petits changements intentionnels dans vos habitudes d’achat peuvent avoir un impact positif sur votre portefeuille et sur l’environnement.