La Fondation David Suzuki est fière de s’associer à l’organisme Black Environmental Initiative, afin de souligner l’importance de lutter contre le racisme environnemental. Le racisme environnemental existe au Québec, au Canada et ailleurs au monde. Il s’agit d’une facette de l’injustice environnementale, qui se manifeste lorsque le développement, les politiques ou les pratiques entraînent, intentionnellement ou non, une augmentation de la pollution ou des risques pour la santé dans les communautés noires, autochtones et racialisées. Il se manifeste également par des inégalités d’accès aux avantages environnementaux tels que l’eau et l’air purs et la proximité des parcs. Le racisme environnemental a de graves répercussions sur la santé et le bien-être. C’est pourquoi nous nous engageons, en ce Mois de l’histoire des Noir.e.s, et tous les jours qui suivront, à sensibiliser la population à cet enjeu et aux solutions pour y remédier.
Le racisme environnemental est une expression créée à la fin des années 70 aux États-Unis pour décrire le fait que des groupes qui ont du pouvoir exposent injustement d’autres groupes moins favorisés à la pollution.
Ce manque de pouvoir de certaines communautés les rend plus vulnérables à l’impact des industries et projets polluants. Elles n’ont souvent pas les moyens de résister et sont rarement écoutées et valorisées par les autorités et la société.
En ce Mois de l’histoire des Noir.e.s, parler de racisme environnemental est un moyen efficace de susciter des réflexions sur l’histoire qui a amené certaines communautés autochtones, immigrantes ainsi que les communautés noires du Québec et du Canada, à être disproportionnellement affectées par la pollution et les changements climatiques.
Le racisme environnemental : l’histoire se poursuit
Avant l’industrialisation, l’Afrique n’était pas juste le berceau de l’humanité, mais aussi celui de plusieurs civilisations. L’histoire nous montre que l’industrialisation et la colonisation ont appauvri économiquement et culturellement les communautés noires et que la dévalorisation des personnes soi-disant « noires » s’est ancrée dans les cultures du monde partout où le capitalisme a pris pied.
Par conséquent, les peuples d’origine africaine, une fois déplacés et installés ailleurs, ont souvent été relayés au bas de l’échelle sociale, assignés à des environnements dévalués et continuellement vulnérables à la violence spatiale qui a longtemps marqué leur histoire.
Des communautés noires dans les dépotoirs?
Le design et l’aménagement de nos espaces urbains et ruraux ainsi que les décisions des industries polluantes ont fréquemment pris l’environnement des communautés les plus pauvres comme dépotoirs.
Aujourd’hui, la plupart des produits créés sont conçus pour être jetés et abandonnés. Le concept de « produits jetables » affecte la façon dont on pense nos produits, mais aussi la façon dont on traite les humains qui font partie de leurs cycles de vie.
Rien de tout ça n’arriverait si nos produits de consommation, nos villes et nos systèmes étaient conçus en pensant à l’impact de nos choix sur les communautés les moins nanties, dont les communautés noires.
Mourir… de pollution
En 2021, suite au meurtre de George Floyd, nous avons vu un changement de standard sociétal au niveau de la façon de considérer les enjeux de racisme à travers le monde.
Contrairement à la brutalité policière, lorsqu’on tue une personne noire avec la pollution de l’air, cela ne fait aucun bruit et ne peut être capturé sur film de façon spontanée. Ella Kissi-Debrah est peut-être l’exception à cette règle et rentrera dans l’histoire comme la première personne à avoir été légalement désignée « morte par pollution de l’air ». Mais combien d’autres Ella Kissi-Debrah aurons-nous ici au Canada, au Québec?
Contrairement à la brutalité policière, lorsqu’on tue une personne noire avec la pollution de l’air, cela ne fait aucun bruit.
On n’a pas à chercher très loin pour trouver des exemples de communautés racialisées au Québec qui souffrent des impacts de la pollution et des changements climatiques : les communautés de Montréal-Nord font face aux îlots de chaleurs et à l’absence d’espaces verts (3,9 % dans Montréal-Nord d’espaces verts contre 11,4 % partout à Montréal). C’est le cas aussi des habitant.e.s de Rivière-des-Prairies où, en plus de problèmes historiques de qualité de l’eau dus au manque de traitement des eaux à Montréal, on entend souvent parler de problèmes d’odeurs nauséabondes en provenance d’usines devant lesquels les autorités prennent rarement des actions correctives, ou de cas de déversements illégaux de sols contaminés.
C’est aussi le cas des communautés noires de Limoilou à Québec qui, en plus d’être potentiellement impactées par le fort taux de niveau de nickel et par la récente menace d’une hausse de la norme de nickel dans l’air, seront surement moins résilientes face à cet impact environnemental sur leur petite communauté.
Le prochain chapitre de l’histoire des Noir.e.s au Québec et au Canada passe par les récent.e.s immigrant.e.s. La qualité environnementale des quartiers et environnements dans lesquels ils et elles vivent doit être vue comme un baromètre de la santé des communautés noires canadiennes et québécoises. Un baromètre qui indique que ça ne va pas du tout.
Des solutions au racisme environnemental
S’il est évident que l’industrialisation du monde s’est faite – de façon injuste et avec des effets dévastateurs – sur le dos des communautés noires et autochtones, il est souvent moins évident que la dévaluation de ces communautés n’a pas seulement eu un impact néfaste sur quelques portions de planète – elle est dans le processus de détruire la planète entière. Si nous voulons réparer les dommages causés à la Terre, il est important que nous réparions aussi les injustices faites aux communautés noires et racialisées.
Ensemble, nous devons tou.te.s faire le nécessaire pour réduire la facture du racisme environnemental et le coût que les communautés noires, immigrantes et autochtones ont injustement à payer pour une industrialisation qui ne les a pas favorisées.
En 2022, nous nous devons de nous assurer que les communautés noires et racialisées soient invitées aux tables de décision et de concertation et pas que dans le menu économique gourmand du capitalisme. C’est l’avenir de la planète – l’avenir de nous tou.te.s – qui en dépend.
Ensemble, nous devons tou.te.s faire le nécessaire pour réduire la lourde facture du racisme environnemental et le coût que les communautés noires, immigrantes et autochtones ont injustement à payer pour une industrialisation qui ne les a pas favorisées.
Bien qu’il n’y ait pas de solution unique, l’organisme Black Environmental Initiative que j’ai fondé en 2019, avec nos partenaires, fait la promotion de mesures institutionnelles ou législatives et de programmes innovants qui peuvent aider à redresser les injustices environnementales historiques tout en construisant un futur où règne la justice environnementale.
Finalement, au-delà de ce mois de l’histoire des Noir.e.s, les mouvements environnementaux doivent s’engager à mieux comprendre et à mieux expliquer le racisme environnemental de sorte que cette cause, qui a un impact sur des milliers de vies humaines, ait de plus en plus de résonance et d’allié.e.s motivé.e.s, au Québec, au Canada et dans le monde.
Notre mouvement environnemental doit s’engager à mieux comprendre et à mieux expliquer le racisme environnemental de sorte que cette cause, qui a un impact sur des milliers de vie humaines, ait de plus en plus de résonance et d’allié.e.s motivé.e.s, au Québec, au Canada et dans le monde.
Vous voulez faire partie de la solution? Voici quelques liens et ressources utiles pour aller plus loin :
- Apprenez-en plus sur l’organisme Black Environmental Initiative.
- Inscrivez-vous au panel en ligne du 22 février à 19h30 (gratuit) “Racisme et environnement : quels liens, quelles solutions ?” en présence de Naolo Charles de Black Environmental Initiative, Fatima Terhini et Cathy Ramirez de chez Hoodstock, organisation qui œuvre pour la justice sociale.
- Faites entendre votre voix en agissant en ligne dès aujourd’hui.
- Apprenez en plus sur le Mois de l’histoire des Noir.e.s.
Naolo Charles est le fondateur de Black Environmental Initiative, une organisation qui se consacre à l’engagement environnemental et à la protection des communautés noires. Il est également cofondateur de la Coalition nationale pour la justice climatique et environnementale qu’il a lance avec Dr. Ingrid Waldron. Naolo est un des facilitateurs du programme “Next Gen Builders” du Toronto Community Benefit Network où il offre une formation en construction verte et siège sur la table de conseil du programme. Naolo est aussi un des professionnels qui a participé à la table d’expert.e.s réunie par Environnement et Changement climatique Canada pour le développement de la première stratégie nationale d’adaptation du Canada.