Le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) reflète la nécessité pour les gouvernements, y compris le Canada, de tenir compte des objectifs climatiques dans le cadre de la trajectoire de l’économie mondiale qui génère beaucoup d’émissions.

Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) réitère que nous sommes au bord du gouffre climatique et que nos efforts d’adaptation ne s’avèrent pas plus efficaces que ceux visant à atténuer cette crise planétaire.

Le récent rapport, Impacts, Adaptation and Vulnerability, sonne l’alarme et prône pour un changement transformationnel dans la façon dont nous produisons et consommons, tout en soulignant le besoin criant pour les gouvernements d’investir davantage dans l’adaptation aux changements climatiques.

Les politiques climatiques nationales et internationales ne peuvent à elles seules résoudre ce problème. Les gouvernements doivent reconnaître la grave incidence de leurs politiques en matière de commerce et d’investissement sur les changements climatiques. Ils doivent remédier à l’incohérence profonde et historique entre leurs objectifs de politique climatique et la trajectoire inquiétante de l’économie mondiale qui génère beaucoup trop d’émissions.

En tant que l’un des plus grands émetteurs et exportateurs de gaz à effet de serre par habitant, le Canada a un rôle de premier plan à jouer.

En tant que l’un des plus grands émetteurs et exportateurs de gaz à effet de serre par habitant, le Canada a un rôle de premier plan à jouer. Le rapport doit inciter le gouvernement canadien à améliorer les dimensions coopératives internationales de sa Stratégie nationale d’adaptation afin d’assumer sa juste part quant au financement international de la lutte contre les changements climatiques et, surtout, de faire de ses politiques commerciales et d’investissement de véritables vecteurs de l’action climatique.

Bien que les accords multilatéraux et bilatéraux en matière de commerce et d’investissements durables soient essentiels pour modifier les modèles de production industrielle et de consommation au niveau mondial, le commerce n’a pas été un sujet clé de la COP26. Les engagements pris par le Canada et d’autres pays, notamment ceux visant à mettre fin à la déforestation et au financement des projets internationaux de combustibles fossiles, n’en demeurent pas moins clairement liés à la politique commerciale et d’investissement.

Quelques jours seulement après la COP26, le Canada et les États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est ont annoncé des négociations en vue d’un accord de libre-échange international. Ces négociations devraient être l’occasion de créer des règles et des pratiques commerciales alignées sur les objectifs des politiques climatiques internationales et nationales. D’ailleurs, la lettre de mandat de la ministre du Commerce international cite les attentes liées à la promotion des engagements du Canada en matière de changements climatiques, mais ne fait aucune mention claire des changements climatiques en ce qui concerne les possibilités de libre-échange.

Ces négociations devraient être l’occasion de créer des règles et des pratiques commerciales alignées sur les objectifs des politiques climatiques internationales et nationales.

Selon une analyse de faisabilité conjointe des partenaires commerciaux, un accord commercial avec l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est pourrait faire augmenter le PIB du Canada de 2,54 milliards de dollars américains. Toutefois, cette analyse donne peu d’indications sur la façon dont la croissance projetée est liée au climat et peut aggraver la crise climatique.

L’approche dite progressiste du Canada en matière de négociations de libre-échange est dépassée et risque d’exacerber la crise climatique. Le Canada devrait suivre l’exemple de la Nouvelle-Zélande, du Costa Rica, des Fidji, de l’Islande, de la Norvège et de la Suisse. En 2019, ces pays ont commencé à négocier un accord sur les changements climatiques, le commerce et le développement durable, destiné à regrouper les programmes liés à ces domaines.

Le Canada devrait s’en inspirer et réorienter son programme de politique commerciale pour cibler la menace économique, sociale et environnementale de la crise climatique. Pour garantir que la politique d’écologisation du commerce n’ait pas d’incidence sur les pays pauvres, elle doit également intégrer des règles visant à promouvoir le transfert de technologies durables et à accroître l’accès à la propriété intellectuelle.

Sur le plan du commerce international, cette menace existentielle exige une stratégie plus efficace que des approches désuètes du 20e siècle. Nous avons besoin de revoir l’économie mondiale, de revoir nos principes fondamentaux qui sous-tendent nos relations commerciales, notamment sur l’abandon des processus de règlement des différends entre investisseurs et États.

Après la Seconde Guerre mondiale, on a fait la promotion du commerce international en croyant qu’une plus grande interdépendance économique réduirait le protectionnisme et la guerre, tout en favorisant la paix et la prospérité. Malheureusement, la façon dont nous avons libéralisé le commerce a accru les inégalités et aggravé la crise climatique La croissance fondée sur l’exploitation a alimenté les conflits et les inégalités dans le monde. Nous devons agir maintenant pour éviter que l’histoire ne se répète.