Des enfants et David Suzuki se rassemblent dans un jardin

Que faudra-t-il pour que nous nous tournions vers l’extérieur, pour que nous élargissions le cercle aux autres êtres vivants, en créant un espace pour leur survie, leur rétablissement et leur épanouissement? (Photo: Flickr)

Les idées sur la relation de l’humanité avec la planète varient considérablement. Certain.e.s pensent que la Terre nous donne de l’amour. Après tout, elle nous approvisionne en nourriture, en air, en eau et en beauté remarquable. D’un autre côté, elle nous déteste peut-être pour avoir – parmi une longue liste déprimante – opprimé nos semblables, rasé les forêts, les zones humides et les prairies, créé la plaque de déchets du Pacifique, conduit des milliers d’espèces à l’extinction, modifié le climat et plus encore.

Ou, comme le diraient nombre de mes collègues scientifiques, elle pourrait nous être indifférente. Nous ne sommes qu’un rouage dans un grand engrenage, une espèce parmi des millions d’autres, qui toutes, à leur manière, modifient le monde, pour le meilleur ou pour le pire.

La réalité, comme l’a récemment expliqué Robin Wall Kimmerer – autrice de Braiding Sweetgrass – dans une interview au New York Times, est qu’en fin de compte, ce n’est pas à propos de nous.

La Terre et ses systèmes vivants changent depuis des millions d’années et continueront de le faire pendant des millions d’autres. Dans son livre Otherlands, Thomas Halliday retrace les écosystèmes disparus, en remontant de la dernière période glaciaire à la première apparition de la vie multicellulaire, il y a 550 millions d’années. Il écrit que beaucoup d’entre nous seraient surpris de voir à quel point les composants de la nature ont changé au cours du temps.

« De nombreux éléments du monde naturel que nous tenons pour acquis aujourd’hui sont apparus relativement récemment », écrit Halliday. « Les plantes herbacées, principale composante des plus grands écosystèmes de la planète aujourd’hui, ne sont apparues qu’à la toute fin du Crétacé, il y a moins de 70 millions d’années, comme de rares éléments des forêts de l’Inde et de l’Amérique du Sud. »

Kimmerer évoque les époques géologiques qui ont façonné et remodelé la planète, ainsi que la place des êtres humains dans celles-ci. « Certains de ces cycles de création et de destruction qui favorisent le renouvellement et le changement peuvent être néfastes pour nous, mais nous ne sommes que l’une des 200 millions d’espèces. Ils pourraient également être néfastes pour d’autres espèces, mais au fil de l’évolution, nous constatons que les changements majeurs qui sont destructeurs sont également des occasions d’adaptation et de renouveau, et d’élaboration de nouvelles solutions évolutives à des problèmes difficiles. »

Elle affirme que : « C’est une erreur de romancer le monde vivant, mais c’est aussi une erreur de penser que le monde vivant est un adversaire ».

À bien des égards, la façon dont nous percevons la nature se reflète dans les récits que nous racontons sur nous-mêmes.

À bien des égards, la façon dont nous percevons la nature se reflète dans les récits que nous racontons sur nous-mêmes.

En tant qu’animaux, nous sommes – quels que soient nos coiffures et nos vêtements – des constituants du réseau naturel. Que nous le reconnaissions ou non, comme la plupart des espèces, nous vivons en symbiose avec le monde qui nous entoure. Nous sommes des prédateurs pour de nombreuses espèces, mais nous pouvons aussi nourrir des vers et des champignons, selon la façon dont nous choisissons de retourner à la terre à la fin de notre vie.

En tant qu’espèce capable de conceptualiser les problèmes et les solutions, et de planifier l’avenir (une capacité que nous partageons avec d’autres espèces), nous avons le choix de la façon dont nous influençons les autres êtres vivants et non vivants. L’un des facteurs à l’origine des crises écologiques et climatiques actuelles est notre croyance largement répandue selon laquelle l’existence tourne autour de nous, que nous sommes au centre plutôt que sur la courbe du cercle de la vie.

Le regretté écrivain Barry Lopez a émis l’hypothèse que cela pourrait faire partie de notre héritage génétique. « Notre problème semble être que, vous savez, notre héritage de primate, qui est visible en observant le comportement des chimpanzés et des bonobos, et que nous sommes vivement intéressé.e.s par nous-mêmes et opposé.e.s aux autres. C’est profondément ancré dans nos gènes. Et avec le type de monde que nous avons construit, cela ne va pas marcher. »

Pour notre bien-être à long terme en tant qu’espèce et en tant qu’individus, nous devons établir une relation plus mutualiste avec nos environnements globaux. Ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons préserver non seulement leur infinie variété, mais aussi notre place dans ces environnements.

Halliday partage ce sentiment. Dans son livre, il conclut : « Pour notre bien-être à long terme en tant qu’espèce et en tant qu’individus, nous devons établir une relation plus mutualiste avec nos environnements globaux. Ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons préserver non seulement leur infinie variété, mais aussi notre place dans ces environnements. »

Que faudra-t-il pour que nous nous tournions vers l’extérieur, pour que nous élargissions le cercle aux autres êtres vivants, en créant un espace pour leur survie, leur rétablissement et leur épanouissement?

Kimmerer pense que c’est possible. « C’est une fausse dichotomie de dire que nous pourrions avoir le bien-être humain ou l’épanouissement écologique », écrit-elle. « Il y a trop d’exemples dans le monde où nous avons les deux, et ce récit de l’un ou l’autre est profondément destructeur et nous empêche d’imaginer un avenir différent pour nous-mêmes. »