Un randonneur se promène dans la forêt

Mon héritage asiatique a aussi été en partie responsable de mon amour de la nature. (Photo: Flickr)

Je n’ai pas grand-chose de plus à demander dans la vie que d’inspirer les autres à aimer la nature. Mais j’ai été particulièrement ému par un récent article (en anglais) dans The Globe & Mail de la professeure d’écologie à l’Université de la Colombie-Britannique, Michelle Tseng , qui est aussi bénévole dans le cadre du projet sur les pollinisateurs de la Fondation David Suzuki.

« Je ne le savais pas à l’époque, mais grandir dans une ferme au milieu de nulle part, avec l’étrange mais régulier passage à la télévision du monsieur à l’allure asiatique parlant de la nature, a fait naître ma fascination pour le monde naturel et m’a inconsciemment guidée là où je suis aujourd’hui », écrit-elle, ajoutant que j’ai « fait en sorte qu’il soit acceptable pour quelqu’un qui me ressemble d’être en plein air et de passer mes jours (et mes nuits) à essayer de percer les mystères de la nature ».

Mon héritage asiatique a aussi été en partie responsable de mon amour de la nature – mais d’une manière moins positive. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement a envoyé ma famille dans un camp d’internement dans la région intérieure de la Colombie-Britannique, bien que nous soyons toutes et tous né.e.s au Canada! Je ne parlais pas japonais donc il était difficile de me faire des ami.e.s. Au lieu de cela, encouragé par mon père, qui m’a appris le camping et la pêche, j’ai passé mes journées à explorer la nature.

Le mois de mai est le Mois du patrimoine asiatique et le thème de cette année est « Des récits de détermination ». Il a fallu beaucoup de détermination aux Asiatiques pour surmonter l’adversité au Canada.

Le mois de mai est le Mois du patrimoine asiatique et le thème de cette année est « Des récits de détermination ». Il a fallu beaucoup de détermination aux Asiatiques pour surmonter l’adversité au Canada.

Les ouvriers chinois ont fait face à de mauvais traitements et à la mort lors de la construction des chemins de fer du pays. De 1885 à 1923, le gouvernement fédéral a imposé une taxe d’entrée pour les dissuader de venir au Canada, puis il a décrété une interdiction totale de l’immigration. Les personnes d’origine japonaise, comme ma famille, ont eu tous leurs biens saisis et ont été forcées de vivre dans des camps d’internement pendant la Seconde Guerre mondiale.

En 1914, le Komagata Maru, un navire transportant des immigrant.e.s indien.ne.s qui étaient des sujets britanniques, n’a pas été autorisé à accoster. Après deux mois de conditions difficiles, le navire est renvoyé en Inde, où les autorités britanniques tuent 19 des passagers.

Les Asiatiques, qu’ils et elles soient né.e.s au Canada ou naturalisé.e.s, n’ont pas été autorisé.e.s à voter au Canada jusqu’en 1948.

Il y en a d’autres, mais vous avez compris. Même si les populations autochtones vivaient ici depuis des millénaires, le Canada, comme beaucoup d’autres lieux, a été conçu pour les colonisateurs blancs et les colons d’origine européenne.

Les tentatives de suppression de la diversité ont été l’un des plus grands échecs de l’humanité. La diversité est une force, que ce soit dans une forêt, dans une ferme ou parmi les êtres humains. Une plantation d’arbres composée d’une seule espèce est sujette aux maladies et à d’autres menaces. Une forêt diversifiée est résistante – si une maladie ou un parasite attaque une espèce, les autres se développent.

Nier la diversité parmi les gens a limité les connaissances et les idées. La culture coloniale dominante qui a envahi et colonisé de nombreuses régions du monde était fondée sur des notions de supériorité. N’étant pas attachés aux lieux, les colonisateurs considéraient le monde naturel – et les personnes non blanches – comme quelque chose à exploiter.

Les tentatives de suppression de la diversité ont été l’un des plus grands échecs de l’humanité. La diversité est une force, que ce soit dans une forêt, dans une ferme ou parmi les êtres humains.

Les peuples autochtones à travers le monde savaient, grâce à l’expérience acquise au même lieu au fil du temps, que nous faisons partie de la nature et que ce que nous faisons à celle-ci, nous le faisons à nous-mêmes. Si nous en prenons trop, les systèmes s’effondrent et il ne reste plus rien pour l’avenir.

Nous sommes maintenant confronté.e.s à de graves crises environnementales qui menacent notre santé, notre bien-être et notre survie – en grande partie parce que nous avons accordé la priorité à une seule façon de penser, une façon qui n’a pas tenu compte de l’importance de protéger les terres, les eaux, l’air et la biodiversité qui rendent la vie possible.

Une grande partie de la vision occidentale du monde s’est faite à travers le prisme d’une science réductionniste qui examine les choses en tant que parties isolées et ne tient pas compte de l’ensemble. Maintenant, plus que jamais, nous avons besoin de perspectives diverses pour mieux comprendre comment vivre en harmonie avec notre environnement et les un.e.s avec les autres.

Le Mois du patrimoine asiatique peut être un moyen de célébrer les contributions de la diversité des gens qui ont des racines dans cette grande partie du monde que nous appelons l’Asie, mais c’est aussi un rappel que nous devons embrasser la diversité et surmonter les problèmes systémiques que le privilège blanc et le racisme ont engendrés.

Inspirer des gens qui me ressemblent à aimer la nature est gratifiant, mais mon plus grand objectif a toujours été d’inspirer des gens de toutes les origines et de tous les milieux à embrasser la nature et la diversité. C’est l’histoire de ma détermination.