Partage ta pelouse : lancement d’un mouvement national

(Design : Annie Trudeau / Fondation David Suzuki)

Une soirée festive a eu lieu le 18 avril dernier dans le cadre de la campagne Partage ta pelouse (LawnShare en anglais) à la Maison du développement durable, initiée par la Fondation David Suzuki (FDS), Dark Matter Labs et Nouveaux Voisins. Son objectif? Repenser la place des pelouses traditionnelles en tant qu’habitats sains pour la faune, la flore et les communautés, que ce soit dans les jardins et les quartiers.

Par le biais de la sensibilisation et de la mobilisation, ce mouvement national s’adresse à tout.e un.e chacun.e, aux municipalités et aux entreprises. Les initiatives proposées se veulent collaboratives et inclusives, afin de transformer notre relation collective avec la pelouse tout en soulignant certains de ses bienfaits écologiques.

Alexandre Huet

L’objectif de la campagne est de repenser notre relation avec la pelouse et sa place dans nos espaces publics et privés, ainsi que de redonner plus de place à notre biodiversité locale. Partage ta pelouse offre un guide pratique en 10 étapes créé par Nouveaux Voisins afin d’accompagner les personnes désirant transformer une partie de leur gazon. Elle propose aussi une cartographie de quatre municipalités au Québec afin de montrer le potentiel de transformation. Si vous allez sur notre site, vous pourrez consulter de nombreux articles sur le sujet. Ce n’est que le début.

Alexandre Huet, responsable de la mobilisation à la FDS

Enjeux du gazon

(Photo : Ambre Giovanni / Fondation David Suzuki)

La pelouse traditionnelle offre une surface de jeux sécuritaire, naturelle, fraîche et agréable. De plus, elle permet la stabilisation des sols en pente, notamment ceux qui sont touchés par l’érosion hydrique et éolienne, comme le souligne Maxime Fortin Faubert, Ph. D., Stagiaire postdoctoral – Centre Eau Terre Environnement (ETE) de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et FDS. Sa capacité d’absorption de l’eau de pluie contribue aussi à réduire le ruissellement, les inondations, la dégradation des terrains et la pollution de l’eau.

Toutefois, le gazon consomme de nombreuses ressources. D’une part, son arrosage est conséquent. Il représente près d’un tiers de la consommation résidentielle en eau aux États-Unis. Quant au Canada, 43 % des ménages ayant une pelouse ont déclaré l’arroser, selon les données de Statistiques Canada en 2017.

(Photo : Ambre Giovanni / Fondation David Suzuki)

Associées à des tontes fréquentes, les répercussions sur l’environnement sont alors inévitables. En effet, les espèces végétales nectarifères sont régulièrement coupées avant leur floraison, ce qui à la fois nuit aux pollinisateurs indigènes et aux insectes qui les consomment, et en même temps, favorise l’invasion d’espèces nuisibles. À ce jour, près d’une espèce d’abeilles indigènes sur quatre est menacée en Amérique du Nord!

Pourtant, si seulement 10 % des pelouses résidentielles et des espaces verts publics étaient convertis en végétation naturelle, la conservation des insectes s’en trouverait significativement améliorée. Et ce n’est pas tout! En plus de réduire le bruit, la pollution de l’air, du sol et de l’eau, la réduction de la fréquence de tonte et le remplacement du gazon par des prairies naturelles permettraient également de réaliser des économies.

(Photo : Ambre Giovanni / Fondation David Suzuki)

« Nous encourageons la population et les municipalités à revoir leurs pratiques. En laissant la place aux plantes indigènes et à la biodiversité locale, nous devenons de meilleur.e.s allié.e.s pour les pollinisateurs qui sont en déclin. Notons que plus de 40 % des insectes dans le monde sont en danger à la suite de l’activité humaine ou de la destruction de leurs habitats », ajoute Alexandre Huet.

Afin de rendre compte de l’ampleur des pelouses canadiennes en milieu urbain, Maxime Fortin Faubert a développé une approche cartographique dans le rapport Partage ta pelouse : identifier le potentiel de diversification du territoire par la transformation des pelouses. Dans ce cadre, les villes de Sherbrooke, Laval, Saint-Jérôme et Montréal ont été étudiées. À titre indicatif, pas moins de 19 % du territoire montréalais est couvert de gazon, par exemple.

Maxime Fortin Faubert

À court terme, ces cartographies contribueront à sensibiliser le public aux proportions qu’occupent les pelouses en ville. À plus long terme, il y a un potentiel pour que les municipalités y recourent pour effectuer la planification du territoire et identifier les zones où se trouvent des possibilités d’actions.

Maxime Fortin Faubert

Cartographie des surfaces végétales basses dans la Ville de Sherbrooke, accompagnée de deux extraits en zones agrandis.

Des pelouses aux habitats

Partage ta pelouse aspire à bâtir une communauté, faisant se rencontrer des novices, des jardinier.ère.s, des expert.e.s et des scientifiques. Ce mouvement cherche à modifier les règlementations actuelles, afin de renforcer la place de la nature en milieux urbains et périurbains, que ce soit en bannissant l’usage des tondeuses à gaz ou en favorisant la plantation de plantes indigènes dans les aires publiques, entre autres.

(Photo : Ambre Giovanni / Fondation David Suzuki)

Certaines municipalités ont d’ores et déjà lancé des initiatives, telles que la tonte différenciée, la réduction de l’usage des pesticides, l’augmentation du couvert forestier, la distribution gratuite de semences aux citoyen.ne.s. et l’implantation d’une stratégie sur les pollinisateurs. Le mouvement l’Effet papillon (The Butterflyway Project en anglais) s’inscrit d’ailleurs dans cette voie, puisqu’il soutient la création d’habitats viables pour les pollinisateurs à travers le Canada.

La Ville de Montréal a publié sa stratégie des pollinisateurs en 2022 et cette année, elle distribue gratuitement des milliers de semences d’asclépiades à la population. Ce type d’initiative est nécessaire pour que nous puissions redonner une place à la nature dans nos espaces privés et publics.

Alexandre Huet, responsable de la mobilisation à la FDS

(Photo : Ambre Giovanni / Fondation David Suzuki)

Souhaitez-vous, vous aussi, entretenir votre pelouse de façon durable et la partager? Créer de nouveaux habitats riches et diversifiés, et tisser de nouvelles relations avec la diversité du vivant? L’équipe derrière la campagne Partage ta pelouse vous invite à rejoindre le mouvement et vous soutient!

Afin de vous épauler dans votre démarche et que les actions déployées soient facilitées, une boîte à outils numérique en 10 étapes simples a été conçue. Elle comprend, entre autres, des trucs et astuces pour créer des communautés végétales plus diversifiées, des listes de plantes régionales, des conseils d’entretien et l’accès à des webinaires pour enrichir vos connaissances en horticulture écologique.

À vos râteaux!