Deux événements mondiaux majeurs ont marqué l’agenda des mois de novembre et de décembre 2022 : la Conférence de Charm el-Cheikh sur les changements climatiques (COP27) et la Conférence de Montréal sur la biodiversité (COP15).
Les décisions qui en ressortent sont transformationnelles sur les plans national et international, bien qu’elles aient été soumises à des négociations parfois houleuses et présentent des lacunes.
Une voie vers le changement
D’une part, la COP27 a permis la création d’un fonds spécifique destiné aux pays vulnérables touchés par les pertes et les dommages liés aux catastrophes climatiques, auquel le Canada s’est joint. Rappelons que les 58 pays du Vulnérable Climate Forum ne sont responsables que de 5% des émissions de gaz à effets de serre (GES) mondiales.
Au cours de cette période, le gouvernement fédéral a également présenté sa Stratégie nationale d’adaptation afin de répondre aux effets dévastateurs des changements climatiques à l’échelle du pays. Le respect des droits des Autochtones, la progression de l’équité et de la justice environnementale, ainsi que la réduction des impacts climatiques en constituent les principaux objectifs.
Le gouvernement provincial a quant à lui annoncé la création d’un nouveau programme de mobilisation pour l’action climatique, destiné à financer les initiatives citoyennes en matière de lutte contre les changements climatiques au Québec.
D’autre part, la COP15 a mené à l’accord de Kunming-Montréal, visant à freiner le déclin de la biodiversité. Il s’agit d’un pas en avant majeur puisque la défense de la diversité biologique et des écosystèmes a longtemps été délaissée.
Plusieurs décisions ont été convenues, telles que la protection de 30% des milieux terrestres et marins d’ici 2030, à laquelle les gouvernements fédéral et provincial s’étaient déjà engagés. Le Plan Nature 2030 prévoit notamment de soutenir les initiatives de conservation du Québec.
Des mécanismes d’application doivent cependant être implantés afin de rendre ces accords non contraignants opérationnels dans la période à venir.
L’Accord Canada-Yukon sur la nature vise également à protéger 30 % des terres et des eaux douces du pays d’ici 2030. De plus, le gouvernement fédéral, les Territoires du Nord-Ouest et le gouvernement Déline Got’ine souhaitent créer une aire protégée autour du Grand lac de l’Ours. Réserve de la biosphère de l’UNESCO depuis 2016, il est considéré comme l’un des écosystèmes les plus intacts de la planète.
Par ailleurs, la restauration de 30% des écosystèmes dégradés par l’activité humaine prévue, de même que la réduction de deux tiers des pesticides d’ici 2030. Il a été convenu d’éliminer, de réduire ou de réformer les subventions néfastes pour la biodiversité. On cible une baisse de 500 milliards de dollars de ces subventions d’ici 2030.
La question de la pollution et des plastiques a été soulevée pour la première fois comme un facteur de destruction de l’environnement. L’Université de Montréal a d’ailleurs mis fin à l’usage unique du plastique au cours du mois de janvier 2023.
Tandis que les droits et les savoirs des peuples autochtones, gardiens de 80 % de la biodiversité subsistante sur Terre, ont été mis à l’écart lors de la COP27, comme l’a souligné Indigenous Climate Action, la tendance s’est inversée lors de la COP15.
L’instauration du Cadre mondial de Kunming-Montréal devra ainsi se faire selon « leur consentement libre, préalable et éclairé » et dans le respect de leurs connaissances traditionnelles, de leurs valeurs et de leur vision du monde. Leur demande de voir leurs terres et territoires pleinement reconnus comme une catégorie de zones conservées n’a cependant pas été entièrement intégrée.
Une aide auprès des pays les moins nantis a aussi été convenue. Ainsi, 20 milliards de dollars par an d’ici 2025, puis 30 milliards de dollars d’ici 2030 leur seront octroyés.
Des mécanismes d’application doivent cependant être implantés afin de rendre ces accords non contraignants opérationnels dans la période à venir.
Des lacunes à combler
Aucun progrès n’a été réalisé depuis la COP26 en ce qui concerne la réduction des émissions de GES. La baisse et le maintien du réchauffement global sous le seuil de 1,5 °C sont actuellement hors d’atteinte, comme en témoignent les épisodes dévastateurs de sécheresses, d’incendies et d’inondations à travers le monde. Les engagements actuels des gouvernements nationaux placent la planète sur la voie d’un réchauffement de 2,5°C d’ici la fin du siècle, selon un rapport de l’Organisation des Nations unies. Soulignons cependant que le Canada a renforcé sa réglementation fédérale à l’égard des sources d’émissions de méthane provenant du secteur des hydrocarbures, comme l’a annoncé le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault à la COP27.
Il est indispensable que les GES émis par l’industrie des hydrocarbures soient fortement plafonnés et que l’expansion des infrastructures cesse d’être financée.
En effet, la menace posée par l’exploitation du charbon, du pétrole et du gaz est criante. Aucune mesure n’a été prise au sujet des pratiques des grandes entreprises à l’origine de la destruction de la nature. Leur place est d’ailleurs toujours prépondérante au Canada et le secteur de l’exploitation pétrolière et gazière représentant environ 27 % des émissions totales de GES au pays en 2020.
Il est indispensable que les GES émis par l’industrie des hydrocarbures soient fortement plafonnés et que l’expansion des infrastructures cesse d’être financée. Dans le contexte actuel d’insécurité énergétique et alimentaire, plusieurs pays ont imposé une taxe pour dénoncer l’injustice liée aux profits exceptionnels réalisés par ce secteur d’activité. Le Canada a quant à lui décidé de s’abstenir pour le moment. Pour autant, l’année 2023 laissera-t-elle la place au changement?