La combustion du charbon, du pétrole et du gaz est responsable de 80 pour cent des émissions de dioxyde de carbone depuis la Révolution industrielle. (Photo : Alexander Tsang via Unsplash)

En 1970, pour protéger le monde des pires pulsions autodestructrices dont l’humanité est capable, la plupart des pays ont signé le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. (Seuls l’Inde, Israël, la Corée du Nord, le Pakistan et le Soudan du Sud n’ont pas signé le traité.)

Le monde fait maintenant face à une menace tout aussi grande ou plus grande même que les armes nucléaires : le réchauffement climatique. C’est ce qui a mené aux appels pour un « Traité de non-prolifération des combustibles fossiles. » Récemment, 101 lauréats d’un prix Nobel dans différents domaines comme la paix, la littérature, la médecine, la physique, la chimie et les sciences économiques, et même le dalaï-lama, ont signé une lettre envoyée aux leaders du monde pour appuyer cette proposition.

« Le changement climatique menace des centaines de millions de vies et de moyens de subsistance sur tous les continents et met en danger des milliers d’espèces », écrivent-ils.

La solution est claire : les combustibles fossiles doivent rester dans le sol.

La lettre montre que la combustion du charbon, du pétrole et du gaz est responsable de 80 pour cent des émissions de dioxyde de carbone depuis la Révolution industrielle et que « l’extraction, le raffinage, le transport et la combustion des combustibles fossiles entraînent des coûts économiques importants liés à la pollution ainsi qu’à la dégradation de l’environnement et de la santé, lesquels sont souvent payés par les peuples autochtones et les communautés marginalisées. »

La lettre indique aussi que l’Accord de Paris ne fait aucune mention du pétrole, du gaz et du charbon et que l’industrie des combustibles fossiles continue de progresser grâce au soutien financier des grandes banques. D’ici 2030, la production de ces combustibles augmentera de 120 pour cent par rapport à ce qui est nécessaire pour limiter le réchauffement à 1,5 °C au-dessus du niveau de la période préindustrielle.

Comme l’écrivent les signataires de la lettre, « La solution est claire : les combustibles fossiles doivent rester dans le sol ».

Les signataires réclament la fin de l’expansion de la production de charbon, de pétrole et de gaz par l’élimination progressive de la production actuelle d’une manière « juste et équitable » et l’investissement dans un plan de transformation visant à « garantir un accès à 100 % aux énergies renouvelables dans le monde entier, à aider les économies dépendantes à se détourner des combustibles fossiles, permettant ainsi aux personnes et aux communautés de la planète de s’épanouir grâce à une transition mondiale juste ».

Ce n’est pas la première fois que les grands penseurs s’unissent pour exhorter l’humanité à résoudre les problèmes environnementaux. En 1992, et de nouveau en 2017, d’éminents scientifiques ont émis une « mise en garde à l’humanité ».

La déclaration de 1992, signée par 1 700 scientifiques, dont la plupart étaient lauréats de prix Nobel, nous mettait en garde : « La dégradation massive de la toile de vie, associée aux dommages environnementaux dont sont responsables la déforestation, la disparition d’espèces vivantes et les changements climatiques, pourrait déclencher des réactions indésirables à grande échelle, notamment l’effondrement inattendu des systèmes biologiques essentiels, dont nous ne connaissons que partiellement les interactions et la dynamique ».

Le manifeste était un appel à la mobilisation dans des secteurs comme « l’appauvrissement de la couche d’ozone et de la vie marine, la disponibilité de l’eau douce, les zones mortes des océans, la déforestation, la destruction de la biodiversité, les changements climatiques et la croissance démographique soutenue ».

Quand entendrons-nous raison? Quand cesserons-nous d’écouter ceux qui nous disent depuis des décennies « qu’il est impossible d’abandonner les combustibles fossiles du jour au lendemain », alors qu’ils ne cessent d’accroître la production et ne montrent aucune volonté de prendre le chemin inverse?

Vingt-cinq ans plus tard, plus de 15 000 scientifiques ont publié une deuxième mise en garde, dans laquelle ils nous disent que hormis la stabilisation de la couche d’ozone stratosphérique, l’humanité n’a pas été en mesure de faire suffisamment de progrès pour résoudre les problèmes environnementaux anticipés, et que la plupart de ces problèmes sont maintenant beaucoup plus graves et ont pris des proportions alarmantes. Cette deuxième mise en garde a mis en évidence les menaces croissantes de perturbations climatiques dont sont responsables les combustibles fossiles, la déforestation ainsi que la crise que représente l’extinction massive d’espèces vivantes.

Quand entendrons-nous raison? Quand cesserons-nous d’écouter ceux qui nous disent depuis des décennies « qu’il est impossible d’abandonner les combustibles fossiles du jour au lendemain », alors qu’ils ne cessent d’accroître la production et ne montrent aucune volonté de prendre le chemin inverse? Pourquoi les politiciens nous parlent-ils sans cesse de leurs engagements pour contrer les changements climatiques alors qu’ils achètent des pipelines et autres infrastructures de transport et encouragent l’utilisation des combustibles fossiles ainsi que la production de gaz de fragmentation et de pétrole des sables bitumineux?

Nous parlons d’urgence climatique et d’une crise de la biodiversité, mais nous agissons comme si nous avions tout notre temps pour y remédier.

Ces crises sont interreliées et nous devons mobiliser toutes les ressources disponibles pour y faire face. On nous avait avertis.

La pandémie de COVID-19 a plongé le monde dans une crise qui a eu des répercussions immédiates sur nous tous, mais elle nous a aussi enseigné d’importantes leçons et nous donne l’occasion de changer les choses. Elle nous a montré que nous pouvons trouver rapidement des solutions à des crises si nous sommes solidaires et y mettons le prix. Elle nous a aussi montré que le fait de favoriser l’économie humaine au détriment de la santé des populations et de la planète entraîne des conséquences directes et ne fait que prolonger les crises.

Le monde s’est arrêté pour faire face à une urgence sanitaire critique, mais il est aussi aux prises avec une dégradation de l’environnement. Profitons de l’occasion pour repartir à zéro et reprendre le contrôle de nos vies de manière à éviter l’émergence de pandémies qui pourraient s’avérer encore plus destructrices, faire en sorte que la planète puisse rester un environnement propice à la création d’une vie saine et éviter que se poursuive l’extinction massive de certaines espèces.

Ces crises sont interreliées et nous devons mobiliser toutes les ressources disponibles pour y faire face. On nous avait avertis.