L'argument que le monde aura besoin de combustibles fossiles dans les années à venir et qu'il est donc préférable de soutenir nos propres industries ne tenait pas la route, même il y a 34 ans, lorsque le GIEC a été créé - et le développement et l'utilisation des combustibles fossiles se sont accélérés depuis.

Il est vraiment tragique que certaines personnes soient prêtes à infliger des souffrances inimaginables ou la mort au nom du pouvoir et de la richesse. Qu’il s’agisse de l’agression de l’Ukraine par la Russie ou de l’exploitation croissante des combustibles fossiles qui modifient le climat, les gains égoïstes sont plus importants pour certains que la santé et le bien-être de nos enfants, de nos petits-enfants et de ceux qui ne sont pas encore nés.

Citons, par exemple, les décennies d’efforts pour minimiser et nier les preuves des perturbations climatiques causées par l’homme — efforts qui se sont accélérés au cours des derniers jours, alors que le secteur des combustibles fossiles et ses alliés politiques et médiatiques utilisent cyniquement la crise entre la Russie et l’Ukraine pour plaider en faveur d’un développement et d’une expansion accrus des produits et des infrastructures qu’ils vantent.

Le premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney, a publié ceci sur Twitter : « Pour permettre la réelle neutralisation de Poutine, le Canada doit construire des pipelines. » Ce qu’iI omet de mentionner, c’est que les canalisations sont en grande partie fabriquées par une entreprise détenue à 60 % par des oligarques russes — dont l’un a des liens étroits avec Poutine — et que l’Alberta Investment Management Corporation possède un demi-million d’actions dans un fonds d’investissement russe dont les principaux avoirs se trouvent dans les sociétés russes de combustibles fossiles Gazprom, Sberbank et Lukoil.

Le premier ministre Kenney a cependant interrompu les ventes d’alcool russe (principalement de vodka de la marque Russian Standard, qui n’est pas vraiment populaire en Alberta).

Le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), intitulé Climate Change 2022: Impacts, Adaptation and Vulnerability, explique les dangers de la tromperie…

Le secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, avait un point de vue plus rationnel, publiant sur Twitter : « Comme le montrent clairement les événements actuels, notre dépendance à l’égard des combustibles fossiles rend l’économie mondiale et notre sécurité énergétique vulnérables aux crises géopolitiques. Au lieu de ralentir la décarbonisation, il est temps d’accélérer la transition vers un avenir fondé sur les énergies renouvelables. »

Le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), intitulé Climate Change 2022: Impacts, Adaptation and Vulnerability, explique les dangers de la tromperie : « La rhétorique et la désinformation sur les changements climatiques et les efforts visant à saper la science ont contribué à une perception erronée du consensus scientifique, à l’incertitude, au mépris du risque et de l’urgence, et à la dissension. »

Le rapport ajoute que « la forte affiliation politique et la polarisation des opinions partisanes contribuent à retarder la mise en place de mesures d’atténuation et d’adaptation, surtout aux États-Unis, mais également au Canada dans une certaine mesure », et que « des intérêts économiques et politiques particuliers ont organisé et financé la désinformation et la communication contre-productive sur les changements climatiques. »

« Des intérêts économiques et politiques particuliers ont organisé et financé la désinformation et la communication contre-productive sur les changements climatiques. »

Il serait exagéré de dire que tous ceux qui nient ou minimisent la climatologie sont indifférents à la question du climat ou, pire encore, sociopathes. En revanche, force est de constater que ceux qui ont le pouvoir exploitent souvent les personnes peu instruites et mal informées pour servir leurs propres intérêts et, dans bien des cas, s’emploient à dégrader les systèmes éducatifs afin d’empêcher les gens d’acquérir une pensée critique et logique.

Il y a 34 ans, lorsque le GIEC a été créé, l’excuse selon laquelle le monde aurait besoin de combustibles fossiles pendant les années à venir et qu’il était donc préférable de soutenir nos propres industries était déjà peu crédible. Depuis, le développement et l’utilisation des combustibles fossiles se sont accélérés. Le fait de ne pas tenir compte des preuves a embourbé l’humanité dans une situation d’urgence climatique.

Ceux qui sont conscients de la situation n’ont aucune excuse. Il y a 45 ans, les scientifiques du secteur des combustibles fossiles ont mis avec justesse le monde en garde contre les conséquences climatiques de la combustion à grande échelle de combustibles fossiles. La plupart des auteurs d’articles d’opinion qui sèment le doute, la confusion et la désinformation au sujet du dérèglement climatique ne peuvent rejeter catégoriquement toutes les preuves qui s’accumulent — y compris ce que les gens vivent manifestement partout.

En revanche, force est de constater que ceux qui ont le pouvoir exploitent souvent les personnes peu instruites et mal informées pour servir leurs propres intérêts et, dans bien des cas, s’emploient à dégrader les systèmes éducatifs afin d’empêcher les gens d’acquérir une pensée critique et logique.

Alors, pourquoi s’opposent-ils si farouchement à ce qui est clairement nécessaire, sachant notamment que de nombreuses mesures qui visent à adopter des énergies plus propres, à réduire la consommation et à protéger les puits de carbone comme les forêts, les terres humides, les forêts de varech et plus encore mèneront aussi à une réduction de la pollution, à une amélioration de la santé publique et à l’obtention de résultats économiques meilleurs et plus équitables?

Cela peut être en partie dû à la peur — la peur du changement, la peur de la perte de pouvoir et de richesse illusoires, ou la peur d’adopter un nouveau mode de pensée. Pour les riches lobbyistes des combustibles fossiles, cette peur est en grande partie attribuable à leur égoïsme — prendre ce qu’on peut pendant qu’on le peut — en supposant que les conséquences négatives ne les toucheront pas, soit parce que leur richesse et leur pouvoir les isoleront, soit parce que les répercussions ne se feront sentir qu’après leur départ. Leur égo entre également en jeu. Certains pensent que si Poutine se livre à de telles destructions, c’est parce qu’il veut cimenter son héritage imaginaire de grand dirigeant qui a contribué à redonner à un empire en déroute sa gloire antérieure.

Il est profondément triste que nous soyons dirigés par tant de personnes manquant d’ouverture d’esprit et de vision sur le long terme. Il est triste que des enfants doivent descendre dans les rues pour revendiquer des conditions de survie, chose fondamentale. Il est triste que des jeunes soient sacrifiés — envoyés pour tuer et être tués pour protéger les intérêts des milliardaires.

Il est temps d’opérer un changement radical.

MISE À JOUR : En réponse à l’invasion de l’Ukraine, Alberta Investment Management Corporation a pris la décision le 1er mars 2022 de se départir de ses avoirs russes.