De nombreuses personnes en faveur d’actions climatiques vigoureuses ne savent tout simplement pas qu’elles font partie d’une grande majorité. (Photo : Alexandre St-Amant / Fondation David Suzuki)

La majorité de la population mondiale est favorable à l’adoption de mesures pour lutter contre les changements climatiques. Elle serait même prête à payer un impôt pour y contribuer. Cependant, cette réalité semble être passée sous silence par les grands médias et les responsables politiques.

Selon un sondage publié par la revue Nature Climate Change en 2024 et mené auprès de 130 000 personnes dans 125 pays, 89 % des répondant.e.s ont déclaré souhaiter une « intensification de l’action politique » en matière de changements climatiques (source en anglais). De plus, 74 % d’entre elle et eux accepteraient de contribuer à cette cause en versant un petit pourcentage de leurs revenus. D’après cette enquête, les nations concernées sont responsables de 96 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, de 96 % du PIB et représentent 92 % de la population de la planète.

Toutefois, plusieurs politicien.ne.s, qui prétendent comprendre la crise climatique et la prendre au sérieux, continuent tout de même de promouvoir l’exploitation des combustibles fossiles, y compris les pipelines et la fracturation hydraulique.

Parfois, le problème vient du fait qu’elles croient à tort que le soutien du public est faible, voire inexistant.

C’est généralement parce que ces personnes sont redevables à l’industrie des énergies fossiles, soit en raison de généreux dons versés à leur campagne, de lobbyisme, de promesses de sièges confortables dans les conseils d’administration après leur départ de la scène politique, ou encore, car elles possèdent des intérêts dans cette industrie. Parfois, le problème vient du fait qu’elles croient à tort que le soutien du public est faible, voire inexistant. Selon les auteur.trice.s de l’enquête, cet « écart de perception » entrave la mise en place de politiques climatiques nécessaires.

Il est important de souligner que, lors des dernières élections fédérales, le Parti libéral a choisi d’abandonner une politique efficace et populaire visant la réduction des gaz à effet de serre : la taxe carbone.

Comme les médias grand public sont détenus ou contrôlés (en anglais) en grande partie par des personnes alliées des industries du pétrole, du gaz et du charbon ou qui sympathisent avec elles, la véritable histoire est ignorée. Par conséquent, de nombreuses personnes favorables à des mesures fortes pour combattre les changements climatiques ne savent tout simplement pas qu’elles font partie d’une grande majorité.

Selon The Guardian, même à l’Assemblée des Nations unies pour l’environnement – 191 délégué.e.s provenant de 53 pays, dont plusieurs responsables des négociations politiques, ont considérablement sous-estimé le soutien populaire envers les politiques climatiques (source en anglais). D’après leurs estimations, en moyenne 37 % de la population accepterait de consacrer 1 % de ses revenus à la lutte contre les changements climatiques. Le vrai chiffre est plutôt de 69 %, et 5 % de plus sont en faveur d’une contribution moins importante.

Au-delà des avantages économiques, il est essentiel d’adopter des mesures climatiques rigoureuses pour assurer notre santé et notre bien-être.

Comme le souligne l’étude, « dans les démocraties, la mise en œuvre de politiques climatiques efficaces dépend de l’appui de la population. Même les dirigeant.e.s de sociétés non démocratiques restent alertes aux réclamations politiques majeures. »

Stefania Innocenti, coautrice de l’enquête et membre de la Smith School of Enterprise and the Environment de l’Université d’Oxford, estime que ce décalage amène les dirigeant.e.s politiques à édulcorer leurs propositions. « Les responsables politiques opteront pour la prudence s’iels doutent du soutien populaire », ajoute-t-elle.

D’après l’auteur principal de l’étude, Ximeng Fang, de la Saïd Business School de l’Université d’Oxford, « la carboneutralité est non seulement réalisable, mais aussi économiquement responsable. »

Au-delà des avantages économiques, il est essentiel d’adopter des mesures climatiques rigoureuses pour assurer notre santé et notre bien-être. Nous avons déjà perdu trop de temps à débattre de la nécessité de ces politiques.

Les conséquences de l’utilisation des combustibles fossiles ainsi que de la dégradation et de la destruction des puits de carbone, tels que les forêts et les milieux humides, sont évidentes et nombreuses (source en anglais). Une planète en surchauffe dérègle le climat de manière plus imprévisible, multipliant les sécheresses et les inondations, faisant augmenter le niveau de la mer, entraînant ainsi une hausse des coûts en santé, des conflits et des mouvements migratoires.

Leur stratégie vise manifestement à persuader l’opinion publique du manque de soutien envers les mesures climatiques. Pourtant, ce soutien existe.

Les études scientifiques révèlent désormais qu’un des piliers du système climatique de la Terre, à savoir la circulation méridienne de retournement atlantique, pourrait s’écrouler si nous ne maîtrisons pas nos émissions de gaz à effet de serre. Selon des analyses récentes, nous atteindrons le point de basculement dans les prochaines décennies. L’effondrement devrait, quant à lui, se produire 50 à 100 ans plus tard.

« La ceinture de pluies tropicales serait perturbée, alors que des millions de personnes en dépendent pour cultiver leurs aliments. L’Europe occidentale connaîtrait, en ce qui la concerne, des hivers extrêmement froids, des étés de sécheresse, et une élévation du niveau de la mer de 50 centimètres », rapporte The Guardian (en anglais).

Rien ne justifie qu’on laisse cela se produire. Nous sommes conscient.e.s des problèmes et de leurs solutions. Ces dernières présenteraient de nombreux avantages économiques et réduiraient la pollution et ses effets sur la santé, en plus de diminuer l’écart de richesse et de créer une plus grande équité mondiale si elles sont correctement mises en œuvre.

Tout ce qui nous empêche d’avancer, c’est l’industrie des combustibles fossiles et ses partisan.e.s, y compris les médias et les politicien.ne.s complices ainsi que les personnes aisées qui considèrent le changement systémique comme une menace pour leur richesse inouïe. Leur stratégie vise manifestement à persuader l’opinion publique du manque de soutien envers les mesures climatiques. Pourtant, ce soutien existe.

Le véritable pouvoir réside entre les mains du peuple. Nous n’avons plus qu’à nous unir pour l’exercer.