La Fondation David Suzuki a pris part à une promenade arboricole autour du thème de la justice environnementale, organisée par Cœur d’épinette et Ami.e.s des parcs, le 27 juin dernier. S’en est suivie une discussion avec Sabaa Khan et Shi Tao Zhang, respectivement codirectrice et une des auteur.rice.s du livre collectif La nature de l’injustice, Racisme et inégalités environnementales.
Menée par l’horticultrice et arboricultrice Paule Mackrous de Cœur d’épinette, cette balade arboricole a d’abord permis au public de se familiariser avec l’histoire du parc Jarry à Montréal et de son déboisement, ainsi que les différents rapports que la population entretient avec ce lieu. Par exemple, alors que certain.e.s aimeraient y voir plus de verdure, d’autres préféreraient davantage de terrains sportifs.
C’est important de nommer les significations que les personnes ont d’un lieu et de tenir compte de l’ensemble des opinions, afin de trouver des solutions qui soient justes.
Paule Mackrous
De la même façon, la question de l’accessibilité aux espaces verts devrait être centrale, qu’elle soit financière ou en termes de mobilité et de capacités. Par exemple, l’expérience et les besoins d’une personne handicappée sont différents de ceux d’une personne qui ne l’est pas.
En outre, la répartition inéquitable des espaces verts en contexte urbain a été soulignée, notamment la différence entre l’indice de canopée de Parc-Extension (Ouest) et Villeray (Est). Pourtant, les bénéfices découlant des aménagements verts ont été prouvés. Ce point est également soulevé dans le chapitre coécrit par Shi Tao Zhang dans l’ouvrage La nature de l’injustice, Racisme et inégalités environnementales.
En effet, l’autrice pointe que l’existence d’îlots de chaleur dans les quartiers chinois au Canada résulte de leur rasage au profit de la construction d’autoroutes, de boulevards et de bâtiments administratifs. Cet exemple, tout comme d’autres qui sont abordés dans le livre, dépeint l’existence d’injustices environnementales criantes.
Par ailleurs, à travers la présentation de plusieurs espèces arboricoles, Paule Mackrous a abordé l’écologie queer, qui vise à contrecarrer le modèle hétéronormatif et binaire dominant de notre rapport à la nature et à l’écologie. Ainsi, l’épinette du Colorado est un arbre monoïque. Ce conifère a donc des organes mâles et femelles distincts, respectivement les cocottes qui se situent en bas de l’arbre et celles qui se trouvent en haut.
De son côté, le peuplier faux-tremble nécessite d’être mature pour révéler sa sexualité. Il s’agit d’une espèce dioïque, dont 20 % des fleurs sont hermaphrodites et qui se reproduit par le biais de son système racinaire. D’ailleurs, c’est en Utah aux États-Unis que la plus vaste colonie clonale de peupliers faux-trembles existe. Elle est surnommée « the Trembling Giant » (le géant tremblant) et est composée de 47 000 arbres génétiquement identiques, partageant le même réseau racinaire.
L’érable de Norvège, quant à lui, est une espèce qui peut être monoïque ou dioïque. Dans le premier cas, les fleurs mâles mûrissent alors avant les fleurs femelles.
L’horticultrice et arboricultrice de Cœur d’épinette a poursuivi la promenade arboricole en faisant référence aux mouvements écoféministes, qui établissent un lien entre les systèmes d’oppression de la nature et de la femme. Le mouvement de femmes Indiennes dénommé Chipko est un exemple parlant à cet égard : sa première action en 1973 consistait à ce que les villageoises du village de Mandal dans la vallée de l’Alakananda encerclent les arbres afin d’empêcher qu’ils soient coupés. Par la suite, Vandana Shiva a poursuivi ce combat, au nom de la survie des femmes et de l’ensemble du vivant.
Enfin, la discussion avec Sabaa Khan et Shi Tao Zhang a conclu la promenade arboricole autour du thème de la justice environnementale et de l’approche intersectionnelle des enjeux environnementaux. Rappelons-nous d’une chose : il est impératif de transformer nos rapports à la nature et au monde, en abolissant chacun des systèmes d’oppression.