Les ambassadeurs et ambassadrices de la forêt lors de leur visite à Haida Gwaii au mois de juillet 2024 (Photo : Samuel Rainville)

Imaginez vivre sur une île où chaque arbre, chaque rivière, chaque caillou, chaque courant d’air fait partie de votre histoire, de votre identité, de votre culture. Haida Gwaii n’est pas qu’une île en Colombie-Britannique; c’est une âme vivante, gardée et protégée par la Nation Haïda depuis les temps immémoriaux. S’y rendre, c’est entrer dans un lieu sacré, où la culture et le territoire sont indissociables.

En tant que jeune autochtone, l’expérience a été transformatrice. Ce qui m’a le plus profondément touché, c’est l’accueil chaleureux des Haïdas. Les récits sur les mythes fondateurs de la Nation racontés par une aînée Haïda résonnent encore en moi. Entendre le Chef de la communauté de Skidegate et les témoignages de femmes leaders de la Nation parler de la lutte pour protéger leur territoire m’a fait réfléchir sur ce que signifie réellement habiter une île.

Haida Gwaii a une superficie d’environ 10 000 km². C’est environ 13 fois la taille de l’île de Montréal ou presque la même taille que l’île d’Anticosti. Pour les Haïdas, l’île n’est pas seulement leur territoire, c’est une responsabilité. Vivre sur une île c’est maintenir un sentiment d’appartenance intime avec ce qui t’entoure. Vivre sur une île c’est faire partie de l’île.

Pour les Haïdas, l’île n’est pas seulement leur territoire, c’est une responsabilité. Vivre sur une île c’est maintenir un sentiment d’appartenance intime avec ce qui t’entoure. Vivre sur une île c’est faire partie de l’île.

Le combat de la Nation Haïda contre la déforestation et la destruction de leur environnement prend aussi une dimension particulièrement tangible. Lorsque chaque arbre coupé, chaque rivière polluée a un impact direct, immédiat et visible sur le quotidien sur l’île, la responsabilité de la préserver devient un mode de vie.

Aujourd’hui, la gouvernance de la Nation Haïda sur leur territoire traditionnel, qui n’a jamais cessé d’être légitime, est enfin légalement reconnue. Depuis 2024, un accord historique reconnaît officiellement le titre de propriété de la Nation Haïda sur l’ensemble de Haida Gwaii, marquant ainsi la première fois qu’un gouvernement non autochtone reconnaît un titre autochtone. Cette reconnaissance leur donne enfin le plein pouvoir d’agir pour honorer leur responsabilité envers leur territoire et de protéger leur île pour les générations futures. Cette victoire inspirante n’est que le début d’un mouvement plus grand dans l’affirmation du droit à l’autodétermination des Nations autochtones.

Cette victoire inspirante n’est que le début d’un mouvement plus grand dans l’affirmation du droit à l’autodétermination des Nations autochtones.

Je me demande : si nous imaginions tous et toutes vivre sur une île comme Haida Gwaii, serions-nous plus rapides à agir pour protéger notre environnement? Sur une île, l’équilibre de l’écosystème est palpable; les conséquences de nos actions sont visibles en temps réel. Peut-être qu’en adoptant cette mentalité, nous serions plus enclins à prendre soin de notre planète.

Eh bien, la réalité c’est que nous vivons tous.tes sur une île. La nôtre est simplement beaucoup plus grande. Notre responsabilité vis-à-vis notre île est la même. Depuis les temps immémoriaux, cette responsabilité est au cœur de plusieurs sociétés autochtones. Gouvernance territoriale autochtone et protection du territoire sont deux notions indissociables. J’ai quitté Haida Gwaii avec un sentiment de gratitude, mais aussi avec cette réflexion : que pouvons-nous apprendre, en tant que société, d’une culture si intimement liée à la protection de son territoire?