Mobilisation collective : lutte à Rouyn-Noranda

Marche à Rouyn-Noranda le 26 août

Marche à Rouyn-Noranda le 26 août (Photo : Williams Nourry)

Plus de 900 personnes se sont rassemblées à Rouyn-Noranda le samedi 26 août 2023. Elles revendiquaient le droit universel à un environnement sain et le respect des normes sur les contaminants, à travers une marche collective, des prises de paroles et un campement d’auto-défense.

La mobilisation a été co-organisée par les Mères au front de Rouyn-Noranda, le Comité ARET, l’Association de défense des droits des citoyens contre l’intoxication à Rouyn-Noranda, RN Rebelle et le Petit théâtre du Vieux-Noranda. Elle a également été soutenue par les Mères au front (national), le Réseau Demain le Québec, Réalité climatique Canada, Lle HUB de mobilisation pour la justice climatique, Mobilisation 6600 et L’écothèque.

Les volontés des organisateur.rice.s et leur allié.e.s? Émettre un appel national et faire front commun au Québec, mais aussi créer un effet d’occupation du quartier en montrant que la population se défend face à l’inaction gouvernementale, comme le souligne une bénévole des Mères au front de Rouyn-Noranda, Jennifer Ricard-Turcotte.

Mobilisation à Rouyn-Noranda le 26 août

Mobilisation à Rouyn-Noranda le 26 août (Photo : Williams Nourry)

Cela fait maintenant 5 ans que les citoyen.ne.s s’affairent bénévolement à produire du contenu, à faire des demandes d’accès à l’information, à rédiger des pétitions, ainsi qu’à organiser des marches, des spectacles, des assemblées et des présentations auprès des conseils municipaux.

Normes sur les contaminants

À la suite du plan de réduction des émissions atmosphériques de la fonderie Horne proposé par le gouvernement fédéral à l’automne 2022, des consultations publiques se sont tenues à Rouyn-Noranda. Bien que la majorité des répondant.e.s s’est prononcée contre, l’entreprise Glencore, qui détient la fonderie, peut pourtant continuer à polluer l’air et le sol de la ville.

En effet, l’autorisation ministérielle annoncée le 16 mars dernier mentionnait que la fonderie devra atteindre une concentration moyenne de 15 ng/m³ d’arsenic d’ici 2027, tandis que la norme québécoise est établie à 3 ng/m³.

On ne se sent pas protégé.e.s, nos enfants ne sont pas protégé.e.s et nos parents n’ont pas été protégé.e.s. La limite à 15 ng/m³ n’est pas suffisante et ne sera atteinte que dans 5 ans. En ce moment, c’est 65 ng/m³ d’arsenic que l’on reçoit en moyenne sur notre tête. C’est immense!

soutient une autre bénévole des Mères au front de Rouyn-Noranda, Isabelle Fortin-Rondeau.

Marche à Rouyn-Noranda le 26 août

Marche à Rouyn-Noranda le 26 août (Photo : Williams Nourry)

Puisqu’il s’agit d’une moyenne annuelle, cela signifie aussi que les habitant.e.s de la ville peuvent être exposé.e.s à 3 ng/m³ durant une journée et à 1000 ng/m³ le lendemain. Les Mères au front et leurs partisan.e.s demandent ainsi la révocation immédiate de ce droit à polluer.

De plus, le résultat des modélisations sur le risque cancérigène qui ont été effectuées par le gouvernement Legault sur la période de 2023 à 2093 s’avèrent être biaisées. En effet, Jennifer Ricard-Turcotte souligne que les habitant.e.s de Rouyn-Noranda ne sont pas seulement des nouveaux-né.e.s ou des personnes qui projettent de s’y établir, mais cumulent aussi un lourd passé d’exposition.

« Lorsque le gouvernement commence son calcul en 2023 et affirme que ce qui en résulte est sécuritaire, c’est une belle réinitialisation pour l’avenir… Sauf qu’il abandonne la population qui est vivante actuellement, » commente-t-elle.

Zone tampon

Le gouvernement a annoncé la création d’une zone tampon entre la fonderie Horne et le restant de la ville. Pour ce faire, Glencore acquerra le terrain qui est situé au pied de l’usine, sur lequel des habitations se trouvent actuellement. Les particulier.ère.s qui y vivent seront donc contraint.e.s d’être déplacé.e.s.

Cette décision s’inscrit dans un contexte de pénurie de logements et de terrains au Québec. En outre, la fonderie utilise depuis 100 ans tous les milieux hydriques de la ville pour en faire des parcs destinés aux résidus miniers. Dès lors qu’une nouvelle construction est à prévoir, l’enjeu de la contamination des sols est donc présent.

Jennifer Ricard-Turcotte explique que plus de la moitié des terrains situés sur le périmètre urbain est touchée au-delà des valeurs limites par les contaminants les plus préoccupants, tels que l’arsenic, le plomb et le cadmium, selon les normes les plus sévères qui sont en vigueur au Canada.

On est plus fragiles et à risques que les personnes qui ne sont pas confrontées à cette exposition. On a de l’arsenic dans notre corps, dans nos os et dans nos cellules,

appuie Isabelle Fortin-Rondeau.

Dès lors, les Mères au front de Rouyn-Noranda et leurs allié.e.s demandent le droit universel de respirer un air sain, le respect des normes québécoises sur les contaminants d’ici cinq ans et l’atteinte d’une concentration moyenne de 15 ng/m³ d’arsenic dès la première année de l’autorisation ministérielle, la réparation pour les dommages qui ont été causés à l’environnement, ainsi que la décontamination des terrains de la ville. À ce jour, il est prévu que la fonderie Horne en décontamine 53 qui sont situés dans le quartier Notre-Dame.

Mobilisation à Rouyn-Noranda le 26 août

Mobilisation à Rouyn-Noranda le 26 août (Photo : Williams Nourry)

Enjeux économiques

Un clivage existe toutefois au sein de la société à Rouyn-Noranda, qui s’explique entre autres par le passé industriel de la ville, mais aussi par la main mise que la fonderie a sur l’économie via les commandites qu’elle verse aux milieux communautaire, scolaire, universitaire et culturel.

« On est dans une véritable culture du silence et de l’aliénation à cette industrie. […] Depuis 100 ans, la fonderie menace de fermer ses portes et cette peur est coulée dans les veines des gens. Ça a longtemps été une ville monoindustrielle, donc c’est très difficile de mobiliser la population, » précise Isabelle Fortin-Rondeau.

Les deux militantes de Mères au front de Rouyn-Noranda complètent que le mouvement ne s’oppose aucunement aux travailleur.euse.s.

Personne ne devrait à choisir entre protéger son emploi ou protéger la santé de sa famille. C’est au gouvernement d’assumer sa responsabilité de protéger la population,

conclut Jennifer Ricard-Turcotte.

Des luttes similaires existent ailleurs au Québec, comme dans le quartier Mercier-Hochelaga-Maisonneuve à Montréal. Plus de détails suivront dans un prochain blogue…

Vous pouvez vous en apprendre davantage et passer à l’action dès maintenant!