Le Réseau Demain le Québec devient une entité indépendante

(Photo : Mathieu B Morin)

Le Réseau Demain le Québec est un grand projet collectif rassemblant plus de 160 groupes locaux à travers la province, qui souhaitent faire changer les choses. Ce sont des bénévoles militant.e.s, passionné.e.s, engagé.e.s qui s’unissent et prennent part au changement dans la transition socioécologique.

Créé il y a presque 5 ans avec l’aide de la Fondation David Suzuki, le RDQ prend son envol et devient une organisation à part entière. Cap sur les débuts du Réseau, de 2018 jusqu’à aujourd’hui!

Discussion intimiste et chaleureuse au parc Laurier, en compagnie de Chloé Tremblay Cloutier, coordonnatrice du Réseau Demain le Québec et Dalie Lauzon-Vallières, chargée de projet en mobilisation citoyenne.

Photo : Laurence Bolduc / Fondation David Suzuki

D'où est venue l’idée de créer le Réseau Demain le Québec?

En 2018, dû à l’intensification des crises climatiques et sociales, la Fondation David Suzuki choisit de réorienter une part importante de son énergie et de ses ressources pour soutenir les mobilisations citoyennes. Elle reconnaît alors la force des mouvements « grassroots » qui émergent un peu partout au Québec, portés par des personnes engagées dans la lutte pour le changement.

Cette prise de conscience coïncide avec la montée des grandes mobilisations, comme les grèves étudiantes pour le climat de 2019, qui témoignent de la puissance de l’organisation populaire. Inspirée par cet élan, la Fondation cherche à accompagner ces groupes en créant un réseau de soutien adapté à leurs besoins.

Dans cette optique, elle s’inspire du documentaire français Demain, réalisé par Cyril Dion et Mélanie Laurent, pour concevoir une version québécoise sous forme de livre : Demain le Québec. Cet ouvrage recense les initiatives citoyennes à travers la province et met en lumière la richesse et la diversité des projets porteurs de solutions.

Deux ans plus tard, le Réseau Demain le Québec voit le jour grâce à un projet pilote qui vise à déterminer les besoins d’une quinzaine de groupes.

Rapidement, plusieurs autres regroupements se rallient au réseau, provenant de divers horizons, simplement par le bouche-à-oreille ou par l’entremise de la Fondation David Suzuki.

Quels sont les avantages d’avoir créé un réseau qui unit les différents groupes?

Le réseau permet aux groupes d’avoir accès à des ressources et des outils qui autrement, seraient dispendieux ou complexes à trouver.

C’est le cas notamment d’un partenariat avec le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) qui permet aux groupes d’avoir accès gratuitement à de l’information juridique, utile pour la protection de milieux naturels par exemple.

Un sentiment fort ressort quand on parle des avantages du réseau, celui de se sentir valider dans cet univers des groupes citoyens. Pour certain.e, ce milieu peut paraitre marginal ou complexe à comprendre puisque ce n’est pas tout le monde qui décide d’être bénévole en plus de leurs obligations quotidiennes. C’est également une grande source d’inspiration et de motivation, pour découvrir l’ensemble des projets existants pour ainsi répliquer le modèle à son échelle, que ce soit dans son quartier ou sa municipalité.

Photo : Mathieu B Morin

« Quand j’ai pris part au RDQ et que j’ai fait ma première visite sur le terrain avec les groupes, je me suis dit : wow, c’est exactement ce soutien qu’on aurait voulu avoir pour notre regroupement militant étudiant. Et aujourd’hui, c’est devenu une réalité. C’est ce qui manquait dans le mouvement de la mobilisation terrain! » témoigne Dalie Lauzon-Vallières, chargée de projet en mobilisation citoyenne.

Le réseau permet de décharger les groupes bénévoles, de leur offrir un soutien et de valoriser les liens entre les différents acteurs et actrices du milieu. Il crée un mouvement de solidarité partout à travers la province.

Le réseau peut agir comme catalyseur pour éviter qu’on lutte chacun.e dans notre coin!

Chloé Tremblay Cloutier, coordonnatrice du Réseau Demain le Québec

Pouvez-vous nous raconter des histoires inspirantes du Réseau Demain le Québec?

Le bus voyageur des militant.e.s de la Fonderie Van Horne, Rouyn-Noranda

(Photo : Marie-Andrée Foucreault-Therrien)

À l’été 2023, plusieurs groupes du RDQ sont venus des quatre coins de la province pour prêter main-forte aux habitant.e.s de Rouyn-Noranda, victimes de la polluante Fonderie Horne qui provoque des risques pour la santé dû à la forte concentration d’arsenic dans l’air.

Ce contingent s’est rendu possible grâce à la mise en contact des différents groupes lors d’un événement organisé par le RDQ, appelé « le premier grand rassemblement ».

Pendant cette journée, des porte-paroles des groupes luttant contre la Fonderie Horne sont venu.e.s témoigner de leur vécu et ont grandement touché l’ensemble des groupes. C’est pourquoi quelques mois plus tard, plusieurs d’entre eux se sont mobilisés afin d’aller aider leurs allié.e.s à Rouyn-Noranda. Le chansonnier parolier militant Émile Bilodeau a également participé à cette mobilisation en se rendant avec les groupes pour manifester.

Lettre ouverte pour la protection des milieux naturels

Bon nombre des groupes citoyens luttent à la protection des milieux naturels, mais les enjeux sont bien différents d’une région à l’autre. C’est pourquoi les membres du RDQ ont créé une communauté de pratique afin de trouver des solutions communes à des problèmes communs, partout à travers le Québec.

En 2024, plusieurs se sont mis ensemble afin de publier une lettre ouverte pour démontrer que cet enjeu ne mobilise pas seulement quelques personnes, mais des centaines de gens et de collectifs partout au Québec.

Finalement, la lettre publiée a collecté plus de 350 signatures provenant de divers milieux : groupes citoyens, expert.e.s, organisations, prouvant que l’enjeu est crucial, pour plus qu’une poignée de gens.

Pourquoi la mobilisation citoyenne est-elle si importante aujourd’hui?

La mobilisation citoyenne renforce la démocratie en permettant aux gens de s’impliquer concrètement dans les décisions qui les concernent. Elle agit comme un contre-pouvoir face aux institutions et aux grandes entreprises, tout en répondant, avec agilité, aux urgences sociales et climatiques. Elle défend les droits, crée du lien, fait naître la solidarité, et accélère les changements dont notre société a grandement besoin.

C’est cette énergie collective que le Réseau Demain le Québec choisit de soutenir, partout où elle émerge.

La mobilisation citoyenne renforce la démocratie en permettant aux gens de s’impliquer concrètement dans les décisions qui les concernent.

Quelles sont les prochaines aspirations du Réseau Demain le Québec?

En devenant une entité indépendante, une multitude d’opportunités s’offrent au RDQ. Après cinq ans d’existence, celui-ci a réussi à stabiliser ses ressources ainsi que son offre de service et maintenant, le Réseau souhaite aller encore plus loin en élargissant la vocation des groupes, c’est-à-dire en faisant naturellement converger les luttes environnementales avec celles à vocation sociales afin de se solidariser et se diversifier.

L’équipe du RDQ souhaite également avoir un engagement politique plus assumé afin d’avoir plus de flexibilité pour soutenir les positions des groupes citoyens et les faire rayonner davantage sur la scène médiatique. Leur plus grand souhait est que les luttes citoyennes soient plus connues du grand public.

« Les mouvements citoyens sont assez méconnus, alors c’est une belle porte ouverte pour faire la promotion de la mobilisation citoyenne à plus grande échelle » partage Chloé Tremblay Cloutier, coordonnatrice du Réseau Demain le Québec.

Finalement, le RDQ souhaite accorder une attention particulière sur la décolonisation, l’inclusivité et les pratiques anti-oppressives de l’organisation.

Quelle métaphore ou image évoque pour vous l’esprit du Réseau Demain le Québec?

Après mûre réflexion, en imaginant un arbre, ses racines ou même une constellation, Chloé et Dalie ont fini par s’entendre sur un mot :

La pomme grenade.

« C’est une pomme grenade, parce qu’au final, les petites graines rouges qu’on mange, on prend le temps d’aller les chercher pour les déguster. Pour déguster une pomme grenade, ça prend du temps. Il faut aller à la rencontre de chaque petit morceau. On le défait, on l’ajoute à nos salades de fruits, à nos desserts. Si on en mange juste une, il manque quelque chose. Tandis que manger la totalité dans un bol après l’avoir défait, c’est exceptionnel. Nous, on va faire ce travail : aller chercher tous les groupes et mettre ça dans une bonne salade de fruits, bien vitaminée. Et si tu mets de la pomme grenade dans n’importe quel repas, ça ajoute quelque chose d’incroyable. Les groupes sont comme des antioxydants contre le capitalisme! » dit Dalie Lauzon-Vallières, chargée de projet en mobilisation citoyenne.