Notre planète natale fonctionne comme un organisme minutieusement interconnecté, avec des réseaux et des processus, du plus petit au plus grand, qui s’unissent pour créer des conditions favorables à la vie humaine. Lorsque les systèmes, depuis les cycles du carbone, de l’azote et de l’hydrologie jusqu’aux courants océaniques et aux courants-jets atmosphériques, sont relativement stables, le climat et ses effets restent stables.
Nous avons perturbé le cycle du carbone, principalement en brûlant trop de combustibles fossiles sur une courte période – des quantités gigantesques de dioxyde de carbone, qui avaient été accumulées durant des milliers d’années, ont été libérées dans l’atmosphère. Du fait que tous les systèmes de la Terre sont interconnectés, l’ajout d’une trop grande quantité de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’air a piégé la chaleur, et la surchauffe de la planète affecte tout, depuis les courants océaniques jusqu’aux conditions météorologiques.
Un signe inquiétant est la possibilité de disparition du Gulf Stream, officiellement appelé circulation méridienne de retournement Atlantique. Les océans couvrent 70 % de la surface de la Terre et déplacent la chaleur de l’équateur vers les pôles, régulant ainsi le climat et les conditions météorologiques. Le Gulf Stream transporte les eaux chaudes de l’Atlantique vers le nord, où elles se refroidissent et descendent, alimentant ainsi les courants atlantiques. Selon les scientifiques, l’eau douce provenant de la fonte rapide de la calotte glaciaire du Groenland et d’autres sources pourrait modifier ces courants et affaiblir le Gulf Stream au point de le faire disparaître.
Tous ces effets auraient à leur tour leurs propres répercussions, créant des boucles de rétroaction et des points de basculement à mesure que les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère continuent d’augmenter.
Une nouvelle étude estime que ce phénomène pourrait se produire entre 2025 et 2095 si nous ne réduisons pas rapidement les émissions mondiales de carbone. Selon The Guardian (article en anglais), une telle disparition « aurait des conséquences catastrophiques dans le monde entier, perturbant gravement les pluies dont dépendent des milliards de personnes pour leur alimentation en Inde, en Amérique du Sud et en Afrique de l’Ouest. Elle entraînerait une augmentation des tempêtes et une baisse des températures en Europe, ainsi qu’une élévation du niveau de la mer sur la côte est de l’Amérique du Nord. Elle mettrait aussi en péril la forêt amazonienne et les nappes glaciaires de l’Antarctique. »
Tous ces effets auraient à leur tour leurs propres répercussions, créant des boucles de rétroaction et des points de basculement à mesure que les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère continuent d’augmenter.
En ce qui concerne le réchauffement des eaux de l’Atlantique, l’océan autour des îles Keys en Floride a récemment atteint un record mondial historique de température de surface, avec plus de 38 °C – aussi chaud qu’un jacuzzi. Les températures normales dans cette zone varient entre 23 et 31 °C pour cette période de l’année.
Du côté de l’océan Pacifique, les températures élevées dans la mer des Salish, au nord-est de l’île de Vancouver, ont fait cuire le varech.
Les scientifiques ont trouvé que les épisodes de canicules océaniques augmentent rapidement dans le monde entier, tuant les varechs, les coraux, les coquillages et d’autres formes de vie marine. « Les recherches ont révélé que les épisodes de canicule deviennent plus fréquents, prolongés et graves, le nombre de jours de canicule ayant triplé au cours des deux dernières années étudiées », rapporte The Guardian.
Parce que nous dépendons tellement de l’océan – oxygène, nourriture, médicaments, stockage du dioxyde de carbone et régulation du climat, loisirs, transports, protection contre les tempêtes – ces dommages nous touchent toutes et tous.
À lui seul, le dôme de chaleur de 2021 a tué plus d’un milliard d’animaux marins au large des côtes de la Colombie-Britannique. Parce que nous dépendons tellement de l’océan – oxygène, nourriture, médicaments, stockage du dioxyde de carbone et régulation du climat, loisirs, transports, protection contre les tempêtes – ces dommages nous touchent toutes et tous.
La bonne nouvelle est que le monde commence enfin à reconnaître à quel point l’océan est important et à quel point nous l’avons mal traité. Le Canada a rejoint de nombreux pays en s’engageant à protéger 30 % de son territoire marin d’ici à 2030 et à contribuer aux efforts de protection des eaux internationales. Le gouvernement a effectivement déclaré un moratoire sur l’exploitation minière en eaux profondes et a fixé un objectif pour les nouvelles aires marines nationales de conservation.
Le Canada s’est également joint à d’autres nations en signant le Traité international de protection de la haute mer, qui établit un cadre juridique pour la mise en place d’un réseau d’aires marines protégées dans les eaux internationales et comprend des exigences pour les évaluations des impacts environnementaux dans les zones situées au-delà des juridictions nationales.
Mais ce n’est pas suffisant.
L’état déplorable des océans est un autre symptôme de nos modes de vie excessifs, alimentés par le gaz, le pétrole et le charbon, qui polluent et altèrent le climat. Adopter des approches disparates pour résoudre des problèmes essentiels et interconnectés, tout en essayant de maintenir notre économie et nos modes de vie au statu quo, est trop peu, trop tard. Nous devons remettre en question tous nos systèmes obsolètes qui engendrent la surconsommation et le gaspillage, la pollution et la pauvreté.
Nous avons inséré nos schémas économiques relativement récents dans des processus planétaires que nous comprenons à peine, en nous mettant, nous-mêmes et nos idées, au-dessus de la nature, justifiant ainsi notre exploitation rapide et destructrice de tout ce qui nous entoure. À mesure que nous apprenons comment les réseaux de la nature interagissent et fonctionnent, nous devons apprendre à travailler avec eux plutôt que contre eux.
L’océan envoie un avertissement sévère. Nous n’avons pas beaucoup de temps.