En 2011, la Fondation David Suzuki et l’Institut Pembina ont publié un rapport qui analysait la possibilité de faire du gaz « naturel » un combustible « de transition » lors du passage nécessaire des énergies fossiles aux énergies renouvelables. Le rapport avait conclu que le Canada gagnerait à se concentrer davantage sur le développement d’énergies renouvelables et non pas sur celui de combustibles fossiles, dont le gaz naturel. Pourtant, plusieurs années après cette publication, alors que le prix des énergies renouvelables a chuté et que les technologies ont poursuivi leur évolution, une poignée de personnes s’entêtent à exhiber le gaz naturel comme étant un combustible « de transition » – allant même jusqu’à le voir comme une solution climatique.
De nouveaux rapports publiés récemment, dont un élaboré par la Fondation David Suzuki, démontrent que le gaz naturel constitue en fait une transition couteuse qui mènerait à davantage de pollution et d’émissions de gaz à effet de serre.
Depuis 2011, nous en savons beaucoup plus sur les problèmes liés aux gaz naturels, notamment sur le fait que, de nos jours, la plupart proviennent de réserves « non conventionnelles ». Cette source d’énergie dépend donc de la fracturation hydraulique, qui permet d’extraire des gaz difficilement accessibles – les gaz de schistes par exemple – et de les ramener à la surface en injectant dans le sol d’énormes quantités de liquides sous pression et de produits chimiques afin de briser la roche et les formations rocheuses. C’est un processus plutôt dispendieux qui utilise d’énormes quantités d’eau.
De nouveaux rapports publiés récemment, dont un élaboré par la Fondation David Suzuki, démontrent que le gaz naturel constitue en fait une transition couteuse qui mènerait à davantage de pollution et d’émissions de gaz à effet de serre.
Selon un rapport récent (en anglais), non seulement le gaz naturel n’est pas un combustible « de transition » adéquat, mais en plus, sur une période de 20 ans, les effets climatiques du gaz exporté dépasseraient ceux provoqués par le charbon. En effet, la production et la liquéfaction des gaz de schiste pour en faire du gaz naturel liquéfié (GNL) requièrent de grandes quantités d’énergie. Le GNL le plus courant, le méthane, est un gaz à effet de serre plus puissant que le dioxyde de carbone si on observe ses répercussions sur le court terme. Ainsi, des fuites, des émanations volontaires et une combustion incomplète durant l’extraction, la production et le transport peuvent générer des effets climatiques importants. Des études, dont certaines réalisées par la Fondation David Suzuki, ont d’ailleurs constaté que les fuites de méthane sont beaucoup plus importantes que les chiffres avancés par l’industrie et les gouvernements (source en anglais).
Le rapport émis par l’Université Cornell et publié dans l’Energy Science & Engineering a également démontré que la combustion de ce type de gaz est responsable de 23 % de son empreinte de gaz à effet de serre, alors que les émissions de méthane « en amont et en milieu de chaîne » atteignent les 38 %. En y incluant l’énergie requise pour produire du GNL, on arrive à 47 %. Enfin, il faut tenir compte du processus de liquéfaction et de transport par pétrolier qui s’ajoutent au total. Utilisé comme combustible, la contribution potentielle du GNL au réchauffement planétaire serait donc de 33 % plus élevée que celle du charbon, si l’on observe ces effets sur une période de 20 ans. Le rapport conclut que sur une période de 100 ans, sa contribution serait égale ou plus importante que celle du charbon.
La classe politique, avec son agenda calqué sur les cycles électoraux, a une imagination limitée : elle considère souvent que la production gazière constitue une manière simple et rapide de stimuler l’économie. Elle accorde ainsi crédit à la campagne de propagande et d’écoblanchiment menée par l’industrie.
« C’est une grossière erreur de penser que ce gaz devrait être présenté comme une solution climatique », rapporte au Guardian l’auteur Robert Howarth, spécialiste de l’environnement. « C’est de l’écoblanchiment de la part d’entreprises pétrolières et gazières qui ont gravement sous-estimé les émissions associées à ce type d’énergie. »
La classe politique, avec son agenda calqué sur les cycles électoraux, a une imagination limitée : elle considère souvent que la production gazière constitue une manière simple et rapide de stimuler l’économie. Elle accorde ainsi crédit à la campagne de propagande et d’écoblanchiment menée par l’industrie. En Colombie-Britannique, cela s’est illustré par le soutien et l’octroi de subventions visant à favoriser l’essor des exportations de GNL.
Selon un nouveau rapport présenté par Carbon Tracker, en collaboration avec la Fondation David Suzuki et l’Institut Pembina, le gaz naturel ne représente pas une solution viable. En effet, le rapport Turning Tides: The economic risks of B.C.’s LNG expansion in a changing energy market émet le constat que la continuation et l’expansion de l’exportation de GNL en Colombie-Britannique représentent un investissement risqué. L’Agence internationale de l’énergie rapporte que la capacité d’exportation de GNL dépassera la demande, ce qui provoquerait une « chute des prix du gaz sur le plan mondial et créerait un climat de concurrence féroce entre les fournisseurs » (source en anglais).
Peu importe les efforts déployés par le secteur des combustibles fossiles et ses défenseurs pour garder en vie leur industrie destructive et dépassée, il est temps de regarder la réalité en face.
Peu importe le scénario, que la transition soit rapide ou lente, les retombées seront minimes. En ce qui concerne le marché mondial, des pays producteurs – dont le Qatar, l’Australie et le Mozambique – seraient en mesure de fournir de larges volumes de GNL à des prix inférieurs. Les marchés asiatiques, quant à eux, sont hésitants et semblent se contracter. Résultat : les quatre terminaux de GNL en Colombie-Britannique en attente de décisions concernant leurs investissements risquent de ne pas pouvoir tenir tête aux fournisseurs à moindres couts présents sur la scène mondiale.
Peu importe les efforts déployés par le secteur des combustibles fossiles et ses défenseurs pour garder en vie leur industrie destructive et dépassée, il est temps de regarder la réalité en face. Que ce soit pour des raisons climatiques ou économiques, la fracturation visant à obtenir plus de gaz dommageables pour le climat n’est pas une solution. Il existe des sources d’énergie plus abordables, propres et saines. Nous devons redoubler d’efforts pour améliorer l’efficacité énergétique et être en mesure d’en faire plus avec moins pour ainsi réaliser des économies. Notre planète surchauffe à un rythme effarant : qu’on parle de charbon, de pétrole ou de gaz, la production de combustibles fossiles n’a pas sa place.
Il est plus que temps de laisser les combustibles fossiles sous terre – et cela vaut pour le gaz naturel!