Le récent inventaire des gaz à effet de serre du Canada montre que les politiques climatiques sont efficaces – mais nous sommes toujours confronté.e.s à des obstacles majeurs.
D’un point de vue positif, les émissions globales ont diminué, malgré une augmentation post-pandémique plus faible que prévu. D’un point de vue négatif, les émissions des secteurs pétrolier et gazier et du secteur des transports sont en hausse. De plus, les projets d’expansion de la production d’électricité à partir du gaz, surtout en Alberta et en Ontario, nuisent au progrès de la transition nécessaire vers l’électricité propre.
Conformément à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, les pays doivent présenter des inventaires annuels standardisés des émissions provenant d’une série de sources. Le dernier inventaire au Canada, qui analyse les données de 2021, montre que les émissions ont diminué de 8,4 % par rapport à 2005, malgré une augmentation de 1,8 % par rapport à 2020, et qu’elles restent inférieures de 7,4 % aux niveaux d’avant la pandémie de 2019. Les politiques qui ont conduit à des améliorations dans la production d’électricité, le chauffage domestique, l’efficacité énergétique, les processus industriels et les changements économiques structurels ont contribué à ces baisses.
Les pays doivent présenter des inventaires annuels standardisés des émissions provenant d’une série de sources.
Malheureusement, les émissions de l’industrie pétrolière et gazière – qui représentent 28 % de nos émissions annuelles de gaz à effet de serre – continuent d’augmenter. Elles ont augmenté de 4 % (quatre mégatonnes) en une seule année, de 2020 à 2021. Les émissions des transports ont augmenté de 5 % (neuf mégatonnes). L’augmentation due aux transports provient en partie d’une hausse des voyages à mesure que la pandémie s’atténuait, mais aussi de l’augmentation des ventes de camions et de véhicules utilitaires sport.
Pour respecter ses engagements internationaux et contribuer à empêcher le réchauffement de la planète d’atteindre des niveaux catastrophiques, le Canada doit se concentrer sérieusement sur ces secteurs. Il n’y a aucune raison de laisser les secteurs les plus polluants s’en tirer sans faire leur part.
Pour commencer, le Canada devrait imposer un plafond strict aux émissions permises de l’industrie pétrolière et gazière, qui diminuera au fil du temps. Cela est particulièrement nécessaire pour lutter contre les émissions des sables bitumineux, qui ont été les plus élevées jamais enregistrées en 2021, en parallèle avec une production et des bénéfices records. Il est important de noter que les émissions recensées ne proviennent que des utilisations et non des émissions bien plus importantes et plus graves dues à la combustion des carburants sur les lieux d’exportation! Un plafond limiterait au moins la quantité des émissions que l’industrie est autorisée à rejeter dans l’atmosphère pendant l’extraction et le traitement.
Pour respecter ses engagements internationaux et contribuer à empêcher le réchauffement de la planète d’atteindre des niveaux catastrophiques, le Canada doit se concentrer sérieusement sur ces secteurs.
Nous devons aussi arrêter de laisser le gouvernement et l’industrie s’en tirer en mettant en avant des mesures de diversion comme « l’intensité des émissions » qui, comme le souligne le Tyee, « se réfère à la quantité de gaz à effet de serre émise par unité de production » et ne donne pas une vraie représentation de l’augmentation des émissions à mesure que la production augmente.
Malgré des bénéfices records et des rémunérations lucratives pour ses dirigeant.e.s, l’industrie n’a investi que peu ou pas d’argent pour maîtriser ses émissions excessives – à part la réduction de certaines émissions de méthane, comme l’exige la réglementation. En fin de compte, nous devons éliminer progressivement la production, et pas seulement les émissions.
La lutte contre les émissions dues aux transports dépend du gouvernement, de l’industrie et de la population. Nous devons cesser d’acheter et de conduire des véhicules utilitaires sport et des camions inutiles. La plupart d’entre eux sont utilisés là où des voitures plus petites conviendraient également et ils sont rarement utilisés à des fins professionnelles. Beaucoup soutiennent l’idée que la publicité pour tous les véhicules à combustibles fossiles, notamment les camions et les véhicules utilitaires sport, devrait être interdite. Pour s’assurer que les véhicules que nous utilisons sont principalement électriques, le gouvernement doit adopter les objectifs proposés pour la production et la vente de véhicules zéro émission. Il est également primordial d’investir dans les transports en commun et dans les infrastructures de transport actif, comme le vélo.
Nous devons aussi intensifier les progrès en matière d’électrification et de production d’électricité propre – un domaine où il y a des raisons d’être optimiste. En 2021, les émissions dues à la production d’électricité étaient inférieures à la moitié de ce qu’elles étaient en 2005. Nous devons continuer à nous tourner vers les sources d’électricité renouvelables, à améliorer l’efficacité énergétique et à construire davantage de réseaux de transport interprovinciaux.
Nous devons continuer à nous tourner vers les sources d’électricité renouvelables, à améliorer l’efficacité énergétique et à construire davantage de réseaux de transport interprovinciaux.
Un rapport de la Fondation David Suzuki montre qu’il est possible de produire 100 % d’électricité propre d’ici à 2035, même sans utiliser des technologies coûteuses et longues à mettre en place, comme le nucléaire, ou le captage et le stockage du carbone. Cela signifie aussi qu’il n’y a pas besoin de recourir à la fracturation hydraulique pour produire de l’électricité.
De nombreux travaux de recherche montrent que tout cela est possible et rentable, et que cela aboutira à des factures d’énergie plus abordables, tandis que ne pas le faire coûtera beaucoup plus cher et conduira à un désastre.
Le gouvernement du Canada affirme qu’il s’engage à réduire, d’ici 2030, les émissions de gaz à effet de serre de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005. Malgré certaines tendances positives, l’inventaire montre que nous pouvons et devons aller plus loin. C’est faisable. Faisons-le ensemble!