David Suzuki participe à un débat lors d'un récent événement de lancement du programme communautaire d'énergie renouvelable de la Fondation David Suzuki, Charged Up. (Photo : David Roemmele)

David Suzuki participe à un débat lors d'un récent événement de lancement du programme communautaire d'énergie renouvelable de la Fondation David Suzuki, Charged Up. (Photo : David Roemmele)

Lorsque les politiciens et les médias alimentés par l’industrie des combustibles fossiles se servent de quelques mots que moi ou d’autres défenseurs de l’environnement avons employés par mégarde, tout en faisant fi de nos messages généraux, c’est habituellement parce qu’ils n’ont pas de véritables contre-arguments.

Je ne suis qu’un messager qui présente la science et les solutions de façon accessible. Et, comme toutes les personnes qui ont travaillé sur les questions climatiques pendant un certain temps, je suis frustré par l’absence cuisante d’action politique et sociétale.

Il est rare de voir ces politiciens, ces médias et ces gens d’affaires expliquer de façon rationnelle pourquoi nous ne devrions pas faire tout en notre pouvoir afin de prévenir la catastrophe climatique que les scientifiques du monde entier prédisent si nous n’agissons pas maintenant.

Au lieu de cela, ils ignorent la science, ou la soutiennent avec des paroles en l’air, tout en essayant de diaboliser les personnes qui consacrent leur vie à assurer un avenir sain à l’humanité. Ils prennent des citations hors contexte pour irriter ceux qui craignent le changement et qui refusent d’admettre que nous sommes en crise. Ils ignorent les dômes de chaleur, les sécheresses et les inondations, ou agissent comme si cela n’avait rien à voir avec l’exploitation généralisée et toujours croissante des combustibles fossiles.

Si les gouvernements et les médias voulaient vraiment défendre les travailleurs des secteurs du pétrole, du gaz et du charbon, ils créeraient et favoriseraient de nouvelles possibilités et aideraient ces travailleurs à faire la transition vers de nouveaux emplois.

Au lieu de cela, ils blâment les environnementalistes pour les pertes d’emplois, alors même que les dirigeants d’entreprise parlent de poursuivre l’automatisation de leurs processus, voire de les automatiser complètement, dans une période où le monde se tourne vers des énergies plus propres.

En fait, ils se soucient aussi peu des travailleurs que ceux qui réalisent d’énormes profits tout en montrant la porte aux employés en raison de l’automatisation et des tendances du marché. Entre-temps, les organismes environnementaux du monde entier réclament une « transition équitable » pour veiller à ce que les personnes touchées et leurs familles ne soient pas laissées pour compte dans la transition nécessaire vers une énergie plus propre et moins de déchets.

Pourquoi les gouvernements et les médias ne présentent-ils pas des arguments honnêtes? C’est à eux de se justifier s’ils croient que des perturbations climatiques ne sont pas imminentes et qu’elles ne sont pas suffisamment graves pour nous obliger à changer nos façons de faire, s’ils pensent que nous pouvons continuer d’exploiter et de brûler des combustibles fossiles jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus.

S’ils ne sont pas d’accord avec nos communications sur le climat et d’autres sujets environnementaux, ils devraient répondre par des arguments logiques.

La réponse récente du gouvernement de l’Alberta ne répond pas à ce critère. Il a dépensé 3,5 millions de dollars (et 30 millions de dollars par année pour un « centre de crise ») pour une « enquête publique sur les campagnes anti-énergie albertaines » afin de défendre l’industrie la plus rentable de l’histoire contre de vaillants groupes environnementaux. L’enquête a été ponctuée de retards, d’augmentations de coûts et de sources d’embarras avant de conclure qu’il n’y avait « aucun acte répréhensible de la part d’une personne ou d’un organisme » et que les campagnes n’avaient pas répandu de fausses informations.

Au lieu d’accepter cette conclusion et de passer à autre chose, le gouvernement et certains médias l’ont remodelée pour qu’elle laisse entendre le contraire.

Au sein du mouvement environnemental, nous demeurons transparents au sujet de nos communications, de notre financement et de nos objectifs, et si nous commettons des erreurs, nous les corrigeons. Après tout, notre objectif est d’avoir une planète plus saine pour tous.

Ceux qui vénèrent l’argent et le pouvoir manipuleront et duperont volontiers les autres pour obtenir et garder ces deux éléments. On n’a qu’à penser à la désinformation constante des médias américains comme Fox, ou au rejet continu de la science du climat par les rédacteurs d’opinion de la chaîne Postmedia du Canada, au service de la dévastation environnementale continue de l’industrie des combustibles fossiles.

Ces groupes nous freinent. Nous sommes au courant de l’effet de serre depuis près de 200 ans et nous sommes certains des conséquences des activités humaines sur le climat depuis plus de 30 ans, mais l’industrie des combustibles fossiles et les politiciens, les lobbyistes, les groupes de façade et les médias qu’elle tient sous son joug ont convaincu beaucoup de personnes de continuer de faire comme si tout allait bien.

Nous avons gaspillé les 30 dernières années et nous en voyons les conséquences. Tout ce que moi et d’autres personnes avons dit pendant des décennies est en train de se réaliser. Posez la question aux gens d’Abbotsford ou de Lytton. Pensez aux milliards de plantes et d’animaux intertidaux qui ont disparu dans le dôme de chaleur de l’été. La production canadienne de canola et de blé a diminué de plus de 35 % cette année à cause de la sécheresse. Pourtant, j’entends encore les antienvironnementalistes soutenir que plus de CO2 est bon pour la croissance des plantes, ou que des températures plus chaudes seront bonnes pour le Canada.

J’aimerais qu’on me prouve que j’ai tort, tout comme, j’imagine, l’ensemble des climatologues et des activistes. Or, nous ne pouvons pas ignorer la situation dans laquelle nous sommes, alors travaillons ensemble pour y remédier.

Demandons des mesures climatiques ambitieuses