La COP30 : voix des Amériques

Le 15 novembre 2025, une grande « marche des peuples » a été organisée à l’occasion de la COP30. Près de 70 000 personnes ont parcouru les rues de Belém pour demander une véritable justice climatique. (Photo : Cyrielle Maison / Fondation David Suzuki)

En direct de la COP30, à Belém, Cyrielle Maison a réalisé des entrevues avec cinq personnes inspirantes des Amériques qui travaillent au quotidien, chacune à leur façon, pour une véritable justice climatique en Bolivie, au Québec, en Colombie et au Venezuela. À travers leurs récits, elles nous partagent leurs impressions de la COP30 et ce qu’elles jugent important de mettre de l’avant lorsque l’on parle des changements climatiques.

Samuel Rainville et Laura Fontaine nous donnent tout d’abord leurs impressions de la COP30 en tant qu’espace de rencontre et d’échange entre peuples.

Samuel Rainville

Ici, on est au Brésil, on voit des peuples qui viennent de partout sur la planète, c’est vraiment inspirant pour nous. […] Grâce au programme [des ambassadrices et ambassadeurs de la forêt], je me sens beaucoup plus légitime de porter les messages de ma communauté parce que notre grande mentore, Melissa Mollen Dupuis, nous amène en territoire et nous fait comprendre ce que sont les luttes des défenseur·es du territoire chez nous. Quand on arrive ici, on fait des liens avec des peuples d’ailleurs et c’est super inspirant, on se sent bien outillé·es.

– Samuel Rainville, Innu membre de la communauté de Pessamit et Québécois

Laura Fontaine

Je me sens vraiment chanceuse ici parce qu’on est en Amazonie, on a vraiment la chance de côtoyer du monde, des Autochtones d’Amérique du Sud et du Nord. […] Je pense que c’est vraiment un bel espace de rencontre.

– Laura Fontaine, Innu membre de la communauté de Mani-utenam

Inés Gonzales Salas apprécie également l’espace qu’offre la COP pour rencontrer des personnes provenant de divers horizons. Elle dénonce cependant que des entreprises, qui n’ont pas la protection de l’environnement à cœur, aient été invitées à faire partie des délégations de pays. Elle mentionne aussi le Sommet des peuples et les demandes formulées par les personnes qui y ont participé en dehors des murs de la COP30, mais plutôt à l’Universidade Federal do Pará, un espace ouvert à toutes et à tous.

Ines Gonzales Salas

« [La COP] est sans aucun doute une expérience intéressante. Le simple fait de voir la diversité culturelle est déjà fascinant, des gens venus de tant d’endroits différents dans le monde, avec des vêtements et des langues si différents, c’est impressionnant. En fait, c’est une expérience enrichissante, mais aussi frustrante, car nous ne voyons pas les résultats d’une réunion de cette envergure mondiale. Vraiment, on dirait que nous parlons tous des langues différentes et que nous ne parvenons pas à comprendre le cri de la planète.

Ils doivent dialoguer, c’est fondamental, avec sincérité et devant les gens. Par exemple, certaines grandes entreprises ont envoyé des négociateurs à la COP, mais ce sont les gouvernements qui ont accrédité ces négociateurs. Il est important que les États pensent également aux gens, pensent à chaque vie qui est en jeu avec les changements climatiques.

[Les peuples autochtones] sont en marge, ils participent à des événements parallèles. Il faut voir si la COP prendra en compte, par exemple, la déclaration issue du Sommet des peuples. Ils ont dit que oui, que le président l’avait reçue, mais nous verrons bien si c’est le cas. »

– Inés Gonzales Salas, directrice générale à Educación Radiofónica de Bolivia

Steven Santiesteban Rojas, qui travaille notamment dans la région amazonienne colombienne, parle des réalités des peuples qui y vivent et ce qu’il aimerait dire au président de la COP si l’occasion se présentait.

Steven Santiesteban Rojas

« Si j’avais l’occasion de m’entretenir avec le président de la COP, je lui demanderais que les actions soient réelles, qu’elles soient vraies, que les stratégies de transformation soient mises en œuvre sur le terrain, qu’il parle avec les gens des territoires, avec les peuples amazoniens. Ce sont eux les acteurs clés de tout ce que nous vivons actuellement.

Aucun gouvernement ne peut s’asseoir à la table des négociations sans la présence des femmes autochtones, sans la présence des chef·fes autochtones. Je dirais [au président de la COP] que l’action doit être menée à partir du territoire, avec la population qui aime et prend soin de ce magnifique écosystème.

Les territoires amazoniens sont les plus touchés par la déforestation, le pétrole et les mines. Il s’agit donc d’un fléau dont souffrent les communautés et dont nous ne sommes peut-être pas pleinement conscient·es. […] Cette voix, associée à celle des peuples, est l’arme la plus puissante dont nous disposons pour dénoncer et, surtout, préserver les écosystèmes. »

– Steven Santiesteban Rojas, communicateur social colombien

Yorman Galviz, un journaliste qui travaille au Venezuela, à la frontière avec la Colombie, témoigne de l’importance des communications pour sensibiliser les gens aux changements climatiques. Il rappelle également l’importance d’être à l’écoute des réalités des personnes qui se trouvent sur les territoires impactés.

Yorman Galviz

« Notre intention est d’aborder tous les thèmes qui font l’objet de débats et de négociations [à la COP], mais aussi d’écouter la voix de celles et ceux qui réclament une justice climatique. Nous pensons que la communication est un outil puissant qui permet aux gens de s’informer et surtout de s’éduquer sur ce que sont les changements climatiques et sur la manière dont ils affectent le territoire.

Si je pouvais parler au président de la COP… je lui demanderais de se concentrer davantage sur les besoins des communautés et moins sur les questions bureaucratiques, afin qu’il puisse entendre ce qui se passe réellement avec les changements climatiques dans les territoires, car nous avons eu l’occasion de rencontrer des communautés paysannes qui nous ont dit : “Nous ne savons plus quand il va pleuvoir. Avant, les précipitations suivaient des schémas réguliers, mais maintenant, elles surviennent à d’autres moments”. Il faut être plus à l’écoute des territoires, plus à l’écoute des réalités des gens. »

– Yorman Galviz, journaliste vénézuélien