La promotion du chanvre comme solution aux problèmes environnementaux bat son plein. On le présente comme une alternative aux plastiques à base de pétrole, au coton dévoreur de ressources, aux combustibles fossiles polluants, aux matériaux de construction énergivores, aux produits papetiers destructeurs pour les forêts, pour n’en nommer que quelques exemples. Le chanvre représenterait également une source d’alimentation saine pour les êtres humains et les animaux, et pourrait même servir à la fabrication de produits cosmétiques.
Cet engouement pour le chanvre devrait-il nous enivrer?
Depuis des dizaines de milliers d’années, on l’utilise pour ses fibres, mais aussi comme aliment et comme médicament naturel. Elle constituerait une des plus anciennes plantes cultivées. De nos jours, le chanvre fait surtout référence à des plantes de cannabis à faible teneur en ingrédients psychoactifs, c’est-à-dire en tétrahydrocannabinol et en cannabidiol (THC et CBD). Toutefois, on peut utiliser tout type de plant de cette espèce pour ses fibres.
Une grande part de cet enthousiasme renouvelé s’avère bien fondé – quoique nous manquerons d’espace ici pour explorer le débat sur le cannabis comme remède.
Depuis des dizaines de milliers d’années, on l’utilise pour ses fibres, mais aussi comme aliment et comme médicament naturel. Elle constituerait une des plus anciennes plantes cultivées.
Au début du 20e siècle, en Amérique du Nord et ailleurs, la culture et l’usage du chanvre se sont ralentis. Dans un contexte de lois racistes sur les drogues, les États-Unis ont ainsi criminalisé sa culture en 1937, par le biais de la Marihuana Tax Act. Le Canada, lui, a adopté sa Loi sur l’opium et les drogues narcotiques en 1938. Par la suite, la culture et la production de chanvre industrielle ont été légalisées au Canada en 1998, et aux États-Unis en 2018. Cette vague de légalisation en a encouragé plusieurs à reconsidérer l’intérêt de ce matériau.
Ses fibres revêtent en effet de nombreux avantages en comparaison à d’autres matières, notamment au coton. Elles servent aussi pour l’emballage et comme matériaux de construction; elles offrent des solutions plus écologiques que les plastiques à base de pétrole, et peuvent même servir de combustible.
Plusieurs de ses atouts reposent dans la façon dont cette plante pousse, ce qui lui vaut son surnom de « weed » ou « herbe ». Le chanvre pousse vite, avec peu d’eau et d’espace. Le recours à des herbicides et pesticides chimiques se trouve aussi potentiellement réduit grâce à ses propriétés. De plus, son système racinaire emmagasine le carbone de l’atmosphère, prévient l’érosion et retourne des nutriments aux sols après sa récolte. Le chanvre sert aussi de couvert végétal pour régénérer les sols contaminés et prévenir la propagation de mauvaises herbes, de nématodes et de champignons nuisibles.
Ses fibres revêtent en effet de nombreux avantages en comparaison à d’autres matières, notamment au coton.
De surcroît, la culture du coton nécessite environ 50 % plus d’eau que celle du chanvre, et près de quatre fois plus si l’on ajoute la transformation à ce calcul. Le chanvre produit aussi jusqu’à deux fois plus de fibres par hectare que le coton. Selon une étude menée par une équipe de recherche au Bangladesh (en anglais), « la culture du chanvre pour ses fibres engendre environ 77,63 % moins de coûts en matière de fertilisation, de graines, d’entretien des champs et d’irrigation si on le compare au coton, cette fibre naturelle la plus connue ».
Ce dernier surpasse la plante cannabinacée sur quelques points de moindre importance. En effet, le coton est plus doux et plus facile à transformer; cela s’oppose toutefois à la plus grande durabilité du chanvre. Les tissus en chanvre performent cependant moins bien en matière de solidité de la couleur, se froissent plus aisément et leur recyclage représente un défi supplémentaire. Ce matériau coûte également plus cher, et est légèrement plus énergivore au moment de sa transformation. On espère en revanche que ces coûts réduiront à force d’être plus répandus sur le marché.
On constate le même désavantage du côté des bioplastiques à base de cette plante. Cela s’explique par les prix des plastiques dérivés des combustibles fossiles artificiellement bas, puisque les torts causés par l’industrie ne sont pas pris en compte dans l’équation. Le bioplastique de chanvre possède des propriétés biodégradables, en plus d’être plus solide et plus léger que les plastiques traditionnels, lesquels ne se désintègrent pas complètement et contaminent la terre, les eaux, et même nos corps. Le bioplastique de chanvre s’emploie déjà dans une multitude d’usages, allant de l’emballage jusqu’aux pièces d’autos.
Un atout supplémentaire : en raison de la décriminalisation et de la légalisation du cannabis psychoactif à usage récréatif ou médicinal, la culture de cette plante connaît actuellement une grande croissance.
Pour ce qui a trait aux biocarburants à base de chanvre, ceux-ci se démarquent par leur caractère écologique, bien que, pour cette raison, leur coût s’élève au-delà de celui des combustibles fossiles. Ce carburant s’élabore principalement depuis l’huile extraite des graines, mais peut aussi provenir d’autres parties de la plante et de biocharbon. Contrairement à son homologue fossile, le carburant de chanvre est renouvelable et carboneutre : le carbone qu’il emprisonne lors de sa croissance compense ses émissions.
Un atout supplémentaire : en raison de la décriminalisation et de la légalisation du cannabis psychoactif à usage récréatif ou médicinal, la culture de cette plante connaît actuellement une grande croissance. Puisque l’industrie du cannabis psychoactif n’en commercialise que les fleurs et les feuilles, les parties à forte teneur en fibre, soit les pieds et les tiges, peuvent servir à d’autres usages. Résultat : une réduction du gaspillage. Tout le monde y gagne!
En général, qu’il serve comme tissu, biocarburant, combustible, produit papetier ou matériau de construction, le chanvre revêt de nombreux avantages, et très peu d’inconvénients. Alors que les cultures et la construction d’installation augmenteront, son plus grand désagrément, celui du prix, risque fort de s’amenuiser. Rappelons aussi ses avantages écologiques qui le placent en tête de liste devant le coton, les combustibles fossiles et les produits papetiers à base d’arbres.