Nous ne pouvons survivre que quelques jours sans eau. Après tout, c’est notre principal constituant. En gros, nous sommes des gouttes d’eau avec assez d’épaississant organique pour ne pas nous répandre dans les égouts. Nous faisons partie intégrante du cycle hydrologique d’évaporation, de condensation et de précipitation qui fait circuler l’eau partout sur la planète.
Vu l’importance de l’eau pour notre santé et notre survie, on pourrait penser que nous prendrions mieux soin des ruisseaux, des rivières, des terres humides, des glaciers et du grand océan interconnecté. La surface de la Terre est recouverte d’eau à 70 %, mais seulement 3 % de cette eau est douce et la majeure partie est inaccessible ou polluée.
Puisque notre système économique mondial actuel valorise l’argent par-dessus tout ce dont nous avons besoin pour survivre, nous avons pollué, détruit et épuisé les sources d’eau à un rythme alarmant, en partie au profit des riches entreprises. Avec les changements climatiques qui s’accélèrent et qui causent des sécheresses, l’eau et notre existence sont d’autant plus menacées.
Tant que les êtres humains continueront d’exploiter et de brûler des carburants fossiles et de détruire les puits de carbone comme les forêts, la planète continuera de se réchauffer, ce qui accentuera la pression sur les sources d’eau.
Dans certains cas, la dévastation se fait au nom du développement : les terres humides sont détruites pour l’étalement urbain, les voies navigables, polluées pour l’extraction minière et pétrolière, les rivières, harnachées pour l’hydroélectricité et l’irrigation, et tout, des ruisseaux aux océans, est pollué parce qu’il coûte moins cher d’y jeter nos déchets que de trouver de meilleurs moyens d’en disposer.
L’eau est peu à peu réduite à une marchandise, une ressource de plus en plus rare et précieuse à cause de la sécheresse, de la pollution et de la fonte des glaciers.
Dans un article du Guardian, on peut lire : « Partout dans l’ouest des États-Unis, les investisseurs privés ont ratissé les collectivités rurales pour obtenir des droits prioritaires sur l’eau ». De grandes multinationales comme Nestlé et PepsiCo paient des miettes pour siphonner l’eau potable des sources publiques afin de l’embouteiller et de la revendre à la population, engrangeant des profits exorbitants au passage (article en anglais). En outre, la fracturation nécessaire à l’obtention du gaz « naturel » requiert d’énormes quantités d’eau (et de produits chimiques) pour dynamiter les formations rocheuses et en extraire les carburants fossiles – souvent dans des régions sujettes aux sécheresses.
De nombreuses communautés autochtones au Canada et ailleurs manquent d’eau potable, et certaines vivent depuis des années avec des avis d’ébullition.
Nous sommes peut-être devant une pénurie d’eau, mais certainement pas de solutions.
Dans le Tyee, Andrew Nikiforuk écrit que des chercheur.euse.s de l’Université de Californie à Santa Barbara, qui ont passé trois ans à collecter et à analyser des données sur quelque 1 700 aquifères dans le monde, ont découvert que « l’eau souterraine s’amenuise dans 71 % des aquifères étudiés » et que « les niveaux ont chuté d’un mètre au centre de l’Alberta et en Saskatchewan ».
Nikiforuk cite une autre étude qui montre que « l’activité humaine a modifié massivement le débit de l’eau de surface dans le monde et compromis les cycles hydrologiques dont dépendent des espèces aussi variées que les poissons et les arbres ». Des chercheur.euse.s finnois.e.s ont découvert que « sur une période industrielle de 145 ans, la technosphère et sa population grandissante ont grandement modifié le débit fluvial et l’humidité du sol comparativement au niveau préindustriel » (article en anglais).
La transformation de ce qui était auparavant un système hydrologique relativement stable se répercute sur la sécurité alimentaire et hydrique, tout en augmentant « la gravité, la fréquence et la durée des inondations et des sécheresses ».
Les scientifiques finnois.e.s ont ajouté que « prendre des résolutions ambitieuses en matière de climat, empêcher la déforestation et respecter le débit écologique de l’eau dans son utilisation et sa gestion est impératif pour préserver les fonctions vitales de l’eau douce ».
Notre choix est clair. Nous devons reprendre le pouvoir des mains qui détruisent avidement les systèmes vitaux de la planète pour des gains financiers à court terme.
Tant que les êtres humains continueront d’exploiter et de brûler des carburants fossiles et de détruire les puits de carbone comme les forêts, la planète continuera de se réchauffer, ce qui accentuera la pression sur les sources d’eau. Pendant ce temps, notre quête effrénée de profits, de sources d’énergie et de technologies, nécessaires pour faire face à la croissance démographique, accélère la pollution des sources d’eau potable restantes.
Nous savions pourtant ce qui allait arriver. Bon nombre de spécialistes, y compris mon regretté ami David Schindler, l’un des écologistes de l’eau les plus influents dans le monde, a prédit pendant des décennies que des régions comme le sud de l’Alberta seraient aux prises avec une pénurie d’eau prolongée si rien n’était fait pour enrayer la crise climatique et freiner l’industrie, l’agriculture, la croissance de la population et l’étalement urbain (article en anglais). Mais les gouvernements en Alberta et en Saskatchewan continuent de pédaler dans le mauvais sens.
Nous ne pouvons continuer d’ignorer les personnes qui étudient les changements climatiques et les ressources d’eau. Les conséquences de la crise se clarifient de jour en jour. Nous sommes peut-être devant une pénurie d’eau, mais certainement pas de solutions. D’ailleurs, si elles sont mises en place de manière clairvoyante, ces solutions rendront nos sociétés plus prospères et équitables. Détruire et exploiter inutilement tout ce qui rend la vie possible nous mènera au désastre et à la mort.
Notre choix est clair. Nous devons reprendre le pouvoir des mains qui détruisent avidement les systèmes vitaux de la planète pour des gains financiers à court terme. Il existe une meilleure voie. Nous devons l’emprunter maintenant, avant qu’il ne soit trop tard.