Dow AgroSciences abandonne sa poursuite en vertu de l’ALENA sans compensation
Montréal — Les groupes environnementaux revendiquent une importante victoire quant au droit des municipalités et des provinces d’interdire les pesticides nocifs sur leur territoire alors que Dow Agrosciences a abandonné sa poursuite en vertu de l’ALÉNA qui visait le Code de gestion des pesticides du Québec. Cette plainte contestait l’interdiction d’utiliser des pesticides à des fins esthétiques sur les pelouses imposée par le Québec. Par une entente conclue entre le Canada et Dow Agrosciences, la compagnie a abandonné son action en justice et ses réclamations, et ne recevra aucun dédommagement, confirmant implicitement la légalité face à l’ALÉNA, de l’interdiction québécoise envers l’usage du 2,4-D à des fins esthétiques.
« Dow AgroSciences a fait volteface et a décidé de ne pas poursuivre son action en justice » observe Sidney Ribaux, coordonnateur général d’Équiterre. « Il s’agit d’un message sans équivoque pour toutes les juridictions à savoir que les arguments défendant le principe de précaution, à la base du Code de gestion des pesticides du Québec, sont solides et que ce principe peut être appliqué pour d’autres substances ».
L’entente a été annoncée par Dow le 25 mai dernier, mettant ainsi fin à un processus d’arbitrage démarré en 2009, qui avait pour but de contester l’interdiction du pesticide 2,4-D au Québec. Dow AgroSciences soutenait que cette interdiction violait les clauses du chapitre 11 de l’ALENA sur la liberté du commerce international, et qu’elle proscrivait illégalement la vente de pesticides utilisés à des fins esthétiques comme le Killex. La compagnie visait aussi à obtenir une compensation de 2 millions $ pour les dommages reliés à l’interdiction de ce pesticide.
Le 2,4-D est un herbicide de type chlorophénoxy, un groupe de composés chimiques que le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC) de l’Organisation mondiale de la santé classe comme une substance potentiellement cancérigène pour les humains. L’exposition à cet herbicide est également associée à plusieurs autres problèmes de santé importants, notamment des effets sur le système hormonal.
« Il s’agit d’une victoire majeure pour les provinces et les municipalités qui ont banni l’usage des pesticides à des fins esthétiques », affirme William Amos, directeur d’Écojustice — Clinique de droit de l’environnement de l’Université d’Ottawa. « Le Code de gestion des pesticides est maintenu intégralement et la vente de 2,4-D à des fins esthétiques demeure interdite au Québec. Dow AgroSciences reconnaît explicitement que les provinces, les territoires et les municipalités peuvent réglementer les pesticides de manière plus sévère que ne le fait le cadre fédéral ».
Cinq provinces canadiennes ont interdit l’usage du 2,4-D à des fins esthétiques et l’Alberta en interdit l’usage dans les mélanges de fertilisants et d’herbicides.
La seule concession qui semble avoir été obtenue par Dow est une reconnaissance par le Québec que « les produits contenant du 2,4-D ne posent pas de risque inacceptable pour la santé humaine ou l’environnement, à la condition que les directives sur les étiquettes soient respectées », tel que conclu par l’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada.
« Québec n’a pas souscrit à l’affirmation voulant que le 2,4-D soit sécuritaire », explique Lisa Gue, analyste de politiques en matière de santé environnementale à la Fondation David Suzuki. « Ce composé demeure un produit toxique et nous ne sommes pas d’accord avec les réglementations qui indiquent qu’un pesticide potentiellement cancérigène ne représente pas de risques inacceptables pour la santé humaine et l’environnement. Par ailleurs, nous félicitons le Québec de poursuivre son engagement envers l’interdiction des pesticides utilisés sur les pelouses. Nous encourageons les autres provinces à suivre cet exemple et à agir avec la même précaution. »
Le Code de gestion des pesticides du Québec est entré en vigueur en 2003. Il interdit l’utilisation et la vente de 20 ingrédients actifs entrant dans la composition de pesticides utilisés sur les pelouses et limite l’utilisation de pesticides à l’extérieur des centres de la petite enfance et des écoles.
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Sources :
William Amos, directeur d’Écojustice —
Clinique de droit de l’environnement de l’Université d’Ottawa, 613 562 5800, poste 3378
Manon Dubois, Spécialiste des communications
Fondation David Suzuki, 514 679-0821
Eveline Trudel-Fugère, Conseillère, Relations médias et communications
Équiterre 514 605-2000