OTTAWA | TERRITOIRE TRADITIONNEL NON CÉDÉ DU PEUPLE ALGONQUIN ANISHNAABEG, le lundi 7 octobre 2024 – Vendredi après-midi, le gouvernement fédéral a publié les politiques préliminaires tant attendues qui guideront les actions fédérales sur les produits chimiques toxiques et la pollution, en vertu des amendements apportés en 2023 à la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE). Les groupes environnementaux, de santé et de justice s’inquiètent du fait que seuls 33 produits chimiques et groupes de produits chimiques aient été prioritaires pour une évaluation, alors que des milliers de produits chimiques sont utilisés. De plus, le tout premier cadre du Canada pour la mise en œuvre du droit à un environnement sain doit impérativement s’aligner explicitement sur la résolution des Nations Unies reconnaissant ce droit, une résolution que le Canada a soutenue, et inclure des directives pour intégrer une approche fondée sur les droits dans les processus décisionnels en vertu de la LCPE.

Les amendements à la LCPE, adoptés sous forme de projet de loi S-5 en juin 2023, ont introduit la première reconnaissance du droit à un environnement sain dans le droit canadien. Le projet de loi S-5 a également modernisé l’approche de la réglementation des produits chimiques, incluant des obligations de consulter sur les priorités, de rendre compte annuellement des progrès réalisés et de créer une « liste de surveillance » identifiant les substances dangereuses potentiellement préoccupantes. Les groupes ont salué ces changements comme des améliorations nécessaires pour assurer plus de transparence et de responsabilité. Cependant, ils craignent que ces avancées législatives ne soient compromises par des retards, un manque d’ambition et des ressources insuffisantes pour leur mise en œuvre.

Concernant le cadre des droits environnementaux :

Lisa Gue, responsable des politiques nationales, Fondation David Suzuki, a déclaré :
« Enfin, le Canada a reconnu, dans la loi, son devoir de protéger le droit à un environnement sain. Maintenant, Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada doivent élaborer une approche fondée sur les droits humains pour guider les décisions en matière de protection de l’environnement. Malheureusement, cette orientation manque dans le cadre préliminaire de mise en œuvre, qui se contente principalement de répertorier les programmes existants de la LCPE. Bien que cela constitue un premier pas utile, il est crucial que ce cadre soit renforcé pour intégrer une perspective de droits humains en matière de protection de l’environnement, conformément aux normes internationales des approches basées sur les droits humains. »

Dre Elaine MacDonald, directrice du programme Communautés en santé chez Ecojustice, a déclaré :
« Je m’attendais à bien plus d’informations sur la manière dont le gouvernement envisage réellement de faire respecter notre droit à un environnement sain dans le cadre préliminaire de mise en œuvre. Se contenter de citer les objectifs et processus en cours sous la LCPE, comme moyen de respecter ce droit, manque d’ambition et réduit ce droit à la situation actuelle sous la LCPE. Le cadre de mise en œuvre du droit à un environnement sain doit être renforcé pour garantir que ce nouveau droit reconnu ait un véritable impact. »

Dre Ojistoh Horn, membre du conseil d’administration de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement (ACME), a déclaré :
« En tant que médecin de famille à Akwesasne, je vois de près les effets de la pollution, qui perturbent les équilibres naturels de notre environnement et de nos corps. Nous constatons, de manière anecdotique, des taux élevés de cancer, de maladies auto-immunes, de troubles endocriniens et de déséquilibres en santé mentale après des années de contamination industrielle. C’est pourquoi le nouveau droit à un environnement sain, inscrit dans la version actualisée de la LCPE, est si important. Mais il ne suffit pas que ce droit soit inscrit dans la loi – il est essentiel qu’il soit encadré et mis en œuvre de manière significative, avec une approche fondée sur les droits et en accord avec la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA). »

Joseph Castrilli, avocat, Association canadienne du droit de l’environnement, a déclaré :
« Face à l’exposition croissante aux produits chimiques qui causent le cancer et d’autres dommages à la santé, le projet de cadre de mise en œuvre de la LCPE n’est pas à la hauteur. Il crée de l’incertitude dans les efforts déployés pour faire progresser la justice en matière d’environnement et de droits humains. Ce cadre ne nous permet pas de savoir comment le droit est censé être protégé dans le cadre de ce régime. Une liste est un début, mais ce n’est pas un processus permettant d’atteindre ou de garantir une prise de décision respectueuse de l’environnement. »

Kristian Ferreira, coprésident de la Coalition for Environmental Rights, a déclaré :
« Nous nous réjouissons que le gouvernement ait reconnu le droit à un environnement sain dans la loi. Le prochain objectif du gouvernement doit être d’établir la loi dans la vie quotidienne de tous les Canadiens et Canadiennes, et de leur permettre d’accéder à leurs droits humains. Ce projet de cadre n’a pas fait cela, mais a plutôt soulevé des inquiétudes quant au fait que le droit ne sera pas maintenu, protégé ou articulé conformément aux normes internationales. Ce projet de cadre de mise en œuvre manque de détails sur la manière dont le gouvernement résoudra les problèmes de longue date liés aux “ droits procéduraux”. Il s’agit notamment des limites de “ l’accès à la justice” et des obstacles auxquels un individu est confronté lorsqu’il tente de prévenir ou de faire cesser une atteinte à l’environnement en vertu de la LCPE. Le droit à un environnement sain est un droit humain fondamental. Dans sa forme actuelle, le cadre risque de reléguer ce droit à un objectif aspirationnel ».

Concernant le plan de priorités pour la réglementation des produits chimiques :

Cassie Barker, gestionnaire principale du programme Toxiques chez Environmental Defence, a déclaré :
« Ces nouveaux outils de la LCPE doivent aller plus loin et agir plus rapidement pour prioriser la santé humaine et environnementale. Nous sommes heureux d’entendre le ministre réitérer l’importance de s’attaquer aux produits chimiques toxiques dans les plastiques, et de voir l’engagement du Canada à éliminer progressivement les produits chimiques PFAS, ces “produits chimiques éternels”. Cependant, le plan de priorités ne comprend qu’une poignée de substances au milieu d’une mer de produits toxiques, et le gouvernement semble traîner les pieds pour établir la liste de surveillance des produits chimiques requise par les amendements législatifs adoptés il y a plus d’un an. Cette crise mondiale de pollution exige un leadership audacieux du gouvernement fédéral. Les milliers de produits chimiques toxiques cachés dans les plastiques, les appareils électroniques et d’autres produits du quotidien — et l’industrie qui les y place — doivent être arrêtés. »

Jennifer Beeman, coordonnatrice programmes et défense des droits chez Action cancer du sein du Québec, a déclaré :
« Pendant ce Mois de la sensibilisation au cancer du sein, il est important de souligner le lien avéré entre l’exposition à des produits chimiques toxiques couramment utilisés et l’augmentation des risques de cancer du sein, ainsi qu’une gamme d’autres cancers et effets néfastes sur la santé, en particulier pour les communautés historiquement vulnérabilisées. Cet ensemble d’outils de la LCPE doit être aussi fort que possible, et les cibles et échéanciers doivent être beaucoup plus ambitieux. L’application rigoureuse de ces outils est essentielle pour faire avancer de manière significative le droit à un environnement sain et commencer à réduire les expositions toxiques généralisées et leurs graves conséquences sur la santé. »

Concernant les produits chimiques préoccupants dans les plastiques :

Karen Wirsig, gestionnaire principale du programme Plastiques chez Environmental Defence, a déclaré :
« Les plastiques sont une véritable soupe de produits chimiques toxiques, et le Canada doit intensifier ses efforts pour protéger les gens et l’environnement contre ceux-ci. Nous sommes satisfaits que le gouvernement ait identifié un certain nombre de substances dangereuses présentes dans les plastiques comme priorités pour la protection de la santé humaine et de l’environnement. Nous devons voir des mesures réglementaires sur ces produits chimiques le plus rapidement possible. Cependant, le gouvernement doit également élargir sa liste de priorités, qui ne fait qu’effleurer la surface des milliers de produits chimiques préoccupants présents dans les plastiques. Ces substances dangereuses entrent en contact avec notre nourriture et nos corps chaque jour, à travers des produits comme les emballages, les vêtements et les jouets, mettant ainsi la santé des gens au Canada en danger. Il n’y a pas de temps à perdre. »

Contexte

Le droit à un environnement sain

Le projet de loi S-5 a légiféré pour la première fois le droit à un environnement sain dans la législation fédérale et a imposé au ministre de l’Environnement de développer un cadre de mise en œuvre de ce nouveau droit en vertu de la LCPE d’ici juin 2025. Ce cadre définit trois principes fondamentaux : la justice environnementale, la non-régression et l’équité intergénérationnelle. Il comprend également des descriptions des facteurs pertinents à considérer dans l’interprétation et l’application du droit, incluant des aspects scientifiques, environnementaux, sanitaires, sociaux et économiques, y compris les bénéfices économiques des actions entreprises et les coûts pour les populations en l’absence de mesures. Des points de décision pertinents dans les programmes et processus de la LCPE sont identifiés.

Cependant, ce cadre ne reconnaît pas les obligations du Canada en matière de droits humains et ne fournit pas suffisamment de directives pour appuyer une mise en œuvre significative du droit à un environnement sain. Les groupes demandent que le cadre s’aligne explicitement sur la résolution des Nations Unies reconnaissant le droit à un environnement sain, une résolution soutenue par le Canada, et qu’il inclue des directives pour intégrer une approche fondée sur les droits dans les processus décisionnels de la LCPE.

Plan de priorités pour la gestion des produits chimiques

Par ailleurs, la nouvelle exigence d’un plan de priorités pour la LCPE apportera la transparence et la prévisibilité tant attendues à la gestion des produits chimiques sous cette loi. Un plan de priorités complet et bien financé est nécessaire pour protéger contre les menaces de pollution dangereuses.

De plus, il n’y a aucune indication que le plan de priorités proposé ait été élaboré en tenant compte du droit à un environnement sain, ou de la manière dont ce droit sera pris en considération lors des mises à jour futures du plan. Les groupes demandent que le plan soit révisé et mis à jour en tenant compte du cadre de mise en œuvre à venir pour le droit à un environnement sain, ainsi que de la future stratégie nationale sur le racisme environnemental et la justice environnementale.

Enfin, le plan préliminaire n’identifie que 15 substances individuelles et 18 groupes de substances, pour un total d’environ 520 substances individuelles. On ne sait pas combien des quelque 25 000 produits chimiques que Santé Canada a identifiés comme priorités dans les documents de l’approche scientifique d’août 2024 sont inclus dans le plan de priorités. Les groupes exhortent à une action plus rapide pour réglementer les produits chimiques PFAS et d’autres substances toxiques dont les évaluations sont déjà en cours, ainsi qu’à une augmentation radicale du plan de priorités pour traiter un nombre bien plus important de produits chimiques face à la crise mondiale de la pollution. Plusieurs substances dangereuses utilisées dans les plastiques sont incluses dans la liste provisoire des priorités pour évaluation. Les groupes exhortent le gouvernement à agir sur les produits chimiques et polymères préoccupants présents dans les plastiques et à soutenir les dispositions connexes du traité mondial visant à mettre fin à la pollution plastique, actuellement en négociation. Des sondages récents (en anglais) ont montré que quatre personnes sur cinq souhaitent que le gouvernement les protège contre des produits chimiques dangereux tels que les PFAS.

Les nouvelles réglementations nécessaires pour rendre opérationnels les amendements de 2023 à la LCPE, qui ciblent les produits chimiques les plus à risque, n’ont pas encore été publiées. Sans ces réglementations en place, il est peu probable que les substances posant le plus grand risque pour la santé humaine soient interdites.

Liste de surveillance

En dernier lieu, les amendements de 2023 à la LCPE obligent le ministre à établir une « liste de surveillance » afin d’identifier les substances présentant des propriétés dangereuses, mais qui ne sont pas encore classées comme « toxiques » selon la législation canadienne. Le ministre a annoncé la publication prochaine d’une « approche proposée » pour l’établissement de cette liste de surveillance. Les groupes pressent le gouvernement de faire avancer la publication de la liste réelle afin d’éviter que des substances potentiellement toxiques ne remplacent des produits chimiques similaires qui ont déjà été interdits.

 

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