Bien que nous devions garder nos distances, il nous faut plus que jamais rester unis. (Photo: Jordan Lye)

Les temps sont durs, surtout pour ceux qui ne peuvent pas compter sur un toit sûr, de la nourriture et d’autres services essentiels. Durs aussi pour tous les intervenants en première ligne. C’est pourquoi, bien que nous devions garder nos distances, il nous faut plus que jamais rester unis.

Dans l’adversité, la compassion et la sagesse sauront faire émerger le bon côté des choses. Depuis quelques années, on assiste heureusement à une prise de conscience de plus en plus grande de la nécessité de combiner la science et le savoir autochtone traditionnel pour avoir une vision plus large de notre place dans la nature et pour trouver de meilleures façons d’en respecter les limites.

Depuis des millénaires, les peuples proches de la nature ont souvent une bonne compréhension du fonctionnement des écosystèmes et de l’importance de tous les maillons des réseaux interreliés dont nous faisons partie. La science occidentale a tendance à être réductionniste, à étudier les choses en vase clos, souvent dans des conditions contrôlées ou artificielles comme les ballons de chimie et les laboratoires de culture.

Cela peut entraîner des conséquences imprévues. Par exemple, Paul Mueller a reçu le prix Nobel de physiologie ou de médecine en 1948 pour sa mise au point du DDT. Bien que ce puissant pesticide ait permis d’endiguer efficacement le paludisme et d’autres maladies transmises par les insectes, les scientifiques n’en ont découvert toutes les facettes qu’en 1962, lorsque Rachel Carson a tiré la sonnette d’alarme dans son livre Printemps silencieux. L’épandage sans discernement du DDT a permis d’exterminer des « parasites », mais il a aussi entraîné sa bioaccumulation dans la chaîne alimentaire, causant la mort d’oiseaux et sa progression chez d’autres animaux et même chez les humains.

Les forêts sont considérées comme une ressource à exploiter, plutôt que comme un réseau d’organismes qui procurent de précieux services et avantages aux humains.

Cette approche réductionniste est présente dans une grande partie de l’économie occidentale. Les forêts sont considérées comme une ressource à exploiter, plutôt que comme un réseau d’organismes qui procurent de précieux services et avantages aux humains, notamment la propreté de l’eau et de l’air, la régulation climatique et même la prévention des maladies.

Comme je l’écrivais dans une chronique précédente, la destruction des forêts et des habitats est en partie responsable du fait que l’éclosion de 60 pour cent des maladies infectieuses depuis 1940 (y compris le VIH, l’Ebola, le Zika et certains coronavirus) provient d’animaux, dont les deux tiers sont sauvages, les autres étant des animaux de compagnie et du bétail.

La recherche tend de plus en plus à démontrer l’importance d’adopter une approche holistique ou systémique de la science et de l’économie, et de collaborer avec les peuples autochtones qui possèdent une connaissance du terrain fondée sur des milliers d’années d’observation et d’expérience.

Pouvons-nous mettre à profit cette approche pour trouver une meilleure issue à la crise que nous traversons ? J’en suis persuadé.

En regardant autour de nous, nous constatons que la plupart des gens se soucient des autres et veulent poser les bons gestes. L’altruisme se propage plus vite que n’importe quel virus. Or, l’altruisme n’est rien d’autre que la prise de conscience que nous sommes tous interreliés et en relation étroite avec la nature.

Nous voyons des gens exposés en première ligne — dans les services de santé et d’urgence, dans les épiceries et les industries alimentaires — qui s’investissent sans compter pour que la plupart d’entre nous soient bien nourris et en bonne santé.

Au Canada, nous avons la chance d’avoir des dirigeants à tous les paliers de gouvernement et dans le système de santé qui nous tiennent informés et font tout ce qu’ils peuvent pour nous aider à traverser cette épreuve.

La plupart des gens sont prêts à accepter les restrictions nécessaires pour surmonter cette épreuve. Nombreux sont ceux qui se dévouent pour aider leurs voisins dans le besoin. Les gens sortent sur leur balcon ou dans leur cour pour chanter ou saluer ceux et celles qui font des efforts extraordinaires pour que les réseaux de la santé et de l’alimentation tiennent le coup.

En d’autres termes, il y a dans l’ensemble plus de bon que de mauvais chez les gens. Cela devrait nous redonner espoir.

En d’autres termes, il y a dans l’ensemble plus de bon que de mauvais chez les gens. Cela devrait nous redonner espoir.

Bien sûr, il y en a qui font preuve d’égoïsme, qui affichent une ignorance qui les pousse à faire fi de tout ce qui ne sert pas leur intérêt immédiat. Malheureusement, certains d’entre eux sont en position de pouvoir et font tout pour nous confiner sur le même chemin étroit et dangereux. Il semble d’ailleurs que des discussions sont en cours pour renflouer des industries qui auraient dû être mises sur la voie de garage depuis longtemps.

Nous faisons face à une tempête parfaite provoquée par la COVID-19, les perturbations climatiques et la chute des prix du pétrole, provoquée par un bras de fer entre la Russie et l’Arabie saoudite. Cette crise révèle au grand jour les failles de nos systèmes, qui ont déjà largement dépassé leur date de péremption.

Plus que jamais, nous devons prendre soin de nous-mêmes et des autres pour mettre l’humanité sur un meilleur cap. Si nous agissons tous ensemble, ça va bien aller.

Traduction : Monique Joly et Michel Lopez