L’hydrogène a de nombreuses applications, notamment le transport énergivore de marchandises sur de longues distances ainsi que l’exploitation minière et les processus industriels, et il sera probablement un élément clé dans un avenir décarboné. Toutefois, nous devons faire en sorte que toutes les étapes ou presque soient écologiques (Photo : Jason Lawrence sur Flickr)

Au début du siècle, l’hydrogène était en vogue, surtout en Colombie-Britannique. Nous testions des bus à pile à hydrogène. Le premier ministre de l’époque, Gordon Campbell, avait promis une « autoroute de l’hydrogène » avec une série de stations de ravitaillement entre Vancouver, Victoria et Whistler, qui pourrait s’étendre à la Californie en 2010, afin de permettre le transport par bus à zéro émission.

Aucune autoroute de l’hydrogène n’a encore vu le jour. Que s’est-il passé et pourquoi l’hydrogène fait-il de nouveau l’objet des médias?

Cela est en grande partie dû à la manière dont l’hydrogène est produit et utilisé comme carburant ou comme « vecteur » d’énergie. Bien qu’il s’agisse de l’élément le plus simple et le plus abondant de l’univers, on ne le trouve sur Terre que combiné à d’autres éléments. On doit donc l’extraire d’autres sources comme l’eau (H2O = deux parts d’hydrogène, une part d’oxygène) ou le méthane (CH4 = une part de carbone, quatre parts d’hydrogène). En dissociant l’hydrogène de l’eau, on obtient de l’oxygène et en le dissociant du méthane, on obtient du carbone ou du dioxyde de carbone.

La plupart de l’hydrogène commercial est obtenu à partir de combustibles fossiles en utilisant des produits chimiques et de la chaleur, mais l’eau peut être décomposée en hydrogène et en oxygène grâce à des procédés électrolytiques (avec ou sans électricité provenant d’énergies renouvelables). Les chercheurs étudient également les moyens de fractionner l’eau au moyen de lumière ou d’énergie solaire, et d’utiliser des microbes tels que des bactéries et des microalgues pour produire de l’hydrogène.

Malgré les inconvénients de l’hydrogène, l’industrie tend, en raison de sa teneur élevée dans le méthane, à considérer cet élément comme une bouée de sauvetage potentielle et un moyen de paraître « écologique ».

En tant que carburant, l’hydrogène nécessite de nouvelles infrastructures importantes, alors que la recharge des véhicules électriques est réalisable partout où il y a un réseau de distribution électrique. En tant que « vecteur » d’énergie, c’est-à-dire élément utilisé pour stocker ou livrer l’énergie produite à partir de sources primaires, l’hydrogène doit être comprimé ou liquéfié pour être transporté et utilisé, ce qui nécessite de l’énergie.

Malgré les inconvénients de l’hydrogène, l’industrie tend, en raison de sa teneur élevée dans le méthane, à considérer cet élément comme une bouée de sauvetage potentielle et un moyen de paraître « écologique ». Le méthane est un sous-produit de l’extraction du pétrole et du charbon, et le gaz « naturel » est presqu’entièrement constitué de méthane. L’industrie et ses défenseurs ont fait campagne pour convaincre les gouvernements et le public que l’hydrogène dérivé des combustibles fossiles est aussi bon que celui extrait de l’eau à l’aide d’énergies renouvelables, à la condition que le carbone soit retiré et stocké.

Cela a mené à une distinction entre l’hydrogène « brun », « gris », « bleu » et « vert ». L’hydrogène brun est issu du charbon. L’hydrogène gris provient de combustibles fossiles sans capture ni stockage du carbone, ce qui crée des émissions de CO2. L’hydrogène bleu est issu des combustibles fossiles avec capture et stockage du carbone. L’hydrogène vert est dissocié de l’eau à l’aide d’énergies renouvelables.

L’hydrogène gris, obtenu principalement par « vaporeformage du méthane », représente environ 95 % de tout l’hydrogène produit à des fins commerciales dans le monde. Il est peu coûteux et relativement facile à produire et peut utiliser du gaz qui serait autrement gaspillé. Il pourrait devenir bleu si la technologie permettant de stocker les sous-produits du carbone était réalisable et économiquement viable, sans créer de dommages écologiques supplémentaires.

À grande échelle, l’électrolyse, connue sous le nom de « Power-to-gas », désigne le processus par lequel l’électricité produite par des sources renouvelables, comme l’énergie éolienne et solaire, ou par des combustibles fossiles, est convertie en hydrogène gazeux à des fins de transport et de consommation. Si une énergie renouvelable est utilisée, seul de l’oxygène est émis, ce qui rend le procédé écologique.

L’hydrogène vert peut être produit sur le site de production d’électricité renouvelable, ou plus près des utilisations finales grâce à l’infrastructure électrique. Il ne nécessite ni pipelines ni infrastructures de capture du carbone, de sorte que les usines d’électrolyse de l’hydrogène peuvent souvent être construites rapidement et à moindre coût.

L’hydrogène a de nombreuses applications, notamment le transport énergivore de marchandises sur de longues distances ainsi que l’exploitation minière et les processus industriels, et il sera probablement un élément clé dans un avenir décarboné. Toutefois, nous devons changer la dynamique pour que tout ou presque soit écologique.

Même l’hydrogène bleu n’est pas exempt d’émissions, car la capture du carbone ne permet pas d’éliminer totalement les émissions, et celles-ci sont également produites lors de l’extraction, du traitement et du transport des matières premières fossiles.

L’hydrogène gris n’offre aucun avantage sur le plan climatique. L’hydrogène lié à un petit réacteur nucléaire modulaire coûteux et non éprouvé est problématique à bien des égards et ferait grimper les coûts.

L’hydrogène vert peut être produit sur le site de production d’électricité renouvelable, ou plus près des utilisations finales grâce à l’infrastructure électrique. Il ne nécessite ni pipelines ni infrastructures de capture du carbone, de sorte que les usines d’électrolyse de l’hydrogène peuvent souvent être construites rapidement et à moindre coût. Il peut être utilisé pour canaliser de grandes quantités d’énergie renouvelable du secteur de l’électricité vers les secteurs où l’électrification est difficile, comme le transport, le bâtiment et l’industrie. Par ailleurs, l’hydrogène peut stimuler les investissements et la croissance dans le secteur des énergies renouvelables pour l’électrolyse et améliorer les capacités de stockage de l’énergie.

L’hydrogène vert est également un meilleur pari financier. Les coûts de l’hydrogène bleu sont liés aux installations coûteuses de capture du carbone. Selon une analyse du géant du secteur bancaire, Morgan Stanley, l’effondrement des prix de l’énergie éolienne pourrait rendre l’hydrogène vert soutenu par le gouvernement plus compétitif que l’hydrogène gris dépendant des combustibles fossiles d’ici 2023.

La Stratégie canadienne pour l’hydrogène fait d’une « économie de l’hydrogène propre » une « priorité stratégique ». Il est temps de reconnaître notre avantage concurrentiel et de stimuler l’innovation et les investissements dans l’hydrogène vert. L’hydrogène issu des combustibles fossiles est une impasse coûteuse.