Des centaines de manifestants ont été arrêtés lors de l’action de désobéissance civile contre l’oléoduc Keystone XL à la Maison Blanche en 2014. (Photo : Joe Brusky via Flickr)

Cet été, cinq activistes climatiques britanniques ont été condamné.e.s à quatre et cinq ans d’emprisonnement pour avoir pris part à des actions non violentes (article en anglais). Il s’agit de peines nettement plus longues que celles ayant été récemment édictées contre des personnes accusées d’avoir participé à de violentes émeutes à caractère raciste, au Royaume-Uni également : une détention moyenne de deux ans pour certaines, alors que d’autres ont pu éviter complètement l’emprisonnement (source en anglais).

Bien que les activistes climatiques subissent les condamnations les plus longues ayant été édictées au Royaume-Uni dans un contexte de protestations non violentes, ces sanctions s’insèrent dans une tendance mondiale à sévir contre les personnes cherchant à sauver l’humanité des ravages environnementaux, tout en soutenant celles qui en sont la cause (article en anglais).

Le climatologue britannique Bill McGuire a affirmé sur le réseau social X : « Encore une fois, les personnes qui luttent pour sauver le monde se retrouvent en prison, alors que les véritables criminels #climatiques restent libres et sablent le champagne pour célébrer leurs derniers profits colossaux. »

La protestation est un outil puissant.

Souvent sous le prétexte de protéger des « infrastructures essentielles » (des oléoducs, par exemple), on traite en criminelles de nombreuses personnes pour leur défense des systèmes sur lesquels reposent notre existence et notre santé. C’est le cas des Autochtones qui défendent le territoire de Standing Rock aux États-Unis, des Wet’suwet’en au Canada et de San Miguel Ixtahuacán au Guatemala; de Paul Watson, activiste opposé à la chasse à la baleine; ou encore des jeunes comme Greta Thunberg en Europe. Même certain.e.s scientifiques n’y échappent pas (source en anglais). J’ai pu en témoigner personnellement lorsque mon petit-fils a été arrêté pour avoir protesté contre un oléoduc (article en anglais).

La police nationale canadienne, la GRC, a même mis en place un mystérieux « Groupe d’intervention pour la sécurité de la collectivité et de l’industrie », dont la mission est de protéger l’activité industrielle dommageable pour le climat.

Entre-temps, non seulement les industries du gaz, du pétrole et du charbon à la source de la crise climatique jouissent d’une protection du gouvernement, mais en plus, elles empochent d’exorbitantes subventions de sa part, détiennent le pouvoir de modifier et d’assouplir la règlementation grâce au lobbyisme et reçoivent le soutien des gouvernements, des banques et de certains médias, le tout en amassant des profits records.

Pourquoi tant de personnes de différents horizons prennent-elles le risque d’être arrêtées et emprisonnées? C’est parce qu’elles ne peuvent pas faire fi de la montée en flèche des feux de forêt, des sécheresses, des inondations, des vagues de chaleur, du niveau de la mer, des conflits associés au climat, de la perte de la biodiversité et des crises migratoires. Au cours des 13 derniers mois, les températures mondiales ont atteint des sommets records, dépassant les prévisions des climatologues. Comme le souligne The Guardian, le mois de juillet a connu « deux journées consécutives de chaleur dépassant tout ce qui n’avait jamais été enregistré; des niveaux de mercure probablement jamais ressentis en plus de 120 000 ans ».

Si les lois sont injustes ou font la promotion de politiques et de pratiques destructives et inéquitables, un changement s’impose.

La protestation est un outil puissant. En Inde, elle a permis d’en finir avec le règne britannique; en Afrique du Sud, elle a renversé l’apartheid; aux États-Unis, elle a donné lieu à une loi rigoureuse en matière de droits civils. Une étude (en anglais) a démontré qu’avec l’implication d’aussi peu que 3,5 % de la population, le changement serait inévitable.

Les personnes au pouvoir sont toutefois prêtes à aller loin afin de conserver le statu quo, même si les conséquences destructives de ce choix ont clairement été démontrées. Pour résoudre un dossier aussi énorme que celui de la crise climatique, un changement systémique est nécessaire, et celui-ci n’est en aucun cas attrayant pour la classe politique peu imaginative et myope ou pour les dirigeant.e.s d’entreprises motivé.e.s par le profit. Ce changement peut également semer l’inquiétude parmi la population. Mais si nous ne modifions pas nos manières de faire – notamment nos systèmes économiques et nos outils pour mesurer le progrès, tous désuets – un avenir incertain et catastrophique nous attend.

Les lois et les systèmes législatifs sont indispensables à la stabilité sociale. En revanche, si les lois sont injustes ou font la promotion de politiques et de pratiques destructives et inéquitables, un changement s’impose. L’esclavage, l’apartheid et la ségrégation étaient autrefois des pratiques légales dans de nombreux pays. Il n’y a pas si longtemps, l’homosexualité contrevenait à la loi au Canada et ailleurs, tandis que les femmes et les minorités racisées n’étaient légalement pas autorisées à voter.

Parfois, pour qu’un changement s’opère, la protestation devient nécessaire, qu’elle prenne la forme de manifestations dans les rues, de blocage d’activités néfastes ou de boycottage d’industries destructives.

Les gaz à effet de serre, comme le dioxyde de carbone ou le méthane, restent dans l’atmosphère pendant longtemps. Les conséquences ne feront que s’accentuer si nous n’arrêtons pas de polluer maintenant.

Dans le cas des bouleversements climatiques – alimentés par l’utilisation de gaz, de pétrole ou de charbon et par la destruction des forêts ou d’autres espaces verts –, un changement rapide est requis. En effet, nous constatons déjà la dévastation causée par le réchauffement de la planète. Les gaz à effet de serre, comme le dioxyde de carbone ou le méthane, restent dans l’atmosphère pendant longtemps. Les conséquences ne feront que s’accentuer si nous n’arrêtons pas de polluer maintenant.

« Alors que les changements climatiques progressent, chaque décennie devient plus chaude et les répercussions, plus importantes et plus graves. En ce sens, nous nous trouvons déjà en terrain inconnu en matière de climat, et plus le temps avance, plus on s’expose à des risques », a dit Gavin Schmidt, directeur du Goddard Institute for Spaces Studies de la NASA, situé à New York.

Quelle absurdité : alors que les personnes qui luttent pour la population et la planète sont punies, celles qui créent des ravages et menacent la vie sous toutes ses formes non seulement se la coulent douce, mais en plus, elles sont célébrées et soutenues.

Il est grand temps que les choses changent.