
Afin d’éviter la catastrophe, il ne suffit pas de mettre fin à l’ère des énergies fossiles et de protéger les espaces verts; il faut aussi taxer la richesse, sévir contre l’évasion fiscale et instaurer des mesures pour réduire le fossé financier et le pouvoir des entreprises. (Photo : Mike Baumeister via Unsplash)
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi certain.e.s s’opposent aux politiques climatiques sensées? Nous savons que les industries du charbon, du pétrole et du gaz mènent depuis des décennies une campagne de désinformation, et qu’elles occultent des résultats de recherches à leurs propres scientifiques et à d’autres qui ont pourtant bien prédit les conséquences désastreuses de l’usage de leurs produits.
L’histoire ne s’arrête toutefois pas là.
Pour résoudre la crise climatique, il faudrait notamment que les personnes les plus riches modifient leur mode de vie. La plupart – surtout celles pour qui l’accumulation de richesses constitue un jeu, ou un but en soi – ne sont prêtes à sacrifier aucun privilège, même si leurs choix causent de la souffrance.
Les millionnaires et leurs organisations secrètes ont uni leurs forces à celles de l’industrie fossile pour minimiser ou nier les effets d’une planète qui se réchauffe, et essaient de convaincre le public que même les solutions climatiques les plus timides nuiraient aux personnes pauvres.
Pour résoudre la crise climatique, il faudrait notamment que les personnes les plus riches modifient leur mode de vie.
Une nouvelle étude confirme pourtant les conclusions d’autres recherches préalables : les personnes bien nanties contribuent amplement plus aux bouleversements écologiques. Le capitalisme de consommation mondial n’alimente d’ailleurs pas seulement les inégalités; il génère aussi des montagnes de déchets, entraîne l’extinction de nombreux animaux et plantes, contamine l’air, l’eau et la terre, et accélère les problèmes climatiques.
Cette recherche, publiée dans Nature Climate Change, a découvert que les 10 % les plus riches du monde (les personnes qui gagnent plus de 67 000 $ par an, ce qui inclut beaucoup de gens, dont moi), étaient responsables des deux tiers du réchauffement entre 1990 et 2000. Les régions les plus appauvries, où la population a très peu contribué à l’urgence climatique, se retrouvent toutefois les plus gravement affectées, que ce soit par la chaleur excessive, la sécheresse, les pénuries d’eau ou des rendements de cultures affaiblis.
Les gens tout en haut de la chaîne financière portent encore plus de responsabilités. En effet, le 1 % des plus riches est imputable de 20 % du réchauffement planétaire, tandis que le 0,1 % des plus riches en est la cause à hauteur de 8 %. « Nous avons découvert que les 10 % les plus riches contribuent 6,5 fois plus au réchauffement mondial que la moyenne, alors que les 1 % et 0,1 % au sommet de l’échelle y contribuent respectivement 20 et 76 fois plus », énonce le rapport.
En effet, le 1 % des plus riches est imputable de 20 % du réchauffement planétaire, tandis que le 0,1 % des plus riches en est la cause à hauteur de 8 %.
« Au cours des vingt dernières années, les phénomènes extrêmes imputables aux changements climatiques ont engendré des dommages équivalents à 143 milliards de dollars par an », selon le rapport. Qui paie pour ces dégâts? Certainement pas les ultrariches, même si leur fortune a augmenté de manière ahurissante dans les dernières années.
Ainsi, selon une étude d’Oxfam, « la fortune des milliardaires a augmenté de 2,8 billions de dollars en 2024 seulement, ce qui représente près de 7,9 milliards de dollars par jour, un rythme trois fois plus rapide que l’année précédente. Près de quatre nouvelles personnes millionnaires apparaissent en moyenne chaque semaine. Pendant ce temps, le nombre de gens qui vivent en situation de pauvreté demeure presque inchangé depuis 1990, selon les données de la Banque mondiale. »
Localement, les millionnaires ont eu aussi grandement profité de cette situation, selon Oxfam : « Au Canada, la richesse des millionnaires a augmenté de 113,4 milliards de dollars en 2024. » Depuis 2019, cette fortune s’est accrue de 190,3 milliards de dollars, et une nouvelle personne millionnaire canadienne apparaît toutes les douze semaines, tandis que 3,8 millions de membres de notre population vivent sous le seuil de la pauvreté. »
Oxfam ajoute : « Les avoirs des dix hommes les plus riches du monde se sont accrus en moyenne de près 140 millions de dollars par jour. Et même s’ils perdaient 99 % de leur fortune du jour au lendemain, ceux-ci demeureraient millionnaires. Du côté canadien, la richesse millionnaire totale s’élève à 496,7 milliards de dollars, et est répartie entre 65 personnes. » En grande partie, cette fortune « provient d’héritage, de pouvoir de monopole ou de liens de connivence ».
Notre structure économique actuelle s’avère plutôt récente, mais elle est déjà dépassée. Nous pouvons la changer, et il en va de notre devoir.
Les personnes derrière le rapport de Nature Climate Change espèrent que leur recherche influencera les politiques, particulièrement celles qui portent sur l’aide financière climatique aux pays pauvres, et qu’elle augmentera le taux d’acceptation de l’action climatique.
Le problème s’avère toutefois plus vaste. En effet, les inégalités de revenu extrêmes, la pollution, l’extinction des espèces et le chaos climatique sont autant de symptômes d’un système malade, qui ne sert pas les intérêts de la majorité.
La lutte est difficile dans un contexte où des individus possèdent suffisamment d’argent pour influencer la classe politique et les médias, alors que d’autres peinent à gagner de quoi vivre et survivre face à des phénomènes météorologiques extrêmes, entre autres conséquences de la pollution et de la situation climatique.
Afin d’éviter la catastrophe, il ne suffit pas de mettre fin à l’ère des énergies fossiles et de protéger les espaces verts; il faut aussi taxer la richesse, sévir contre l’évasion fiscale et instaurer des mesures pour réduire le fossé financier et le pouvoir des entreprises. Notre structure économique actuelle s’avère plutôt récente, mais elle est déjà dépassée. Nous pouvons la changer, et il en va de notre devoir.