
La ville de L.A. n’est ni le premier ni le seul endroit ayant été frappé par une catastrophe climatique, et ça ne sera certainement pas le dernier. (Photo : Cal Fire via Flickr)
Tragiques et terrifiants, les énormes brasiers qui font rage dans la région de Los Angeles ont détruit des milliers de domiciles, forcé au moins 100 000 personnes à évacuer ou à se diriger vers des refuges d’urgence et causé la mort de dizaines d’autres. Il reste cependant une consolation : le grand nombre de personnes et d’organisations de tout horizon qui ont répondu présentes pour apporter de l’aide – des fournisseurs d’aide alimentaire aux pompier.ère.s provenant entre autres des États-Unis, du Mexique et du Canada. Lorsque frappe une tragédie, les âmes charitables viennent à la rescousse.
Ces feux de forêt étaient prévisibles, ce qui rajoute une couche au drame. Ils sont principalement le résultat d’un double choc d’origine humaine : les changements climatiques et l’étalement urbain (source en anglais). À Los Angeles, près de 80 % du territoire est destiné aux maisons individuelles. Ainsi, au lieu de se densifier, la ville a étendu ses constructions aux collines environnantes.
Depuis des dizaines d’années, les quartiers périphériques de L.A. constituent des foyers d’incendie. Mike Davis, activiste et théoricien en matière d’urbanisme aujourd’hui décédé, les surnommait d’ailleurs « les banlieues de la ceinture de feu », il y a de cela 30 ans (article en anglais). Après chaque incendie, les communautés étaient reconstruites, parfois selon des normes et des codes du bâtiment assouplis afin de promouvoir la reconstruction, notamment en matière de pression hydraulique, de largeur des routes d’accès et même de code de prévention des incendies. Mais cette fois-ci, les incendies sont d’une gravité sans précédent, alimentés par des températures plus chaudes et sèches sur des périodes prolongées, l’accumulation de végétation inflammable et les vents forts et secs de Santa Ana.
La ville de L.A. n’est ni le premier ni le seul endroit ayant été frappé par une catastrophe climatique, et ça ne sera certainement pas le dernier.
Le développement des zones suburbaines a également impliqué la destruction des systèmes naturels. Constituant une grande partie du paysage d’origine, les arbustes, les buissons et les petits arbres indigènes suivent des cycles de brûlage naturels ou alimentés par les peuples autochtones qui, depuis des siècles, pratiquent le brûlage contrôlé. Ces feux de moindre dimension contribuent à la régénération des sols et à la dispersion des semences d’arbres, aident les petits animaux et préviennent l’accumulation de végétation inflammable.
À présent, les collines sont nues : les amas de végétation morte brûlent et déclenchent de plus grands feux, créant les conditions pour davantage d’inondations et de glissements de terrain.
La ville de L.A. n’est ni le premier ni le seul endroit ayant été frappé par une catastrophe climatique, et ça ne sera certainement pas le dernier. Ces événements se multiplient à l’échelle planétaire à mesure qu’augmente notre consommation de pétrole, de gaz et de charbon, faisant grimper en flèche les émissions de GES et les températures moyennes mondiales.
Selon une étude récente (en anglais), depuis le milieu du 20e siècle, ces « coups de fouet climatiques » (“whiplash”), soit une alternance rapide entre des périodes très humides et des périodes très sèches, ont augmenté de 31 % à 66 % presque partout sur la planète. Avec le réchauffement de l’atmosphère, on s’attend à ce qu’ils continuent de se multiplier de façon exponentielle : une atmosphère plus chaude favorise la sécheresse, parce qu’elle absorbe et retient davantage l’humidité des cours d’eau, de la terre et de la végétation. L’eau ainsi accumulée se déverse ensuite sous la forme de pluies torrentielles, sources d’inondations.
Ces événements se multiplient à l’échelle planétaire à mesure qu’augmente notre consommation de pétrole, de gaz et de charbon, faisant grimper en flèche les émissions de GES et les températures moyennes mondiales.
Comme le souligne The Guardian, les incendies de L.A. mettent en lumière l’effet coup de fouet : « Les années de sécheresse ont été suivies par un hiver neigeux et pluvieux sans précédent, donnant ainsi lieu à une abondance de buissons et d’herbes. Puis, un été d’une chaleur record en 2024 et un début de saison des pluies d’une sécheresse jamais vue ont asséché la végétation et favorisé les terribles feux de forêt ».
The Guardian rappelle également la sécheresse ayant sévi de 2020 à 2023 en Afrique de l’Est – laquelle avait généré une pénurie alimentaire – et qui avait été suivie plus tard en 2023 par des pluies torrentielles, causant la destruction des récoltes et le déplacement de plus de deux millions de personnes. « Au cours des dernières années, les coups de fouet climatiques ont été associés à des inondations désastreuses en Afrique de l’Est, au Pakistan et en Australie et à une aggravation des vagues de chaleur en Europe et en Chine. »
Selon un rapport sur ce type d’événements climatiques publié dans la revue Nature Reviews Earth and Environment, « un basculement de plus en plus rapide et important entre des conditions extrêmement humides et d’autres, extrêmement sèches, pourrait représenter un défi non seulement pour les infrastructures de gestion de l’eau et des inondations, mais également les systèmes de gestion des catastrophes, d’intervention d’urgence et de santé publique conçus pour les extrêmes propres au vingtième siècle ».
Il nous faut finalement apprendre à nous adapter aux conséquences des changements climatiques, en nous préparant mieux et en faisant plus attention à la nature.
Les catastrophes comme celle des feux de forêt de L.A. sont extrêmement coûteuses en matière de vies, de biens, d’infrastructures, d’interventions et de reconstruction, mais elles sont également évitables jusqu’à un certain point. Nous retardons depuis si longtemps la transition du gaz, du pétrole et du charbon vers des énergies renouvelables, au point que nous avons atteint un stade de crise : de nombreuses autres conséquences climatiques horribles sont maintenant inéluctables – et bien plus imprévisibles.
Il existe toutefois des manières d’éviter ou de réduire les répercussions de certaines des menaces auxquelles nous faisons face. En premier lieu, nous devons laisser les combustibles fossiles sous terre. Nous devons également concevoir des habitations humaines de manière durable, éloignées des plaines inondables et des zones propices aux glissements ou aux incendies. Nous devons également protéger les aires naturelles : elles stockent du carbone, préviennent les inondations et l’érosion, conservent les réserves d’eau et nous rappellent que nous faisons, nous aussi, partie de la trame de la vie.
Il nous faut finalement apprendre à nous adapter aux conséquences des changements climatiques, en nous préparant mieux et en faisant plus attention à la nature. Nous ne pouvons simplement pas laisser l’industrie des combustibles fossiles et ses laquais de la classe médiatique et politique dicter nos pas alors que notre santé et notre survie sont menacées.