Sous le capitalisme de consommation mondial, les oligarques, les milliardaires et les PDG, soutenus par les responsables politiques qu’ils financent, se partagent le pouvoir et la richesse. La 29e Conférence des États signataires pour la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP29), tenue à Bakou, en Azerbaïdjan, en novembre, ainsi que la COP16 sur la biodiversité, à Cali, en Colombie, le prouve bien.
Près de 1 800 lobbyistes des industries du pétrole, du gaz et du charbon ont participé à la COP29. Ce nombre est plus élevé que les délégations de tous les pays sauf trois (le pays hôte, le Brésil, qui accueillera la COP29 l’année prochaine, et la Turquie). Comme le rapporte le quotidien le Guardian, « les dix nations les plus vulnérables au changement climatique ne comptent que 1 033 délégué.e.s aux négociations ». De nombreux pays, dont le Canada, envoient des délégations composées de représentant.e.s de l’industrie, qui bénéficient ainsi d’un accès privilégié aux négociations diplomatiques.
L’Azerbaïdjan est un pays producteur de pétrole. À la veille des négociations, Elnur Soltanov, administrateur général de la COP29, vice-ministre de l’Énergie du pays et ex-cadre de l’industrie pétrolière, a été filmé alors qu’il acceptait de faciliter des transactions pétrolières pendant les négociations.
Sous le capitalisme de consommation mondial, les oligarques, les milliardaires et les PDG, soutenus par les responsables politiques qu’ils financent, se partagent le pouvoir et la richesse.
L’année précédente, Sultan Ahmed Al Jaber, administrateur général de la compagnie pétrolière nationale des Émirats arabes unis (ADNOC), a présidé la Conférence sur le climat organisée dans ce même pays. Des fuites de documents ont révélé que les Émirats arabes unis prévoyaient promouvoir des accords avec d’autres pays pour leurs entreprises pétrolières et gazières nationales dans le cadre de réunions.
Le secteur de l’agriculture industrielle a aussi envoyé des centaines de lobbyistes à la conférence sur le climat de cette année. De même, selon le Guardian, la conférence sur la biodiversité a attiré 1 261 lobbyistes provenant du milieu « pharmaceutique, pétrolier et gazier, agrochimique, agroalimentaire et technologique ».
Souvent, le lobby industriel prône des solutions techniques coûteuses et peu éprouvées. Ainsi, il poursuit, voire renforce le cours normal des affaires (moyennant un important financement public). En revanche, le lobby s’oppose aux solutions les plus efficaces. La conférence sur la biodiversité s’est achevée le 2 novembre avec de nombreuses questions en suspens.
Les conclusions de la Conférence sur le climat sont à peine meilleures. Selon les dires de George Monbiot du Guardian, les gouvernements semblaient « disposés à envisager n’importe quelles politiques, sauf celles susceptibles de porter des fruits qui exigeraient de délaisser les combustibles fossiles et de mettre fin à la majorité des élevages de bétail ». Au lieu de cela, l’auteur a remarqué que le principal sujet de discussion portait sur les marchés du carbone, « un effort futile et sans espoir pour contrebalancer par des réductions d’émissions contemporaines l’équivalent de centaines de millions d’années de carbone ramené à la surface ».
Nous n’atteignons déjà pas les objectifs de réduction des émissions négociés au cours des conférences sur le climat des 29 dernières années. Selon les scientifiques, ces objectifs sont indispensables pour éviter un réchauffement catastrophique.
Cette année a marqué la 29e Conférence mondiale sur le climat et la COP16 sur la biodiversité. Malgré certains progrès notables, la production de pétrole, de gaz et de charbon se poursuit, de même que les émissions de gaz à effet de serre. De la même façon, l’agriculture industrielle néfaste prédomine toujours dans les systèmes alimentaires. Si nous avions pris au sérieux les crises liées au climat et à la biodiversité dès leur découverte voilà plusieurs décennies, nous aurions pu opérer une transition graduelle et ordonnée vers de meilleurs moyens d’alimenter les sociétés en énergie et en nourriture.
À l’heure actuelle, la situation est critique. Bien que la croissance des énergies renouvelables crée des emplois et stimule les économies, le désastre accéléré demeure inévitable si nous ne changeons pas rapidement nos modes de vie et nos modèles économiques. Nous n’atteignons déjà pas les objectifs de réduction des émissions négociés au cours des conférences sur le climat des 29 dernières années. Selon les scientifiques, ces objectifs sont indispensables pour éviter un réchauffement catastrophique. De plus, l’hyperconsommation nous décime à force de pollution, d’épuisement des ressources, de destruction de la nature et de dérèglement du climat.
Le secteur industriel, ses PDG et ses propriétaires milliardaires ne se contentent pas d’accaparer les conférences où se négocient les solutions et les accords. Ce groupe séduit également les responsables politiques et les gouvernements. Peu de ces derniers détiennent des connaissances sur le climat, la physique, la nature ou la science. Leur seul intérêt, c’est le pouvoir et le profit.
Nous devons nous exprimer, contester, nous éduquer individuellement et collectivement, et participer à la vie politique.
Le résultat : même les responsables politiques doté.e.s d’une certaine compréhension du réchauffement climatique et de l’appauvrissement de la biodiversité ne considèrent pas l’urgence de ces problèmes. Pire encore, plusieurs nient ou ignorent complètement les crises tout en propageant les messages et la désinformation de l’industrie des combustibles fossiles. Certain.e.s, y compris au Canada, font campagne contre des solutions efficaces, bien que limitées, comme la tarification du carbone.
Nous ne pouvons pas laisser notre avenir entre les mains des gouvernements. Ce qui leur incombe doit être guidé par nos préoccupations plutôt que par celles des lobbyistes de l’industrie, des PDG et des milliardaires. Nous, qui vivons dans des pays démocratiques, portons une responsabilité accrue. Nous devons nous exprimer, contester, nous éduquer individuellement et collectivement, et participer à la vie politique.
Si nous tenons vraiment à notre avenir et à un avenir climatique sans risque pour nos enfants, nos petits-enfants et les générations à venir, nous devons prendre position. Si nous nous soucions de la nature à laquelle nous appartenons et dont nous dépendons pour notre survie, nous devons briser le silence.
Le temps presse.