Nous sommes pris dans un cercle vicieux. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre continuent d’augmenter, ce qui provoque une augmentation des catastrophes climatiques et des variations de température. Les températures anormalement chaudes dans certains endroits et anormalement froides dans d’autres incitent les gens à recourir davantage au chauffage et à la climatisation, ce qui cause plus d’émissions…
Selon un bilan statistique de la société pétrolière et gazière BP, les émissions de carbone ont augmenté de deux pour cent en 2018, un rythme supérieur à tout autre depuis 2011, en raison surtout d’une demande plus élevée que le déploiement d’énergies renouvelables.
Une grande partie de cette hausse est attribuable à la Chine, à l’Inde et aux États-Unis. Aux É.-U., on a assisté à une hausse de l’utilisation de l’énergie industrielle, mais également à une hausse de la demande générale, le pays ayant connu un nombre record de jours plus froids et plus chauds que la moyenne depuis les années 1950. Selon le rapport, la situation aurait été pire sans la « croissance exceptionnelle » des énergies renouvelables — 14,5 pour cent l’an dernier — et une augmentation modeste de l’utilisation des véhicules électriques. Il faudrait toutefois que les énergies renouvelables augmentent beaucoup plus vite pour remplacer le charbon et autres combustibles fossiles.
Nous figurons parmi les plus grands émetteurs par habitant. Aussi, nous pouvons et devons faire notre part pour aider le monde à éviter le chaos climatique.
Le Canada se réchauffe à un rythme deux fois plus rapide que la moyenne mondiale — surtout dans le Nord ! Or, des années d’inaction et d’obstruction politique font en sorte qu’il nous sera difficile de respecter nos engagements dans le cadre de l’Accord de Paris. Nous figurons parmi les plus grands émetteurs par habitant. Aussi, nous pouvons et devons faire notre part pour aider le monde à éviter le chaos climatique. Il existe des moyens d’y arriver, des solutions émergentes et multiples. Il ne manque que la volonté politique.
Spencer Dale, économiste principal pour le groupe BP, a déclaré que la transition vers des systèmes énergétiques faibles en carbone passe par la transformation de la production d’électricité, « qui constitue la source d’émissions de carbone la plus importante du secteur énergétique et le secteur le plus prometteur des 20 prochaines années en matière de réduction des émissions de carbone ».
Un rapport de la Fondation David Suzuki dévoilé lors d’une récente conférence internationale sur les énergies propres tenue à Vancouver présente dix stratégies éprouvées qui permettraient au Canada de s’approcher du zéro émission d’ici le milieu du siècle. Un ménage dans l’industrie de l’électricité, l’électrification des transports et des entreprises ainsi qu’une utilisation judicieuse de l’énergie nous permettraient d’éviter les pires catastrophes climatiques, de réduire la pollution et d’ouvrir la voie à de nouvelles perspectives économiques.
Objectif zéro-émission est le premier rapport du programme Clean Power Pathways, fruit d’une collaboration entre la Fondation et des chercheurs des universités de Victoria et Regina.
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat soutient qu’il faut réduire à zéro les émissions de CO2 d’ici 2050 pour éviter une hausse des températures de plus de 1,5 oC. Le rapport de BP et Zeroing in on Emissions en concluent qu’il nous faut accélérer le développement et le déploiement des énergies propres, en particulier dans le domaine de la production d’électricité. BP favorise la mise en place de solutions aux énergies fossiles, comme la transition du charbon vers le gaz naturel, ainsi que de technologies comme la capture et le stockage du carbone. La Fondation considère plutôt que l’efficacité énergétique et le recours aux énergies renouvelables nous permettront d’atteindre cet objectif plus rapidement et à un coût moindre, bien que la capture du carbone demeure nécessaire.
Le Canada a une longueur d’avance. Nous produisons déjà une quantité considérable d’énergie grâce à l’hydroélectricité, l’éolien et le solaire, mais nous n’exploitons pas encore toutes les options possibles. La Saskatchewan, qui a le potentiel d’énergie éolienne et solaire le plus grand au Canada, a dépensé 1,5 milliard de dollars en captage et en stockage de carbone pour continuer à brûler du charbon, tout en enregistrant de piètres résultats sur le plan de l’économie et de la santé.
Nous produisons déjà une quantité considérable d’énergie grâce à l’hydroélectricité, l’éolien et le solaire, mais nous n’exploitons pas encore toutes les options possibles.
Une intensification de l’électrification et du déploiement des énergies renouvelables exige des investissements dans le stockage de l’énergie, des réseaux intelligents et de meilleurs systèmes de transport et de distribution. Nous pouvons même utiliser les barrages hydroélectriques et les réservoirs pour stocker de l’énergie propre.
L’énergie distribuée à l’aide de technologies comme les capteurs solaires de toiture et le stockage en batteries pour les résidences et les entreprises peut favoriser une indépendance énergétique et réduire le recours aux combustibles polluants comme le diesel dans les collectivités éloignées. Parmi les autres solutions, citons : l’efficacité énergétique, la conception de quartiers résidentiels plus denses, l’uniformisation des règles du jeu grâce à l’augmentation constante du prix du carbone pour stimuler l’innovation et les technologies propres ; le soutien aux travailleurs et aux collectivités vulnérables pendant la transition, et l’abandon de notre obsession pour la croissance à tout prix en faveur du bien-être.
Il existe d’autres possibilités en agriculture, en gestion des déchets et dans le changement de l’affectation des sols et de la foresterie. Celles-ci n’entraient toutefois pas dans le cadre du rapport de la Fondation.
Il nous reste peu de temps pour maîtriser les émissions avant d’emmagasiner assez de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère pour faire grimper les températures à des niveaux catastrophiques. Même les sociétés pétrolières le savent. Les solutions sont à notre portée. Il ne nous manque que la volonté de les mettre en application.
Traduction : Monique Joly et Michel Lopez