Lors de sa récente campagne électorale en Colombie-Britannique, le chef du Parti conservateur, John Rustad, s’est engagé à assurer le retour des pailles, des ustensiles et des sacs en plastique. Voilà une question qui occupe trop le discours politique.
Imaginez un peu la scène : alors que vous savez que le monde est étouffé par la pollution plastique, vous paniquez parce que vous ne savez pas comment boire avec une paille réutilisable ou faite en carton, voire sans paille du tout!
Le plastique pollue la terre, l’eau et l’air. Il tue les oiseaux et la vie aquatique en plus de causer des problèmes à la santé humaine. On produit environ 52 millions de tonnes de pollution plastique chaque année, et ce, sans compter le plastique recyclé ou dirigé vers les décharges et les incinérateurs. En fait, notre production de plastique totale avoisine 460 millions de tonnes par an. Et si la tendance se maintient, ce chiffre triplera d’ici 2050 et dépassera le poids de tous les poissons de la mer réunis.
Le plastique est un sous-produit des combustibles fossiles. Les scientifiques estiment que d’ici 2050, l’industrie du plastique représentera 20 % de la production totale de pétrole et 15 % du bilan de carbone annuel mondial.
Le plastique pollue terre, eau et air. Il tue les oiseaux et la vie aquatique en plus de causer des problèmes de santé humaine.
Le plastique est rendu partout : on trouve désormais des microplastiques dans le lait maternel et les tissus humains, notamment le cerveau, le cœur et les testicules. Des particules de plastique ont même été découvertes dans les coins les plus reculés de la planète, depuis les abysses océaniques jusqu’à la cime des montagnes. D’immenses plaques de déchets plastiques tourbillonnent dans les gyres océaniques. Bref, l’espèce humaine est en train de plastifier la biosphère et se plastifier elle-même.
Environ 40 % de tout le plastique produit est jetable et à usage unique. Si vous ne pensez pas que les pailles, les ustensiles et les sacs en plastique constituent un problème (un problème mineur, mais facile à régler), sachez que ces objets sont rarement recyclés et aboutissent souvent dans la nature – dans les cours d’eau, les océans, la terre et l’air. Le plastique ne se biodégrade jamais : il continue simplement à se décomposer en particules toujours plus fines, jusqu’à pouvoir s’infiltrer partout, de la vie marine jusqu’au corps humain. Le recyclage n’est qu’une infime partie de la solution; il est aussi essentiel de réduire la production de plastique et son utilisation.
C’est pourquoi, après deux ans de pourparlers, la communauté internationale s’est réunie le mois dernier à Busan, en Corée du Sud, pour ce qui devait être la cinquième et dernière phase de négociations concernant un « instrument international juridiquement contraignant sur la pollution plastique, applicable notamment dans le milieu marin ».
Mais les négociations ont échoué. La cause? Les 220 lobbyistes de l’industrie chimique et de l’industrie des combustibles fossiles, qui dépassaient en nombre les membres des délégations nationales et scientifiques. Étaient aussi de la partie les représentant.e.s de pays producteurs de pétrole, dont l’Arabie saoudite, l’Iran et la Russie. Au bout du compte, les références aux droits des peuples autochtones et aux droits de la personne ont été retirées du projet de traité final, et les lobbyistes de l’industrie des combustibles fossiles ont fait avorter les tentatives visant à limiter la production du plastique.
Le plastique ne se biodégrade jamais : il continue simplement à se décomposer en particules toujours plus fines.
Des discussions de suivi sont prévues pour 2025, mais l’industrie des combustibles fossiles et ses chantres du gouvernement entendent bien rester sur leur position. Alors que le monde délaisse le pétrole, le gaz et le charbon, des matières polluantes qui détraquent le climat, la production de plastique représente un autre immense générateur de profits pour cette industrie.
Les sociétés pétrolières mentent depuis longtemps sur les véritables conséquences de la combustion de leurs carburants. Elles mentent aussi au sujet du plastique qu’elles fabriquent, sous-produit des combustibles fossiles qui pollue et génère des émissions de gaz à effet de serre durant tout son long cycle de vie. Pendant les négociations entourant le traité, la duperie s’est poursuivie.
Le gouvernement californien a même intenté une action en justice contre le géant pétrolier ExxonMobil pour sa « campagne de tromperie qui dure depuis des décennies » et qui empire la crise mondiale de la pollution plastique.
« Pendant des décennies, ExxonMobil a mené les gens en bateau en faisant croire que le recyclage du plastique pourrait résoudre la crise des déchets plastiques et de la pollution, et ce, tout en sachant parfaitement que c’était impossible », a déclaré le procureur général de Californie, Rob Bonta. « ExxonMobil a menti pour continuer de gonfler ses profits record au détriment de la planète, peut-être aussi aux dépens de notre santé. »
Si nous laissons l’industrie des combustibles fossiles tirer les ficelles de l’économie et contrôler nos vies pour engranger des profits indécents, nous courons droit à notre perte.
Le plastique est pratique à maints égards : il est léger, durable, peu coûteux, malléable, facile à colorer et utile pour stocker diverses matières, de l’eau aux produits chimiques. Mais le fait est que nous avons réussi à nous en passer pendant la majeure partie de l’histoire de l’humanité. Les produits en plastique les plus couramment utilisés n’existent que depuis environ 75 ans, et les épiceries nord-américaines n’ont commencé à proposer des sacs en plastique qu’à la fin des années 1970. Par ailleurs, de nos jours, nous disposons de meilleures solutions de rechange.
Selon une étude, les principes de l’économie circulaire pourraient nous aider à résoudre la crise du plastique en nous amenant à éliminer tous les articles en plastique problématiques et superflus, à innover pour faire en sorte que les plastiques soient réutilisables, recyclables ou compostables et, enfin, à faire circuler tous les articles en plastique pour les garder dans l’économie et hors de l’environnement.
Si nous laissons l’industrie des combustibles fossiles tirer les ficelles de l’économie et contrôler nos vies pour engranger des profits indécents, nous courons droit à notre perte. La pollution plastique est futile et doit être enrayée dès maintenant.
Si chacun.e de nous a tout intérêt à utiliser moins de plastique, il n’en demeure pas moins que le véritable changement doit venir d’en haut.