Si vous survolez une forêt, vous verrez que chaque arbre et chaque plante pointent vers le ciel pour absorber la source d’énergie par excellence : la lumière du soleil. Pour contre, si vous survolez une ville, vous verrez des toits, des rues et des trottoirs qui ignorent tous les bienfaits du soleil. La recherche démontre que nous ferions mieux de penser davantage comme une forêt.
Les routes solaires pourraient tracer la voie dans cette direction. Les rues, les trottoirs et les terrains de stationnement occupent de vastes étendues. En les utilisant pour produire de l’électricité, nous perturberions moins l’environnement, car nous n’empiéterions pas sur de nouvelles terres pour implanter des installations solaires.
La société française Colas collabore avec l’Institut national de l’énergie solaire français (INES) pour tester la technologie Wattway dans diverses conditions. Au cours des quatre prochaines années, ce projet permettra de recouvrir 1 000 kilomètres de routes existantes d’un mince revêtement photovoltaïque robuste et antidérapant. On estime que cela pourrait approvisionner cinq millions de personnes en électricité. Bien que des critiques s’élèvent au sujet des coûts et de la faisabilité de ce projet, il n’a rien d’utopique. Cette technique est déjà testée et implantée dans le monde entier.
Les toits sont aussi des infrastructures existantes qui peuvent se prêter à la production d’énergie électrique. La société d’Elon Musk, Tesla, fabrique des bardeaux qui sont aussi des panneaux solaires. Bien qu’ils coûtent plus cher que les bardeaux d’asphalte ordinaires, leur prix se compare à celui de tuiles de qualité supérieure et est compensé par les économies qu’ils génèrent par leur production d’électricité.
À l’heure où la planète continue de se réchauffer, ces technologies en développement démontrent que nous pouvons et devons dépasser nos vieilles façons de faire. Au Canada et ailleurs, les politiciens ont souvent choisi d’éviter le sujet, soit en congédiant des scientifiques gouvernementaux et en contrôlant leurs déclarations publiques, soit en perpétuant le statu quo par un soutien généreux à des technologies risquées et non prouvées comme la capture et l’entreposage du dioxyde de carbone qui nous liera aux combustibles fossiles pendant les années à venir. Il est totalement illogique d’extraire le bitume des sables bitumineux, de le transporter, de le brûler et d’essayer de capturer les émissions afin de les réinjecter dans le sol où la nature a déjà entreposé le carbone. La nature a pris des millions d’années pour le faire. L’humain n’est pas un animal très patient.
L’auteure scientifique américaine Janine Benyus utilise le terme « biomimétisme » pour désigner les technologies qui s’inspirent de la nature pour résoudre des problèmes ou exploiter des avantages potentiels. Le concept est important, car il exige une humilité et un respect des processus naturels plutôt que le recours à des innovations technologiques imparfaites, mais puissantes.
Toutes les espèces sont confrontées aux mêmes enjeux : trouver de l’énergie et de la nourriture, éviter les prédateurs et les maladies (même les bactéries sont vulnérables aux infections virales), gérer ses déchets et se reproduire. Au fil du temps, les stratégies pour faire face à ces enjeux ont évolué. Notre espèce présente une admirable capacité de survie et un cerveau imposant par rapport à la taille de son corps. Plus que toute autre espèce, nous avons la capacité de nous poser des questions et de trouver des réponses. À cet égard, nous pouvons puiser une mine de solutions dans la manière dont les autres espèces ont géré ces enjeux.
Le biomimétisme a inspiré de nombreuses applications, de la production d’énergie par photosynthèse artificielle à la construction de structures de soutien légères basées sur les propriétés du bambou.
Il nous faut comprendre la nature et savoir évoluer dans son cadre pour surmonter les nombreux problèmes que nous avons causés en essayant d’imposer nos technologies aux systèmes naturels. Les énergies fossiles ont été formées il y a des centaines de millions d’années par l’absorption et la conversion de la lumière du soleil par les plantes grâce à un processus de photosynthèse. En se décomposant, ces plantes chargées d’énergie et les animaux qui les ont consommées se sont compactés et déposés profondément dans la Terre. L’utilisation rapide de ces ressources limitées est absurde, d’autant plus qu’elles ont de multiples autres utilités connues et, possiblement, à découvrir.
Forts de nos connaissances et de notre sagesse, nous devrions dépasser le concept primaire de brûler de la matière pour nous garder au chaud et assurer notre confort, sans égard aux conséquences : la pollution de l’air, de l’eau et de la terre, avec ses effets néfastes sur la santé, et les changements climatiques, qui mettent la survie de l’humanité en péril.
Nos systèmes économiques ne favorisent généralement pas les façons de faire les plus efficientes et les moins néfastes pour répondre à nos besoins. Ils privilégient les avenues les plus rapides, les moins chères et les plus rentables économiquement. Nous pouvons faire mieux. Commençons déjà par capter l’énergie solaire et comprendre comment la nature relève ses défis.
Traduction : Michel Lopez et Monique Joly