La météo et le climat sont deux choses différentes. Que quelques personnes peu ou mal renseignées sur le réchauffement climatique confondent les deux, passe encore. Mais lorsque des élus ne font pas la différence, le problème est plus grave.
Les commentaires sur le réchauffement climatique que le président des États-Unis a tweetés en citant l’hiver rigoureux qu’ont subi plusieurs régions de son pays dénotent une ignorance crasse qui serait embarrassante pour le commun des mortels. Or, elle est le fait du dirigeant d’une puissance mondiale.
Pour bien comprendre la distinction, il est important de connaître la différence entre « réchauffement climatique » et « changements climatiques ». Bien que l’on utilise souvent l’un pour l’autre, il y a une nuance entre les deux termes. Le réchauffement climatique actuel fait référence au phénomène général selon lequel la moyenne des températures sur la planète connaît une augmentation plus rapide que celle attribuable à des facteurs naturels connus. Une grande partie des changements climatiques que nous observons déjà – phénomènes météo extrêmes, inondations, sécheresse, altération des courants marins – résulte du réchauffement climatique.
Selon la NASA, cette situation engendre toute une série d’effets comme « la hausse du niveau des océans, le rétrécissement des glaciers de montagne, l’accélération de la fonte des glaces au Groenland, en Antarctique et en Arctique, ainsi que des variations dans les périodes de floraison des fleurs et des plantes ». Tout cela affecte notre agriculture, notre alimentation, notre approvisionnement en eau et même les migrations humaines.
Le « réchauffement climatique » et « les changements climatiques » font référence à des phénomènes et effets moyens à long terme, tandis que « la météo » désigne des variations climatiques locales qui se produisent sur « de courtes périodes de quelques minutes, heures, jours ou semaines ». Citons « la pluie, la neige, les nuages, le vent, les orages, les vagues de chaleur et les inondations », explique la NASA.
Une grande partie des changements climatiques que nous observons déjà – phénomènes météo extrêmes, inondations, sécheresse, altération des courants marins – résulte du réchauffement climatique.
Alors, qu’en est-il de ces records de froid enregistrés dans certaines régions de l’Est américain et du Canada ? Tout d’abord, rappelons que le réchauffement climatique s’applique à la planète tout entière, pas à un lieu en particulier. Pendant que certaines régions de l’Amérique du Nord subissent des froids records, des régions comme l’Australie font face à des vagues de chaleur extrême.
À l’échelle mondiale, les quatre dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées et les vingt années les plus chaudes ont été enregistrées au cours des 22 dernières années.
Plusieurs études démontrent que le réchauffement climatique engendre un nombre croissant de vagues de froid dans l’Est de l’Amérique du Nord. « Les températures chaudes de l’Arctique provoquent des oscillations anormales du courant-jet qui, lorsqu’il descend plus au sud, entraîne aussi un afflux d’air polaire plus au sud. Ces oscillations ont tendance à se maintenir un certain temps, ce qui entraîne une stagnation du temps chaud ou froid dans l’Est américain », explique Jennifer Francis, professeure-chercheure en sciences marines et côtières à la Rutgers’ School of Environmental and Biological Sciences, coauteure d’une étude publiée dans Nature Communications.
Selon le National Geographic, cela signifie également que « les inondations durent plus longtemps et que les sécheresses deviennent plus persistantes. »
Pendant que certaines régions de l’Amérique du Nord subissent des froids records, d’autres régions comme l’Australie font face à des vagues de chaleur extrême. À l’échelle mondiale, les quatre dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées, et les vingt années les plus chaudes ont été enregistrées au cours des 22 dernières années.
L’étude a révélé « qu’un hiver rigoureux est de deux à quatre fois plus probable dans l’Est américain lorsque l’Arctique est anormalement chaud que lorsqu’il est anormalement froid ». Les hivers sont également plus froids en Europe du Nord et en Asie lorsque l’Arctique est chaud. L’inverse est vrai dans l’Ouest de l’Amérique du Nord, où les hivers rigoureux sont plus probables « lorsque l’Arctique est plus froid qu’à la normale ». Les effets sont plus prononcés lorsque le réchauffement de l’Arctique s’étend au-delà de la surface, ce qui cause des perturbations dans le vortex polaire stratosphérique.
Des températures plus chaudes peuvent également entraîner une augmentation des précipitations sous forme de pluie ou de neige. Comme le souligne un article de Scientific American, les températures plus chaudes de l’hiver 2006 ont empêché le lac Érié de geler pour la première fois de son histoire, ce qui « a entraîné une augmentation des chutes de neige parce que l’évaporation d’une plus grande masse d’eau libre a alimenté les précipitations ».
La fonte des glaces dans l’Arctique, l’Antarctique et sur les glaciers expose la terre ou la mer et crée des boucles de rétroaction, car les surfaces sombres absorbent plus de chaleur solaire que la glace et la neige, qui la reflètent. Ce phénomène accélère le réchauffement.
Donc, non, une journée froide chez vous n’est pas la preuve que le réchauffement climatique est un « canular ». Les scientifiques du monde entier s’entendent : tant que les humains continueront à brûler des combustibles fossiles et à détruire les zones qui absorbent le dioxyde de carbone, comme les forêts et les terres humides, la température moyenne de la planète continuera d’augmenter, avec des conséquences fâcheuses pour la santé et la survie humaines, ainsi que pour la biodiversité sur laquelle nous comptons.
Une étude publiée dans Science Advances prédit que les phénomènes météo extrêmes pourraient augmenter de 50 pour cent au cours du siècle si l’on ne contrôle pas nos émissions. Il est temps de prendre tout cela très au sérieux.
Traduction : Michel Lopez et Monique Joly