Des conteneurs et grues au port de Vancouver

Des conteneurs et grues au port de Vancouver, une porte d’entrée majeure pour le commerce canadien. La politique commerciale renouvelée du Canada devrait donner la priorité à la justice économique et à la durabilité environnementale en adhérant à des principes directeurs avant-gardistes. (Photo : Anastasia Dalenka via Unsplash)

Depuis les élections fédérales d’avril, le Canada se retrouve en terrain inconnu. La guerre commerciale lancée par les États-Unis contre ses alliés de longue date fait rage, en plus de la déréglementation extrême et des attaques toujours plus nombreuses contre les infrastructures numériques, les données et les systèmes de communication qui protègent l’intérêt public et surveillent la mise en œuvre et le respect de l’État de droit (article en anglais).

Les risques qui en découlent pour l’énergie, la nourriture, l’eau et la sécurité humaine au Canada ont entraîné une résurgence regrettable de l’intérêt politique et du soutien pour la construction de pipelines de combustibles fossiles dans tout le pays, et pour la recherche de nouveaux partenaires commerciaux pour les énergies fossiles polluantes du Canada.

Cette réaction archaïque dans le contexte de la crise climatique pourrait avoir des effets néfastes sur la santé publique et les écosystèmes et irait à l’encontre des recommandations scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat et de l’Agence internationale de l’énergie. De plus, le Canada aurait des actifs irrécupérables, augmentant ainsi les énormes coûts économiques, sociaux, environnementaux et culturels de l’exploitation des énergies fossiles (source en anglais).

La fiabilité des États-Unis en tant que partenaire commercial, ainsi que leur crédibilité en tant que membre de la communauté internationale, se sont effondrées.

Une approche davantage axée vers le futur consisterait à profiter de ce moment historique de perturbation pour améliorer la cohérence entre les accords commerciaux et environnementaux et stimuler la mise en œuvre des engagements mondiaux pris dans le cadre du Pacte pour l’avenir, de l’Accord de Paris, du Cadre mondial de la biodiversité et d’autres mécanismes de coopération qui soutiennent des approches du développement durable fondées sur des données probantes et scientifiquement documentées.

Alors que les États-Unis sont occupés à démanteler leurs lois environnementales et les organismes fédéraux chargés de protéger la santé publique et environnementale, le gouvernement du Canada doit reconnaître que l’expansion du commerce avec les États-Unis aura des impacts négatifs sur la protection de l’environnement et de la santé publique au-delà des frontières. Le Canada devrait s’assurer que tous nos futurs accords commerciaux intègrent des normes environnementales fondamentales, y compris les principes de précaution et du pollueur-payeur, et l’équité intergénérationnelle.

À l’approche d’un examen de l’accord commercial Canada–États-Unis–Mexique, certains ont suggéré que le Mexique et le Canada devraient chacun conclure des accords bilatéraux avec les États-Unis, mais cela renforcerait davantage le pouvoir des États-Unis et irait à l’encontre des intérêts des deux autres pays. La fiabilité des États-Unis en tant que partenaire commercial, ainsi que leur crédibilité en tant que membre de la communauté internationale, se sont effondrées. Le fait de conserver des relations commerciales avec une superpuissance délinquante comme les États-Unis affaiblira considérablement la résilience nationale du Canada aux chocs systémiques.

La politique commerciale renouvelée du Canada devrait donner la priorité à la justice économique et à la durabilité environnementale en adhérant à des principes directeurs avant-gardistes.

Mais cela présente également une occasion historique. Au lieu d’adhérer à un nationalisme régressif fondé sur le réinvestissement dans l’industrie trompeuse, déclinante et imprévisible des énergies fossiles qui a injustement profité de la classe ouvrière en difficulté au profit de ses dirigeants et actionnaires, le Canada doit renforcer ses relations avec de nouveaux partenaires commerciaux de longue date, soit l’Union européenne et le Mexique, ainsi que les pays du Sud et les économies émergentes.

La richesse inhérente à cette approche est immense : de nouveaux marchés des énergies renouvelables, des industries nationales plus fortes et un rôle de premier plan dans une économie mondiale enracinée dans la justice environnementale et la coopération. En harmonisant son approche commerciale avec l’objectif de réformer les structures économiques mondiales afin de promouvoir un développement équitable et de réduire les disparités mondiales, le Canada peut élaborer une politique commerciale florissante et juste.

La politique commerciale renouvelée du Canada devrait donner la priorité à la justice économique et à la durabilité environnementale en adhérant à des principes directeurs avant-gardistes. Ces mesures comprennent le respect de la souveraineté autochtone, le réinvestissement de la richesse dans les économies locales et autochtones et l’élimination des droits de douane sur les biens et services environnementaux. Les nouveaux accords commerciaux devraient définir et éliminer progressivement les subventions aux énergies fossiles qui sont préjudiciables afin d’éliminer les distorsions du marché qui favorisent les secteurs à forte intensité de carbone, promouvoir l’écoétiquetage et réaliser des évaluations périodiques de l’impact sur l’environnement.

Le Canada se voit donc offrir une occasion unique de reprendre son rôle de leader sur la scène mondiale.

Une approche commerciale réinventée devrait également mettre l’accent sur la transparence, la participation du public et la gouvernance inclusive dans les négociations commerciales, permettant ainsi une mobilisation significative des groupes de la société civile et des titulaires de droits autochtones. Cette approche devrait favoriser la levée des barrières commerciales sur les technologies propres, le progrès des mesures d’adaptation aux changements climatiques et la collaboration avec les pays en développement dans le domaine du commerce durable. Elle devrait promouvoir davantage la justice environnementale, les droits des travailleurs dans les économies informelles et les chaînes d’approvisionnement éthiques qui respectent les droits de la personne et la protection de l’environnement.

Le monde fait actuellement face à de nouveaux défis liés à l’isolationnisme commercial croissant et aux attaques contre l’État de droit national, régional et international de la part des États-Unis, et le Canada se voit donc offrir une occasion unique de reprendre son rôle de leader sur la scène mondiale.

En adoptant un nouvel internationalisme, le Canada peut renforcer ses alliances avec des pays partageant les mêmes idées et tracer une voie vers le multilatéralisme et le commerce fondée sur la protection des droits de la personne fondamentaux, y compris les droits environnementaux. Cela réaffirmera non seulement le rôle historique du Canada en tant que créateur de liens sur la scène internationale, mais cela nous permettra également de jouer un rôle de chef de file dans l’élaboration d’un ordre mondial plus équitable et plus coopératif dans un contexte de dynamiques géopolitiques changeantes.