Plusieurs fois par an, la Fondation David Suzuki met de l’avant les initiatives d’un groupe citoyen membre du Réseau Demain le Québec. Focus sur la Petite-monnaie, une devise locale complémentaire au dollar canadien, qui est implantée en Petite Nation en Outaouais depuis l’an dernier.
La Petite-monnaie participe à la création d’une identité régionale en facilitant l’intégration des entreprises, de même que le maillage entre les commerces et la population locale de manière didactique, tangible et en temps réel. J’ai rencontré le chargé de projet, Vincent Ouellette-Destroismaisons, afin d’en apprendre davantage.
Notre région est vieillissante donc c’est important de renouveler ce qui s’y trouve et de donner le goût aux gens de rester et à d’autres de venir. C’est une sorte de carte de visite. La Petite-monnaie la fait rayonner et y facilite l’insertion.
Vincent Ouellette-Destroismaisons
Historique et fonctionnement
La création d’une monnaie locale, autrefois appelé le Grosleau, est initialement amorcée par la Coopérative Place du Marché en 2018 et est utilisable entre les producteur.rice.s qui en sont membres. Bien que son rôle soit marginal, l’année 2023 cristallise l’engouement de la population pour un projet davantage structuré.
Aussitôt dit, aussitôt fait : une demande de subvention est effectuée auprès de l’Agro Lab Petite Nation, qui est octroyée. Brièvement, cet organisme vise à résoudre ou améliorer les questions en lien avec l’accès à l’alimentation locale, la mutualisation des ressources et des services, une économie circulaire et l’agroenvironnement.
Dès lors, plusieurs acteur.rice.s sont impliqué.e.s dans ce système de monnaie locale de la MRC de Papineau. Les gens de la région échangent leurs dollars canadiens en petite-monnaie, ce qui leur confère une bonification de 5 % du montant converti. De leur côté, les 140 commerçant.e.s participant.e.s ont pour rôle de communiquer qu’iels acceptent cette devise. La Coopérative Place du Marché, quant à elle, se charge de prendre les dépôts.
Ainsi, les consommateur.rice.s peuvent utiliser leur Petite-monnaie au sein des entreprises participantes et celles-ci peuvent payer d’autres commerçant.e.s pour écouler leur petite-monnaie. On distingue les commerces de milieu de ligne et ceux de fin de ligne. Les premiers peuvent facilement recourir à la devise locale dans le cadre de leurs activités, comme les restaurants et les épiceries. Les seconds ont quant à eux moins de possibilités de réussir à utiliser la petite-monnaie et de payer leurs fournisseur.euse.s de cette façon. Chaque année, les entreprises de milieu de ligne peuvent alors reconvertir sans aucuns frais jusqu’à 6 000 Petite-monnaies en dollars canadiens et les commerces de fin de ligne, jusqu’à 24 000 Petite-monnaies.
En outre, l’achat de la devise locale peut se faire au sein de bureaux de change. Ces derniers, au nombre de 12 dans huit villages différents à ce jour, se trouvent dans des commerces de proximité, tels que les boulangeries et les épiceries, et vendent des enveloppes bonifiées. De plus, il est possible de se procurer virtuellement la Petite-monnaie depuis le 16 novembre dernier via une application numérique dédiée.
Soutien et obstacles
Le mois de décembre 2023 a marqué la fin des médias locaux, soit six mois avant le lancement de la devise locale, affectant sa promotion en dehors des réseaux sociaux. Comme le souligne Vincent Ouellette-Destroismaisons, le média en tant que lien social aurait aidé à propager l’arrivée de la Petite-monnaie. Toutefois, le projet se déploie progressivement, un village à la fois.
Il reçoit l’appui de la MRC de Papineau à travers le Fonds Agro Lab en Actions, ainsi que la Caisse Desjardins de la Petite Nation. De plus, les lignes directrices de la chouenne, monnaie charlevoisienne, sont suivies. Un concours d’illustration est entre autres organisé : les visuels des différents billets sont créés par des artistes locaux.ales, qui font honneur aux espèces animales vulnérables présentes sur le territoire, telles que la paruline azurée ou le hibou des marais.
Enfin, le chargé de projet ajoute que le responsable de l’application de la Petite-monnaie, par ailleurs chargé de la gestion virtuelle de 38 monnaies locales francophones dans le monde, a apporté un soutien important au niveau du développement.
Afin de guider de nouveaux projets de monnaies locales à voir le jour et se mobiliser, Vincent Ouellette-Destroismaisons aimerait fonder un regroupement des monnaies locales. À suivre…