Marche climate

Le 27 septembre 2024, de nombreuses personnes ont marché dans les rues de Montréal pour demander une véritable transition sociale et environnementale. (Photo : Laurence Bolduc / Fondation David Suzuki)

Il est difficile pour moi d’imaginer à quoi ressemble la vie des jeunes d’aujourd’hui. Encore ce mois-ci, la jeunesse est descendue dans les rues – accompagnée d’allié.e.s plus âgé.e.s – afin de réclamer des actions pour enrayer la crise climatique. Mais pendant ce temps, ici au Canada et ailleurs dans le monde, la classe politique fait campagne sur la nécessité ou non de préserver des politiques climatiques efficaces comme la tarification du carbone. Nous avons pourtant besoin de plus de politiques et de règlements pour combattre le réchauffement planétaire… pas moins!

C’est bouleversant de voir un enjeu si crucial être politisé et polarisé, et désolant de constater combien certaines figures politiques font peu de cas de nos enfants et petits-enfants et des enfants à naître – ou de la planète et de ses systèmes, essentiels au maintien de la vie. La classe politique a de quoi faire peur : certain.e.s de ses membres ne semblent même pas comprendre la crise, voire nient carrément son existence. C’est particulièrement triste quand on sait que tant de solutions sont à notre portée. Que ce soit par ignorance ou avarice, faire marche arrière quant à l’adoption de politiques climatiques nécessaires nuira à tout le monde.

Si l’idée d’élever l’économie, une création humaine, au-dessus des systèmes naturels qui nous gardent en vie et en santé ne tient pas la route depuis le début, nous voyons maintenant clairement l’interconnexion entre l’économie et l’environnement. La crise climatique nous coûte plus cher chaque jour.

C’est bouleversant de voir un enjeu si crucial être politisé et polarisé, et désolant de constater combien certaines figures politiques font peu de cas de nos enfants et petits-enfants et des enfants à naître.

Pensons aux saisons des feux qui s’allongent et s’intensifient, à cause des forêts plus sèches et du temps plus chaud; aux sécheresses qui perturbent l’agriculture et augmentent le coût des aliments; à l’afflux croissant de personnes migrantes fuyant des zones inhospitalières; aux primes d’assurance qui grimpent à mesure que les catastrophes climatiques s’aggravent; à la montée du niveau de la mer, qui engloutit les habitations et inonde les zones côtières; à la pollution, qui mine la santé et cause la mort. La facture est salée. Et elle continue de monter.

Comme si ce n’était pas assez, la volatilité des marchés des combustibles fossiles et la hausse des prix du gaz et du pétrole font grimper l’inflation et les prix partout, autant à l’épicerie qu’à la station d’essence. Pendant ce temps, les têtes dirigeantes de l’industrie engrangent des profits indécents alors que les gouvernements continuent de subventionner leurs entreprises meurtrières.

Les énergies renouvelables pouvant être stockées – éolienne, solaire, géothermique, etc. – sont désormais plus intéressantes que les combustibles fossiles : leur rapport coût-efficacité est bien meilleur et leurs prix baissent vite. Même si aucune source d’énergie n’est parfaite, toujours est-il que les énergies renouvelables sont loin de détériorer autant la terre, l’eau, l’air et la santé humaine que le charbon, le gaz et le pétrole.

Une juste transition des combustibles fossiles vers une énergie plus propre (associée à une meilleure efficacité et à une consommation énergétique moindre) comporte de multiples avantages : créer de bons emplois, stimuler l’innovation, délaisser les économies axées sur les ressources et assujetties au cycle de surchauffe et de récession, accroître notre indépendance à l’égard des affairistes avides de s’enrichir avec le pétrole et le gaz ainsi que de leurs marionnettes politiques.

Nos enfants, dont beaucoup sont trop jeunes pour voter, méritent mieux. Nous méritons tous et toutes mieux.

Il n’existe aucun argument économique valable contre l’abandon des combustibles fossiles. Cela dit, l’économie ne devrait même pas peser dans la balance. Les scientifiques qui étudient le dérèglement climatique et ses nombreux effets nous avertissent depuis des décennies : si nous injectons plus de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et continuons de détruire les puits de carbone et les systèmes naturels, nous nous rapprocherons des points de bascule et des limites planétaires au-delà desquelles s’amenuise l’espoir de toute issue.

Le dioxyde de carbone, un puissant gaz à effet de serre, reste dans l’atmosphère pendant des centaines, voire des milliers d’années. Ainsi, même si nous arrêtions aujourd’hui de brûler des combustibles fossiles, la planète continuerait à se réchauffer. Heureusement, nous pouvons ralentir et éventuellement renverser le réchauffement, à condition d’écouter les avertissements et de sortir de notre dépendance aux carburants à la source de la crise.

Avec autant de problèmes majeurs à résoudre – crise du logement, manque d’accès aux soins de santé, prix inabordables et inflation, pollution, surpopulation, criminalité, violence, guerre –, il est absurde d’axer les campagnes électorales sur le maintien ou non de politiques climatiques efficaces. Nos enfants, dont beaucoup sont trop jeunes pour voter, méritent mieux. Nous méritons tous et toutes mieux.

Les élections devraient porter sur des questions dignes d’intérêt pour la population, y compris pour les jeunes qui n’ont pas encore l’âge de voter.

Le problème réside en grande partie dans le fait que nous vivons toujours dans un système économique consumériste désuet, qui encourage avant tout le profit, l’avidité et le gaspillage. C’est un système qui a été conçu quand les « ressources » ou le « capital naturel » semblaient intarissables et le capital bâti rare. Mais ce n’est plus le cas. Si nous voulons nous tourner vers des sources d’énergie plus propres et favoriser l’équité en empêchant l’accumulation de richesses énergétiques alors que tant de gens souffrent, il nous faut aussi repenser nos systèmes économiques.

Les élections devraient porter sur des questions dignes d’intérêt pour la population, y compris pour les jeunes qui n’ont pas encore l’âge de voter. Elles ne devraient pas devenir des compétitions où on utilise la peur et la propagande pour marquer des points au service d’une industrie moribonde, dangereuse pour notre santé et notre survie.

Je suis grand-père et tandis que j’approche de la fin de ma vie, je m’inquiète pour la jeunesse, qui a la sienne devant elle. Je crains que l’avidité, la lâcheté et l’ignorance ne mettent des bâtons dans les roues des nouvelles générations.

La jeunesse prend la parole parce que son avenir est en jeu. Compte-t-elle pour nous ou non?