Partage ta pelouse : le rapport de la campagne vulgarisé

Un tapis vert enraciné dans le temps… et les esprits

Les premières pelouses nord-américaines étaient constituées de toutes sortes de plantes aptes à survivre à une tonte régulière et au piétinement. Elles incluaient plusieurs plantes indigènes, appartenant essentiellement à la famille des graminées, ainsi que du trèfle, du plantain, du pissenlit et de la camomille.

Par la suite, le succès des herbicides au lendemain de la Seconde Guerre mondiale a permis d’obtenir un gazon plus vert et plus homogène, alors synonyme de propreté et de prospérité. Bien que la plupart des pesticides utilisés sur les pelouses sont prohibés par le gouvernement québécois depuis 2003, d’autres sont encore sur le marché. Ceci n’est pas sans soulever des inquiétudes tant du côté des professionnel.le.s de la santé que des écologistes.

En outre, bien que le gazon constitue l’une des plus grandes cultures irriguées en Amérique du Nord, il bénéficie pourtant peu à la biodiversité. En effet, les espèces végétales nectarifères qui s’y trouvent sont souvent coupées avant même de fleurir, nuisant aux insectes pollinisateurs.

De plus, les arbres, les arbustes, les haies et les champs herbacés sont bien plus efficaces pour dissiper la chaleur et réaliser des économies d’énergie. D’ailleurs, l’entretien de la pelouse consomme de grandes quantités d’eau! Au Canada, pas moins de 43 % des ménages ayant une pelouse ont déclaré l’arroser, selon les données de Statistiques Canada en 2017.

La solution? Aménager le territoire différemment, d’une manière qui favorise la connectivité des habitats et la migration des espèces, comme le souligne Maxime Fortin Faubert, Ph. D.

 

Cartographie des pelouses dans quatre villes québécoises

Afin de visualiser la place du gazon en milieu urbain, le stagiaire postdoctoral a développé une approche cartographique qui permet d’identifier les pelouses dans quatre municipalités québécoises, à savoir, Laval, Montréal, Saint-Jérôme et Sherbrooke. Pour ce faire, il a déterminé l’emplacement de l’ensemble de la végétation grâce à des photographies aériennes, puis il a utilisé un modèle de hauteur de canopée pour identifier celle qui s’élève à moins de 30 cm.

Bien qu’aucune analyse statistique n’ait été réalisée, la proportion des espaces gazonnés dans ces quatre villes semble liée à la densité de la population. Avec 3611 habitants/km², Montréal affiche la plus grande proportion de pelouses, soit 19 %. Avec ses 498 habitants/km², Sherbrooke présente quant à elle la plus faible proportion de pelouses, soit 8 %.

Les données qui en découlent permettent d’avoir un visuel qui met en évidence l’envergure du potentiel de changement et de cerner les opportunités de complexification du territoire, par le biais de l’ajout d’arbres, de plantes à fleurs ou d’arbustes.

Maxime Fortin Faubert, Ph. D.

De plus, cette cartographie offre l’opportunité d’établir des corrélations spatiales en lien avec d’autres variables, telles que des éléments géographiques, environnementaux, sociaux, politiques ou économiques.

Maxime Fortin Faubert ajoute qu’à court terme, cette cartographie servira à la sensibilisation et qu’à long terme, elle présentera un potentiel pour les municipalités. Celles-ci pourront recourir à cette méthodologie pour planifier l’aménagement du territoire et diversifier les espaces, identifier les zones et les quartiers où se trouve un plus grand potentiel d’action, ainsi que contribuer à la création de corridors écologiques.

Certaines s’y activent d’ailleurs déjà, par le biais d’initiatives comme la tonte différenciée, la réduction des pesticides, l’instauration d’une stratégie sur les pollinisateurs ou la distribution gratuite de semences à la population.

Et à l’échelle individuelle alors? Pourquoi ne pas adopter une autre approche pour l’entretien de votre pelouse, voire à en convertir une partie pour la partager avec la nature? Ce sera le sujet de notre prochain blogue. À suivre…